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Full text of "Histoire de timbre-poste français"

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LOUIS     LEROY 

ANCIEN    SOUS-CIIEF    DE    BUREAU 

A  l'admiiMStration    centrale  des  postes 

^  Uri^^^^^HM'JHKjB  ET     DES     TÉLÉGRAPHES 

5  lal^l^K  .J!^I9I@(S  ANCIEN     RECEVEUR     PRINCIPAL    DU    RHONE 

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HISTOIRE 


DU 


TIMBRE-POSTE 


FRANÇAIS 


AVEC    Go   FIGURES   DANS    LE   TEXTE 


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CH.  ROUSSIN 

f),  Galerie  d'Orléans 
(Palah-Royal) 

PARIS 


J.-B.  MOENS 

rue    (le    Florence 
BRUXELLES 


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LOUIS     LEROY       — —  ^ 

ANCIEN    SOUS-CHEF    DE    DUUEAIT 

A     I.'aDMINISTUATION     centrale    des    I'OSTES 

ET     DES     TÉLÉGRAPHES 

ANCIEN     RECEVEUR     PRINCIPAL    DU    RHÔNE 


^«suggaE^atgg;    S 


HISTOIRE 


DU 


TIMBRE-POSTE 


FRANÇAIS/ 


AVEC    60   FIGURES    DANS    LE   TEXTE 


^-y^w  '^v^'t 


GH.  RUUSSIN 

9,  Galerie  d'Orléans 
(Palais-Hoyal) 

PARIS 


J.-B.  MOENS 


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rue    (le    Florence 
BRUXELLES 


OruAA/vTw"  r\j\j  ■r^J^/\/^/vA/v'^y^/^yv^/^J^w^/v^/\Ay^rv/^/^A  O 


Jolie  petite  estampe ,  aussi  modeste  qu'utile  , 
c'est  sous  ton  égide  que  circulent  journellement 
des  millions  de  correspondances  relatives  aux  sen- 
timents du  cœur,  aux  sciences,  aux  aiïiiires. 

Tu  es  dans  toutes  les  mains,  tu  es...  à  toutes 
les  lèvres,  et,  cependant,  combien  peu  te  connais- 
sent autrement  que  pour  t'employer. 

Cest  ton  histoire  que  je  vais  écrire,  Thistoire  de 
tes  quarante  ans. 

J'ai  dit  «  histoire  ».  Le  mot  pourra  paraître 
prétentieux  pour  une  causerie  familière,  plaisante 
même  parfois,  dans  laquelle  les  renseignements 
alterneront  avec  l'anecdote. 

Je  la  dédie  à  la  grande  famille  postale  et  aussi, 
dans  un  sentiment  de  reconnaissance  pour  toi,  à 
ceux  qui,  seuls,  t'entourent  de  la  jalouse  sollici- 
tude que  tu  mérites  :  aux  collectionneurs. 


HISTOIRE 


DU 


TIMBRE-POSTE  FRANÇAIS 


CHAPITRE  PREMIER 


MODE    D  AFFRANCHISSEMENT    ET    TARIFS 
APPLIQUÉS   EN   FRANCE   ANTERIEUREMENT   A   l'aDOPTION 

DU  TIMBRE-POSTE.  —  PREMIERE  REFORME  POSTALE 

OPÉRÉE    EN     ANGLETERRE,    ORIGINE    DU    TIMBRE -POSTE. 

RÉFORME    POSTALE    EN    FRANCE. 

CRÉATION    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS. 


Un  concert  d'efforts,  suscité  par  des  besoins 
nouveaux,  a  réalisé  chez  tous  les  peuples,  en  quel- 
ques années,  une  véritable  transformation  du 
service  postal. 

L'établissement  des  chemins  de  fer  et  les  perfec- 
tionnements de  la  construction  navale  ont  dimi- 
nué considérablement  les  distances.   La  réforme 

1 


2  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS 

Opérée  au  moyen  du  timbre-poste,  et  complétée 
par  l'institution  de  l'Union  postale  universelle,  a 
fait  le  reste,  en  simplifiant  le  mode  d'affranchisse- 
ment et  en  réduisant,  dans  de  très  larges  propor- 
tions, les  tarifs  dont  l'élévation  entravait  le  déve- 
loppement de  la  correspondance. 

Pour  faire  exactement  apprécier  l'importance  de 
cette  réforme,  de  l'œuvre  du  timbre-poste,  rap- 
pelons succinctement  le  système  de  taxes  appliqué 
antérieurement,  en  vertu  d'une  loi  remontant  au 
15  mars  1827. 

La  taxe  des  lettres  était  proportionnelle  à  la 
distance.  Une  carte  de  France ,  disposée  de 
manière  à  permettre  de  calculer  aussi  prompte- 
ment  que  possible  les  sommes  à  percevoir,  était 
la  base  des  opérations.  Au  départ  de  Paris,  la 
capitale  étant  prise  comme  centre,  la  carte  de 
taxation  était  divisée  en  zones  concentriques  éche- 
lonnées d'après  la  progression  des  distances,  déter- 
minée par  la  loi  de  1827,  chaque  limite  de  zone 
franchie  représentant  une  augmentation  de  taxe 
de  10  centimes.  Pour  les  bureaux  autres  que 
Paris,  il  était  nécessaire  de  mesurer  la  distance  en 
ligne  droite  séparant  le  bureau  d'origine  du  bureau 


HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS  3 

de  destination,  et  de  la  reporter  sur  une  échelle 
de  tarif,  tracée  en  marge  de  la  carte.  Les  taxes 
étaient  acquittées  en  numéraire  aux  guichets  des 
bureaux  de  poste  exclusivement,  système  peu 
expéditif,  inconciliable  avec  un  mouvement  impor- 
tant de  correspondances. 

Les  progressions  de  distance  et  de  poids  étaient 
les  suivantes  : 

Progression  des  taxes  en  raison  de  la  distance,  pour 
une  lettre  simple,  ne  dépassant  pas  7  grammes  1/2. 

Jusqu'à  40  kilomètres 2  décimes 

De  40  à  80          —        3  — 

De  80  à  i5o        —        4  — 

Dei5oà220      —        5  — 

De  220  à  3oo      —        G  — 

De  3oo  à  400      —        7  — 

De  400  à  5oo      —        (S  — 

De  5oo  à  Goo       ^         q 

De  600  à  750      —        10  — 

De  750  à  900      —        II  — 

Au  delà  de  900  —        12  — 

Progression  des  taxes  en  raison  du  poids. 

Jusqu'à  7  grammes  1/2 port  simple. 

De  7  grammes  1/2  à  10  grammes,     un  port  et  demi. 

De  10  à  i5  grammes 2  ports. 

De  i5  à  20  grammes 2  ports  et  demi, 

et  ainsi  de  suite,  avec  augmentation  d'un  demi-port  par 
5  grammes  ou  fraction  de  5  grammes  excédant. 

Il  en  résultait  qu'une  lettre  simple  de  Lille  pour 


4  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS 

Marseille  payait  i  fr.  20  centimes  de  port;  si  la 
lettre  pesait  de  10  à  15  grammes,  elle  devait 
2  fr.  40  centimes,  soit  exactement  seize  fois  plus 
qu'aujourd'hui. 

Le  tarif  avait,  du  reste,  été  constamment  en 
augmentant  :  en  effet,  une  lettre  simple  pour  la 
distance  maximum  du  territoire  devait,  d'après  les 

tarifs  successifs  de  : 

1673 »  25  lyQ'j »  90 

1703 »  5o  1797 •>  75 

1759 »  70  1800 I     » 

1791 »  75  1827 I  20 

C'était  du  progrès à  rebours! 

Pour  l'étranger,  la  taxe  hors  de  France  venait 
s'ajouter  à  ce  tarif  :  prenons  l'exemple  d'une 
lettre  simple  de  Cassel  (Nord)  pour  Erfurth  (Alle- 
magne). La  taxe  française,  du  bureau  d'origine  à 
Forbach  (heu  d'échange),  était  de  7  décimes,  et 
celle  de  Forbach  à  Erfurth,  de  9  décimes;  au  total 
16  décimes.  Un  fr.  60  centimes  pour  une  lettre 
simple  à  destination  d'un  pays  voisin  !  et  si  la 
lettre  dépassait  10  grammes,  c'était  3  fr.  20  cen- 
times, tandis  que  maintenant,  le  même  objet,  jus- 
qu'à 15  grammes,  est  transporté  pour  25  cen- 
times, près  de  treize  fois  moins. 


HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS  5 

> 

Les  lettres  distribuables  dans  la  circonscription 
postale  du  bureau  de  dépôt  étaient  beaucoup  plus 
favorablement  traitées  :  15  centimes,  de  Paris 
pour  Paris;  10  centimes  dans  le  ressort  des 
autres  bureaux. 

A  l'Angleterre  revient  l'honneur  de  l'initiative 
dans  la  réforme  postale.  Sans  lui  en  contester  le 
mérite,  nous  avons  à  cœur  de  rappeler  que  c'est 
en  France  —  et  cela  remonte  à  près  de  deux 
siècles  et  demi  —  que  nous  trouvons  la  première 
application  d'un  système  de  perception  de  port 
à^ affranchissement,  évitant  au  public  l'obligation  de 
se  rendre  dans  un  bureau  de  poste  pour  acquitter 
la  taxe  en  numéraire.  En  1653,  M.  de  Velayer, 
maître  des  requêtes,  inaugurait  à  Paris  la  petite 
poste  et  les  boîtes  aux  lettres.  Il  établissait,  en 
même  temps,  un  mode  de  correspondance  avec 
réponse  payée  d'avance.  Il  n'est  pas  sans  intérêt 
de  reproduire  les  parties,  rentrant  dans  notre  sujet, 
de  Y  Instruction  affichée  à  cette  occasion  «  pour  ceux 
qui  voudront  escrire  d'un  quartier  de  Paris  en  un 
autre,  et  avoir  responce  promptement,  deux  et  trois 
fois  le  jour,  sans  y  envoyer  personne,  par  le  moyen 


6  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS 

de  l'establissement  que  Sa  Majesté  a  permis  être 
faict  par  ses  lettres  vérifiées  au  Parlement,  pour  la 
commodité  du  public  et  expédition  des  affaires  : 

«  On  fait  asçavoir  à  tous  ceux  qui  voudront 
escrire  d'un  quartier  de  Paris  en  un  autre,  que 
leurs  lettres,  billets  ou  mémoires  seront  fidelle- 
ment  portés  et  diligemment  rendus  à  leur  adresse, 
et  qu'ils  en  auront  promptement  responce,  pour- 
veu  que,  lorsqu'ils  escriront,  ils  mettent  avec  leur 
lettre  un  billet  qui  portera  «  port  payé  »,  parce 
que  l'on  ne  prendra  point  d'argent,  lequel  billet 
sera  attaché  à  ladite  lettre,  ou  passé  dans  la  lettre, 
ou  en  telle  autre  manière  qu'ils  jugeront  à  propos, 
de  telle  sorte,  néanmoins,  que  le  commis  puisse  le 
voir  et  Toster  aysément. 

«  Le  commis  général  qui  sera  au  Palais  vendra 
de  ces  billets  de  port  payé  à  ceux  qui  en  voudront 
avoir,  moyennant  le  pris  d'un  sol  marqué,  et  non 
plus.  » 

Un  écrivain  du  temps  publiait,  à  cette  occasion, 
les  bouts  rimes  suivants  : 


HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS  7 

On  va  bientôt  mettre  en  pratique 

Pour  la  commodité  publique 

Un  certain  establissement 

Mais  c'est  pour  Paris  seulement, 

Des  boettes  nombreuses  et  drues 

Aux  petites  et  grandes  rues 

Où,  par  soi-même  ou  son  laquais, 

On  pourra  porter  des  paquets 

En  dedans,  à  toute  heure  mettre 

Avis,  billet,  missive  ou  lettre, 

Que  des  gens  commis  pour  cela 

Iront  chercher  et  prendre  là. 

Pour,  d'une  diligence  habile, 

Les  porter  par  toute  la  ville, 

A  des  neveux,  à  des  cousins, 

Qui  ne  seront  pas  trop  voisins, 

A  des  gendres,  à  des  beaux-pères, 

A  des  nonnains,  à  des  commères, 

A  Jean,  Martin,  Guilmain,  Lucas, 

A  des  clercs,  à  des  avocats, 

A  des  marchands,  à  des  marchandes, 

A  des  galants,  à  des  galantes, 

A  des  amis,  à  des  agents, 

Bref  à  toutes  sortes  de  gens. 

Ceux  qui  n'ont  ni  suivants  ni  suivantes, 

Ny  de  valets,  ny  de  servantes, 

Seront  ainsi  fort  soulagez 

Ayant  des  amis  loin  logez. 

Outre  plus,  je  dis  et  j'annonce 

Qu'en  cas  qu'il  faille  avoir  responce 

On  l'aura  par  mesme  moyen. 

Et  si  l'on  veut  sçavoir  combien 

Coûtera  le  port  d'une  lettre, 

Chose  qu'il  ne  faut  pas  obmettre 

Afin  que  nul  n'y  soit  trompé, 

Ce  ne  sera  qu'un  sou  tape. 

(LoRET,  Galette  des  Muses.) 

M.  de  Velayer  fit  imprimer  des  formulaires  de 
diverses   sortes  répondant  aux   besoins   les   plus 


8  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS 

usuels  :  réclamation  à  un  débiteur,  commande  à 
un  artisan...  etc.,  de  telle  sorte  que  l'envoyeur 
n'avait  que  quelques  blancs  à  remplir.  Malgré  ces 
attentions,  l'institution  ne  tarda  pas  à  péricliter 
et,  finalement,  à  tomber  en  désuétude.  Elle 
n'avait  pas  été  prise  au  sérieux.  M.  Maxime  du 
Camp  dit  dans  un  ouvrage  sur  l'Administration 
des  Postes  [Revue  des  Deux  Mondes,  i"  janvier  1 867) 
que  l'on  prenait  plaisir  à  remplir  d'immondices 
les  boettes  et  à  y  faire  pénétrer  des  souris  qui 
rongeaient  les  lettres  :  l'heure  n'était  pas  venue. 

A  la  réforme  postale  anglaise,  on  rattache  une 
anecdote  d'un  charme  touchant  : 

Sir  Rowland  Hill,  se  reposant  un  jour  dans  une 
auberge,  remarqua  avec  quel  soin  attentif  la  ser- 
vante du  lieu  avait  examiné  la  suscription  d'une 
lettre  qu'en  fin  de  compte,  elle  avait  refusée. 
L'espiègle  ne  tardait  pas  à  lui  confier  que  son 
fiancé  habitait  Londres,  et  ne  passait  pas  une 
semaine  sans  lui  donner  de  ses  nouvelles.  Le 
voytigeur  s'étonnant  de  ce  que,  quelle  que  fût  l'ar- 
deur de  ses  sentiments,  un  simple  ouvrier  trouvât  le 
moyen  de  dépenser  12  pence  (i  fr.  25)  tous  les 
huit  jours,  pour  le  port  d'une  lettre,   la  servante 


HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS  9 

se  prit  à  sourire  malicieusement  et  avoua  qu'au 
moyen  de  dispositions  particulières  de  l'écriture  de 
l'adresse,  convenues  entre  elle  et  son  ami,  ils 
avaient  échangé  plus  de  cent  fois  des  nouvelles 
sans  qu'il  leur  en  eût  coûté  un  penny. 

Petite  cause,  grands  effets  :  qui  sait  si,  comme 
on  l'a  avancé,  le  récit  de  l'humble  servante  n'a 
pas  donné  à  sir  Rowland  Hill  la  première  pensée 
de  la  réforme  considérable  qu'il  réalisait  quelques 
années  plus  tard,  et  qui  devait  s'étendre  rapide- 
ment à  tous  les  pays  du  monde. 

Dès  1837,  Rowland  Hill  com.battait,  dans  une 
brochure,  la  taxe  à  la  distance,  proposant  la  taxe 
uniforme  et  la  création  d'estampes  pour  l'affran- 
chissement. La  Chambre  des  Communes,  tout  en  se 
montrant  favorable  au  principe  d'unification  , 
objecta  la  facilité  de  la  contrefaçon  de  figurines 
mobiles  et  fut  d'avis  que  l'on  employât  exclusi- 
vement des  enveloppes  d'un  papier  spécial.  La 
question  fut  longuement  débattue  et  l'on  fit,  sans 
résultat,  appel  aux  propositions  du  public,  en  vue 
d'un  système  pratique  d'affranchissement.  Enfin,  au 
mois  de  juin  1839,  après  avoir  eu  à  lutter  contre 
de  très  vives  résistances,  M.  Hill  faisait  triompher 


10  HISTOIRE    DU    TIMBRE- POSTE    FRANÇAIS 

l'idée  qu'il  avait  soutenue  avec  la  plus  persévérante 
conviction.  Le  lo  janvier  1840,  le  penny-postage 
(taxe  à  10  centimes)  était  appliqué,  et  l'on  adop- 
tait concurremment  le  timbre  adhésif  et  l'enveloppe 
de  Mulréady,  laquelle  fut  mise  en  circulation  le 
i"""  mai  de  la  même  année.  Le  système  des  enve- 
loppes port  payé,  après  avoir  été  accueilli  par  le 
public  avec  un  engouement  auquel  ne  fut  pas  étran- 
gère la  composition  allégorique  qu'elle  reprodui- 
sait, fut  délaissé  à  un  tel  point  que  le  stock  con- 
sidérable qui  avait  été  préparé  dut  être  anéanti. 
Le  timbre-poste  triomphait  :  saluons  sa  victoire! 

Tel  fut  le  point  de  départ  des  réformes  postales. 
Cet  immense  progrès  était  réalisé  en  Angleterre  en 
1840;  il  ne  devait  l'être  chez  nous  que  9  années 
plus  tard. 

Mais  quel  est  l'inventeur  de  l'instrument  de  ces 
réformes,  du  timbre  mobile  adhésif,  du  Timbre- 
poste}  —  Rowland  Hill,  d'après  l'opinion  publi- 
que. —  Non,  d'après  un  ouvrage  récemment 
publié  à  Londres  {Effingham  Wilson  and  C,  éditeurs ^ 
188^)  par  lequel  M.  Chalmers  réclame  le  mérite  de 
cette  invention  pour  son  père,  M.  James  Chalmers, 
libraire  à  Dundee  (Ecosse).  M.  Chalmers  affirme 


HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS  I  I 

que  non  seulement  son  père  avait  conçu  l'idée  du 
timbre-poste,  mais  que,  dès  1834,  i^  ^  imprimé 
des  feuilles  d'essai  de  figurines,  que  plusieurs  per- 
sonnes certifient  avoir  eues  entre  les  mains. 
Diverses  sociétés  timbrophiles  se  sont  ralliées  à 
cette  revendication.  Les  partisans  de  M.  Hill  s'ins- 
crivent en  faux  contre  ces  témoignages.  A  défaut 
de  preuves  absolument  convaincantes,  nous  tai- 
rons notre  humble  avis...  de  peur  de  mécontenter 
M.  Chalmers. 

En  admettant  même  que  la  première  idée  du 
timbre-poste  ait  été  partagée,  l'honneur  de  la 
réforme  postale  ne  revient  pas  moins,  incontesta- 
blement, à  M.  Hill  et  cela  suffirait  à  sa  gloire.  En 
1845,  le  commerce  de  Londres  lui  offrait,  par 
voie  de  souscription,  un  chèque  de  13  000  livres 
(325000  fr.)  à  titre  de  récompense  nationale. 
C'est  entouré  de  la  reconnaissance  publique  que 
cet  homme  illustre  vécut  jusqu'à  l'âge  de  84  ans; 
il  est  mort  en  1879. 

La  réforme  postale  s'est  étendue,  dans  Tordre 
chronologique  ci-après,  aux  principaux  Etats  de 
l'Europe  : 

1847.  —  Belgique. 


13  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS 

1848.  —  France. 

1850.  —  Autriche,  Espagne,  Prusse,  Suisse  et 
principaux  États  de  la  confédération  germanique. 

185 1.  —  Piémont,  Danemark. 

1852.  —  Hollande. 
1855.  —  Suède. 
1857.  —  Russie. 

1861.  —  Grèce. 

1862.  — Moldavie. 

1863.  —  Turquie. 

Comme  nous  venons  de  le  voir,  sir  Rowland 
Hill  n'avait  triomphé  qu'avec  beaucoup  de  diffi- 
cultés des  oppositions  du  parlement.  Néanmoins, 
son  projet,  mis  en  discussion  en  1838,  était  adopté 
en  1840. 

La  lutte  fut  beaucoup  plus  vive  et  surtout  beau- 
coup plus  longue  en  France. 

Rappelons  tout  d'abord  que,  dès  1832,  cinq 
années  avant  le  commencement  du  mouvement 
en  Angleterre,  l'éminent  journaliste  dont  le  cer- 
veau fécond  produisait  «  une  idée  par  jour  », 
Emile  de  Girardin,  avait  exprimé  le  vœu  de  la 
substitution  d'une  taxe  uniforme  (10  centimes  par 


HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS  l3 

lettre  simple;  nous  y  arriverons!)  à  la  taxe  pro- 
portionnelle à  la  distance. 

De  1839  à  1848,  la  question  de  la  réforme  pos- 
tale fut  reprise  d'année  en  année  à  la  Chambre 
des  Députés;  ce  n'est  qu'après  avoir  été  discutée 
9  années  de  suite  que  fut  réalisée  chez  nous  cette 
œuvre  éminemment  économique  et  démocratique. 

Il  serait  trop  long  de  suivre  ici  le  débat.  Notre 
collègue,  M.  Belloc,  dont  les  travaux  nous  ont 
évité  des  recherches,  en  a  parfaitement  résumé  les 
phases  dans  son  intéressant  ouvrage  :  Les  Postes 
Françaises.  Exposons  seulement  la  période  déci- 
sive : 

En  1848,  M.  Etienne  Arago,  directeur  général 
des  postes,  adressait  à  M.  Garnier  Pages,  Ministre 
des  Finances,  un  rapport  réclamant  à  nouveau  la 
réforme  postale.  Le  8  mai,  le  Gouvernement  pro- 
visoire annonçait,  en  ce  sens,  un  projet  de  loi, 
qui  était  déposé  le  26  du  même  mois.  Ce  rapport 
était  remis,  le  17  août,  par  M.  Saint-Priest,  propo- 
sant, d'après  les  résolutions  de  la  commission, 
des  dispositions  auxquelles  s'était  raUié  le  gouver- 
nement. Bref,  après  discussion  de  plusieurs  amen- 


14  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS 

déments,  fut  voté,  le  30  août  1848,  le  décret-loi, 
dont  les  articles,  rentrant  dans  le  cadre  de  cet 
ouvrage,  sont  ainsi  conçus  : 

Art.  I.  —  A  dater  du  i"''  janvier  1849,  toute 
lettre  du  poids  de  7  gr.  1/2  et  au-dessous,  circu- 
lant à  l'intérieur,  de  bureau  en  bureau,  y  com- 
pris la  Corse  et  l'Algérie,  sera  taxée  à  20  centimes. 

Art.  2.  —  Les  lettres  dont  le  poids  excédera 
7  gr.  1/2  et  ne  pèseront  pas  plus  de  15  grammes 
seront  taxées  à  40  centimes. 

Art.  3.  —  Les  lettres  et  paquets  de  papier  d'un 
poids  de  15  grammes  et  n'excédant  pas  100 
grammes  seront  taxés  à  i  franc  par  chaque 
100  grammes  ou  fraction  de  100  grammes  excé- 
dant. 

Art.  5.  —  L'Administration  des  Postes  est 
autorisée  à  faire  vendre,  au  prix  de  20  centimes, 
40  centimes  et  i  franc,  des  timbres  ou  cachets, 
dont  l'apposition  sur  une  lettre  suffira  pour  en 
opérer  l'afîranchissement. 

Ces  dispositions  furent  publiées  au  moyen  d'un 
«  avis  au  public  »  affiché  dans  toutes  les  communes. 


HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS  l5 

Nous  avons  la  bonne  fortune  de  posséder  un 
exemplaire  original  de  ce  document.  La  première 
partie  résume  les  dispositions  de  la  loi,  quant  aux 
taxes;  la  seconde,  particulière  au  timbre-poste, 
et  à  la  manière  de  s'en  servir,  nous  paraît  mériter 
une  citation  textuelle  : 

«  Le  public  reste  libre  d'affranchir  ou  de  ne 
pas  affranchir  ses  lettres  ordinaires  ;  cependant, 
pour  faciliter  l'usage  de  l'affranchissement,  et 
pour  éviter  aux  citoyens  le  déplacement  auquel 
le  mode  actuel  de  l'affranchissement  les  oblige, 
l'administration  fera  vendre,  au  prix  de  20  cen- 
times, de  40  centimes  et  d'un  franc,  des  timbres 
ou  cachets  dont  l'apposition  sur  une  lettre  suffira 
pour  en  opérer  l'affranchissement  dans  toute 
l'étendue  de  la  République.  Chaque  citoyen 
pourra  ainsi,  au  moyen  de  ces  timbres-cachets, 
affranchir  ses  lettres  sans  être  obligé  d'en  acquitter 
le  port  en  argent  dans  les  bureaux  de  poste. 

«  Ces  timbres  consistent  dans  une  petite  estampe 
représentant  une  tête  de  la  Liberté,  imprimée  en 
encre  rouge,  bleue  ou  noire,  sur  un  papier  dont  le 
revers  est  enduit  d'une  légère  couche  de  gomme. 


l6  HISTOIRE    DU    TIMBRE- POSTE    FRANÇAIS 

Le  prix  de  chaque  timbre  se  distingue  par  la  cou- 
leur de  l'encre.  » 

Constatons,  en  passant,  que  les  couleurs  pré- 
vues et  qui,  en  rapprochant  l'ordre  des  indica- 
tions, de  celui  des  valeurs,  devaient  être  attri- 
buées, la  couleur  rouge  au  timbre  de  20  centimes, 
la  couleur  bleue,  au  timbre  de  40  centimes  et  la 
couleur  noire  aux  figurines  d'un  firanc,  ont  été 
modifiées  dans  la  pratique. 

«  Pour  afiiranchir  une  lettre,  il  suffira  donc 
d'humecter  le  côté  du  timbre  qui  est  enduit  de 
gomme,  et  de  l'appliquer  sur  l'adresse  de  la  lettre, 
que  l'on  peut  ensuite  jeter  à  la  boîte  en  toute 
confiance  et  sans  autre  formafité.  Si  l'envoyeur 
place  sur  la  lettre  le  timbre  représentant  une 
valeur  moindre  que  celle  que  comporte  le  poids 
de  la  lettre,  l'administration  appliquera  à  la  lettre 
mal  afi"ranchie  un  supplément  de  taxe  qui  devra 
être  acquitté  en  argent  par  le  destinataire. 

«  Les  lettres  pesant  plus  de  100  grammes  s'af- 
fi'anchissent  également  au  moyen  des  timbres,  en 
appliquant  autant  de  timbres  (taxe  d'un  franc)  que 
la  lettre  contient  de  poids  de  100  grammes  ou 
fraction  de  100  grammes. 


HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS  I7 

«  Les  lettres  chargées  ou  recommandées  devront 
toujours  être  présentées  aux  bureaux  de  poste 
pour  y  être  soumises  aux  diverses  formalités  que 
leur  mode  d'expédition  comporte.  L'affranchisse- 
ment de  ces  lettres  sera  fait  au  bureau  par  l'agent 
des  Postes  qui  les  recevra  et  qui  appUquera  lui- 
même  les  timbres  destinés  à  en  opérer  l'affran- 
chissement. 

«  La  vente  des  timbres  aura  Heu  dans  tous  les 
bureaux  de  poste  de  France,  de  la  Corse  et  de 
l'Algérie,  par  le  moyen  des  agents  des  Postes  de 
tous  grades,  et  seulement  par  les  agents  des  Postes. 
Les  facteurs  chargés  de  la  distribution  des  lettres 
devront  êtres  porteurs  d'un  certain  nombre  de 
timbres  d'affranchissement  des  trois  couleurs,  afin 
que  les  citoyens,  tant  dans  les  villes  que  dans  les 
communes  rurales,  puissent  partout  et  à  tout 
moment  s'en  procurer  facilement  et  sans  frais 
supplémentaires  d'aucune  sorte. 

«  Les  timbres  d'affranchissement  sont  vendus 
au  pubUc,  soit  dans  les  bureaux  de  poste,  soit  par 
les  facteurs  en  tournée,  au  prix  nominal  des  taxes 
qu'ils  représentent ,  c'est-à-dire  20  centimes  , 
40  centimes  et  i  franc.  L'État  prend  à  sa  charge 


l8  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS 

tous  les  frais  de  fabrication,  de  transport  et  de 
distribution.  »  (Octobre  1848,  Imprimerie  natio- 
nale.) 

Faisons  remarquer  tout  d'abord  que,  dans  ces 
documents,  il  est  question  de  timbres  ou  cachets  ; 
le  mot  timbre-poste  n'existe  pas  encore.  Ce  n'est 
qu'un  peu  plus  tard  que  cette  appellation  devait 
être  adoptée.  Et  pendant  que  nous  sommes  sur 
ce  terrain,  ajoutons  que  l'on  écrivait  plus  géné- 
ralement des  timbres-postes ,  jusqu'au  mois  de 
novembre  1879,  époque  à  laquelle  une  instruction 
officielle  a  prescrit  aux  agents  d'écrire  des  «  tim- 
bres-poste ». 

Dans  le  texte  que  nous  venons  de  reproduire, 
on  serait  porté  à  trouver  charmant  de  naïveté  le 
passage  :  «  Le  public  pourra  déposer  sa  lettre  à  la 
boîte  en  toute  confiance  et  sans  autre  formalité.  » 
Ces  mots  n'étaient  pourtant  point  superflus,  si 
l'on  considère  la  méfiance  qui  accueille  trop  sou- 
vent les  innovations  et  entrave  le  progrès.  Croi- 
rait-on que,  maintenant  encore,  beaucoup  de 
campagnards  ignorent  le  mode  d'emploi  du 
timbre-poste?  Il  ne  se  passe  pas  de  jour,  en  efi'et, 


HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS  1  9 

que  l'on  ne  trouve,  dans  les  boîtes  aux  lettres,  des 
pièces  de  monnaie  déposées  en  même  temps  que 
la  missive  à  expédier...  et  souvent  le  but  est 
rempli  quand  même  :  ces  faits  se  produisant 
dans  des  villages  où  Ton  écrit  peu,  la  lettre  est 
parfois  seule  dans  la  boîte,  ou  bien  celles  qui 
l'accompagnent  portent  toutes  leur  timbre-poste; 
pas  de  doute  possible,  dès  lors,  et  le  facteur, 
pour  qui  le  cas  n'est  pas  nouveau,  opère  l'affran- 
chissement. Hâtons-nous  d'ajouter  que,  l'instruc- 
tion se  propageant,  les  cas  d'ignorance  de  cette 
nature  sont  de  moins  en  moins  nombreux. 

Cette  ignorance  s'est  manifestée  un  jour,  dans 
des  circonstances  assez  curieuses  :  Dans  une  ville 
du  Nord,  une  brave  femme,  dont  l'accent  et  le 
tutoiement  dénotent  le  quartier  (elle  est,  à  n'en 
pas  douter,  du  faubourg  flamand),  présente  une 
lettre  et  les  quatre  sous  que  coûtait  alors  le  port, 
en  expliquant,  non  sans  peine,  qu'elle  veut  affran- 
chir la  lettre  destinée  à  son  fils,  soldat.  Comme, 
à  la  remise  du  timbre-poste,  elle  reste  bouche 
bée,  l'employé,  pensant  qu'elle  n'est  préoccupée 
que  de  savoir  ce  qu'il  lui  reste  à  faire  de  sa  mis- 
sive, lui  recommande  de  la  jeter  à  la  boîte  à  l'ex- 


20  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTÉ   FRANÇAIS 

térieur  du  bureau.  Quelques  jours  se  passent; 
notre  cliente  revient,  pourpre  de  colère  :  «  Vo- 
leur! tu  as  gardé  l'argent;  mon  fils  a  payé  six 
sous,  sais-tu?  »  Et  comme  l'agent  de  l'Adminis- 
tration se  défend  de  son  mieux  ne  soupçonnant 
pas  encore  ce  qui  a  pu  se  passer,  elle  s'écrie, 
croyant  l'accabler  d'une  preuve  irréfutable  :  «  Ah! 
tu  dis  ne  pas  avoir  gardé  l'argent;  tiens,  regarde, 
voilà  mon  reçu  ».  On  le  devine,  le  reçu,  c'était 
le  timbre-poste  dont  la  pauvre  femme  ne  con- 
naissait pas  l'emploi,  mais  qu'elle  avait  eu  soin 
de  prudemment  conserver.  La  plaignante  était 
une  habitante  du  faubourg  de  Lysel  à  Saint- 
Omer;  quant  à  l'employé  accusé  d'indélicatesse, 
c'était...  l'auteur  de  cet  ouvrage. 


CHAPITRE  II 

DÉVELOPPEMENT  ET  TRANSFORMATION  DU  TIMBRE-POSTE. 

LOIS,    RÈGLEMENTS    ET    CIRCONSTANCES 

QUI    LES    ONT   MOTIVÉS. 

Nous  venons  de  présenter  l'historique  de  la 
création  du  timbre-poste.  Suivons  pas  à  pas  notre 
figurine  dans  ses  développements  et  ses  transfor- 
mations en  indiquant  leurs  causes,  leur  relation 
avec  les  lois  et  les  règlements,  notamment  sur  la 
taxe  des  correspondances. 

i"'  type  du  timbre-poste. 

Se  détachant  sur  fond  de  couleur,  tête  allégo- 
rique de  la  Liberté,  dans  un  cadre  circulaire 
formé  de  deux  lignes  rapprochées  et  d'un  rang  de 
perles,  coupant  à  droite  et  à  gauche  l'encadre- 
ment rectangulaire  du  timbre-poste.  Ce  dernier 
encadrement  porte  à  la  partie  supérieure  «  ^épub. 


2  2  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS 

franc.  »,  au  bas,  les  chiffres  de  la  valeur  nominale 
et  l'abréviation  C  ou  Fr.  répétés  de  chaque  côté 
du  mot  «  Tostes  »  ;  sur  les  deux  autres  côtés,  une 
grecque,  et,  aux  angles,  une  croix 
de    Saint-André.    Le   fond,    dans 
l'intervalle  des  deux  encadrements, 
est  formé  de  Hgnes  ondulées  verti- 
fi=w«ffl|    cales.  Les  dimensions  sont  o  m.  022 
"■    *  de  hauteur  sur  o  m.  018  de  lar- 

geur, comme,  d'ailleurs,  pour  tous  les  modèles 
subséquents ,  à  l'exception  du  timbre-poste  à 
5  francs,  émis  en  1869. 

1848 -1849.  —  Ainsi  qu'on  l'a  vu  au  chapitre 
précédent,  le  décret  du  24  août  1848  a  fixé  le 
port  des  lettres  de  bureau  à  bureau  à 

20  centimes,  jusqu'à  7  grammes  1/2, 

40  centimes,  de  7  gr.  1/2  à  i5  gr., 
I   franc,  de   i5  à  100  gr.  et  pour  chaque  100  gr.  ou  frac- 
tion de  100  gr.  excédant. 

Les  lettres  dont  la  circulation  est  limitée  au  res- 
sort d'un  bureau  (en  style  postal,  Lettres  locales, 
c'est  ainsi  que  nous  les  désignerons)  restent  :  à 
15  centimes  de  Paris  pour  Paris;  à  10  centimes 
pour  les  autres  bureaux.  On  continue  à  les  affran- 
chir en  numéraire,  au  guichet. 


HISTOIRE    DU   TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS  23 

Trois  catégories  de  timbres-poste,  correspon- 
dant à  la  gradation  des  taxes  de  bureau  à  bureau, 
sont  d'abord  créées  :  20  centimes,  40  centimes 
et  I  franc. 

Le  timbre-poste  à  20  centimes  (port  simple)  est 
le  plus  usuel;  on  commence  par  lui;  c'est  le  seul 
dont  les  bureaux  soient  pourvus  lors  de  la  mise 
en  vigueur  de  la  nouvelle  loi  :  r''''  janvier  1849.  Il 
est  imprimé  en  noir.  Au  cours  du  même  mois,  suit 
celui  d'un  franc,  rouge  clair.  Dès  1849,  la  cou- 
leur de  ce  dernier  est  modifiée.  Après  le  premier 
tirage  rouge  clair,  il  est  imprimé  en  rouge  foncé; 
puis,  une  circulaire  du  i"  décembre  1849,  annon- 
çant l'émission  prochaine  du  timbre  de  40  cen- 
times, prescrit  aux  préposés  de  renvoyer  à  l'Admi- 
nistration ceux  des  timbres  à  i  franc  de  couleur 
rouge  clair  (i'""  émission),  qui  seront  remplacés 
par  des  figurines  rouge  foncé,  afin  d'éviter  les  con- 
fusions possibles  entre  le  timbre-poste  rouge  clair 
d'un  franc  (il  nous  semble  plutôt  carmin  pâle; 
d'autres  disent  vermillon  :  des  goûts  et  des  cou- 
leurs  )  et  le  timbre  de  40  centimes  orange.  Les 

deux  nuances  différentes  du  timbre  à  un  franc  sont 
ainsi  reconnues  par  un  document  officiel. 


24  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS 

En  vue  de  favoriser  l'usage  du  timbre-poste,  les 
lettres  affranchies  au  moyen  de  ces  figurines  profi- 
tent d'un  délai  supplémentaire  pour  l'expédition. 
Dans  ce  but,  il  est  fait  dans  les  bureaux,  selon  les 
facilités,  une  demi-heure  ou  au  moins  un  quart 
d'heure  après  la  levée  officielle,  une  levée  supplé- 
mentaire exclusive  pour  les  lettres  affranchies  en 
timbres-poste,  les  autres  correspondances  étant 
remises  au  courrier  suivant  (décision  du  1 6  décem- 
bre 1848). 

1850.  — Le  timbre  de  40  centimes  orange  est 
émis  dans  les  premiers  jours  de  février. 

Dans  un  but  fiscal,  sur  l'initiative  du  Gouverne- 
ment, une  loi  du  15  mai  1850,  exécutoire  à  par- 
tir du  i'"'  juillet  suivant,  surélève  la  taxe  des  let- 
tres de  bureau  à  bureau  à  25  centimes  pour  les 
lettres  n'excédant  pas  7  gr.  1/2,  et  à  50  centimes 
pour  les  lettres  de  7  gr.  1/2  à  15  grammes.  Le 
tarif  de  1848  est  maintenu  en  faveur  des  sous- 
officiers  et  soldats  sous  les  drapeaux. 

En  conséquence  de  cette  modification,  un  tim- 
bre-poste bleu  de  25  centimes  est  créé,  à  partir  du 
i^""  juillet  1850,  par  substitution  au  timbre  de  20 
centimes  noir. 'Au  cours  du  même  mois  (23  juillet) 


HISTOIRE    DU   TIMBRE-POSTE   FRANÇAIS  2  5 

sont  émis  des  timbres  à  15  centimes,  vert,  repré- 
sentant  le  port  d'une  lettre  simple  de  Paris  pour 
Paris,  etc.,  et  peu  après  (12  septembre  1850)  à  10 
centimes  jaune  bistre,  pour  les  lettres  locales  des 
autres  bureaux. 

L'usage  du  timbre  noir  de  20  centimes  est  res- 
treint aux  lettres  des  sous-officiers  et  soldats;  ce 
timbre  peut  maintenant  être  suppléé  par  deux 
figurines  à  10  centimes.  L'Administration,  après 
avoir  d'abord  décidé  que  les  approvisionnements 
à  20  centimes  seraient  épuisés  mais  non  renouve- 
lés, retire  des  bureaux  le  stock  en  magasin  le  30 
octobre  1850. 

Une  circulaire  du  20  juin  1850  spécifie  les  cas 
généraux  d'emploi  de  chaque  timbre-poste. 

10  centimes,  correspondances  locales;  doublé,  représente 
la  taxe  pour  les  lettres  adressées  aux  militaires  sous  les 
drapeaux;  avec  un  timbre  de  40  centimes,  forme  le  double 
port  d'une  lettre  de  bureau  à  bureau. 

i5  centimes,  lettre  de  Paris  pour  Paris. 
25  centimes,  port  simple  de  bureau  à  bureau. 
40  centimes,  étranger. 
I  franc,  lettres  pesantes. 

2*"  type, 

1852.  —  A  l'exception  de  l'effigie,  qui  est  celle 
de  Louis-Napoléon  Bonaparte,  alors  Président  de 


Fig.  2. 


26  HISTOIRE    DÛ    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS 

la  République,  les  dispositions  sont  les  mêmes  que 
celles  du  i"  type. 

Deux  timbres,  le  bleu  à  25  centimes,  émis  au 
mois  d'août  1852,  et  le  jaune  bistre,  du  mois  sui- 
vant, sont  à  l'effigie  napoléo- 
nienne, surmontée,  dans  l'enca- 
drement, des  abréviations  Répuh. 
franc,  qui  les  distinguent  de  ceux 
de  l'empire.  Une  particularité  à 
noter  :  ces  deux  timbres,  et  rien 
que  ces  deux-ci  portent,  en  caractère  minuscule 
blanc  se  détachant  sur  le  fond  de  couleur,  entre  la 
tête  et  la  partie  inférieure  du  cadre,  la  lettre  B, 
initiale  du  nom  du  graveur  (Barre). 

1853.  —  Le  gouvernement  impérial  est  établi.  A 
partir  de  1853 ,  au  fur  et  à  mesure  de  l'approvision- 
nement de  chaque  catégorie,  les  timbres-poste  de 
l'Empire  remplacent  les  précédents  dans  l'ordre 
ci-après  :  les  timbres  à  10  centimes  (jaune  bistre) 
et  à  I  franc  (carmin)  sont  émis  à  partir  du  mois 
d'août,  les  timbres  à  40  centimes  (orange)  à  dater 
du  8  septembre,  et  ceux  à  25  centimes  (bleu)  le 
3  novembre  suivant.  C'est  le  : 


HISTOIRE    DU    TIMBRE- POSTE    FRANÇAIS 


27 


Fig.   3. 


f  type. 

Conforme  au  2^*  type,  avec  cette  unique  différence, 
qu'à  la  partie  supérieure  du  cadre,  l'inscription 
Empire  franc,  est  substituée  à  celle  de  Répub.  franc. 

La  loi  des  7-10  mai  1853  réduit  de  15  centimes 
à  10  centimes  la  taxe  de  la  lettre 
simple  affranchie,  de  Paris  pour 
Paris,  maintenant  le  taux  de  1 5  cen- 
times en  cas  de  non-affranchisse- 
ment :  c'est  la  première  prime  à 
l'affranchissement .  Par  suite  ,  le 
timbre-poste  à  15  centimes,  spécial  aux  corres- 
pondances de  cette  nature,  est  supprimé  à  partir 
de  la  date  d'exécution  de  cette  loi  :  i^'  juin  1853. 

1854.  —  La  prime  à  l'affranchissement  appli- 
quée, comme  nous  venons  de  le  voir,  aux  lettres  de 
Paris  pour  Paris,  est  étendue  aux  correspondances 
de  bureau  à  bureau  par  la  loi  des  20-25  mai  1854 
déterminant  de  la  façon  suivante  la  taxe  des  objets 
de  cette  dernière  catégorie  : 

Taxe  des  Lettres.  Airranchies.       Non  affranchies. 

Jusqu'à  7  grammes  1/2 »   20  »  3o 

De  7  gr.  1/2  à  1 5  gr »  40  »  60 

De  1 5  gr.  à  1 00  gr »  80  120 

Au  delà  de   100  gr »  80  i   20 

par  chaque  100  grammes  ou  fraction  de  100  gr.  excédant. 


28  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS 

Pour  représenter  les  nouveaux  échelons,  on 
rétablit,  à  partir  de  la  date  d'exécution  de  la  nou- 
velle loi  (i^''  juillet  1854),  1^  timbre-poste  à  20 
centimes  qui  avait  existé  en  noir  du  i'""  janvier 
1849  au  30  octobre  1850;  la  couleur  bleue  lui  est 
attribuée;  on  en  tira  de  deux  nuances  très  distinc- 
tes :  bleu  foncé  et  bleu  clair.  Il  s'ajoute  aux  tim- 
bres-poste à  10  centimes  et  à  40  centimes  exis- 
tants, et  l'on  crée  le  timbre  à  80  centimes  rouge 
carmin  (émission  du  i*"'"  décembre  1854).  Par  con- 
tre, on  supprime  les  figurines  à  25  centimes  et  à 
1  franc  qui  ne  correspondent  pas  avec  l'e  nouveau 
tarif. 

Au  mois  de  septembre,  est  créée  en  principe  la 
figurine  à  5  centimes  (vert  clair)  pour  les  impri- 
més, et  comme  appoints  pour  les  affranchisse- 
ments des  lettres  à  destination  de  l'étranger,  elle 
paraît  au  mois  de  novembre  1854. 

Six  ans  seulement  se  sont  écoulés  depuis  l'insti- 
tution du  timbre-poste,  et,  bien  qu'il  n'existe 
encore  que  peu  de  catégories,  les  créations,  sup- 
pressions et  substitutions  ont  été  assez  nombreuses 
pour  qu'il  soit  utile  de  résumer  la  situation.  A  la 
suite  des  changements  survenus,  il  existe,  au   i*"" 


HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS  29 

décembre  1854,  5  sortes  de  timbres  :  vert  clair  à 
5  centimes;  jaune  bistre  à  10  centimes;  bleu  à 
20  centimes;  orange  à  40  centimes;  rouge  carmin 
à  80  centimes. 

1855.  — Disons  en  passant  qu'une  instruction 
du  mois  de  septembre  1855  spécifie  que  le  poids 
des  timbres-poste  est  compris  dans  la  pesée  déter- 
minant la  taxe,  et,  d'autre  part,  que  la  prime  à 
TafFranchissement  ayant  eu  pour  conséquence  de 
généraliser,  autant  qu'on  pouvait  Tespérer,  l'em- 
ploi du  timbre-poste,  la  décision  du  16  octobre 
1848,  qui  favorisait  d'un  délai  supplémentaire 
d'expédition  les  correspondances  affranchies  en 
timbres  cessera  d'être  appliquée  à  partir  de  1856. 

Enfin,  indiquons  la  progression  déjà  acquise  à 
l'affranchissement,  la  marche  du  timbre-poste  : 
antérieurement  à  la  réforme  postale,  en  1847  ^^ 
1848,  le  port  avait  été  acquitté  au  départ  pour 
10  0/0  seulement  des  lettres.  En  1849,  l'usage  du 
timbre-poste  porte  à  15  0/0  cette  proportion  qui> 
de  20  0/0  en  185 1  et  de  22  0/0  en  1853,  P^^sse,  à 
la  faveur  de  la  prime  à  l'affranchissement,  à  49  0/0 
en  1854  et  à  85  0/0  en  1855,  soit  en  augmenta- 
tion de  63  0/0  en  deux  ans. 


30  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS 

Le  timbre-poste  a  victorieusement  conquis  la 
lettre,  supprimant  la  taxe  à  la  distance.  Il  va  s'at- 
taquer aux  imprimés  et  triompher  d'une  bien 
autre  anomalie  :  la  taxe,  d'après  la  dimension  de  la 
feuille  d'impression.  Comme  c'était  expéditif  et 
commode  dans  l'application  ! 

1856.  —  La  loi  du  25  juin  1856,  qui  détermine 
la  taxe  des  journaux,  imprimés...,  etc.,  selon  le 
poids  de  l'exemplaire,  marque  un  nouveau  et  im- 
portant progrès  de  l'Administration  des  Postes;  le 
port  de  la  circulaire  et  de  Téchantillon  de  5  gram- 
mes et  au-dessous  tombe  à  un  centime. 

1859.  —  A  la  faveur  de  ces  tarifs  libéraux,  le 
service  des  imprimés  a  pris  une  extension  considé- 
rable. L'affranchissement  des  journaux,  imprimés 
et  échantillons  en  numéraire  (le  timbre-poste  ne 
s'applique  encore  qu'aux  lettres,  pour  ainsi  dire) 
offre  de  grandes  difficultés  et,  en  vue  d'y  remé- 
dier, une  décision  du  17  novembre  1859  dont, 
malgré  l'utilité,  l'exécution  devait  se  faire  attendre, 
porte  création  de  timbres-poste  à  1,2  et  4  cen- 
times. 

1860.  —  Au  mois  de  mars  1860,  la  substitution 
du  rouge  rose  au  rouge  foncé  est  décidée  pour  le 


HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS  3l 

timbre  à  80  centimes  en  vue  de  différencier  davan- 
tage la  figurine  en  usage  de  celles  dont  la  création 
est  projetée;  la  mesure  reçoit  son  effet  à  partir  du 
mois  d'octobre  suivant. 

Le  i^""  novembre  delà  même  année,  c'est-à-dire 
près  d'une  année  après  sa  création  en  principe,  est 
émis  le  timbre-poste  à  un  centime  (vert  olive). 

1861.  —  La  loi  du  28  juin  1861,  substituant  les 
limites  de  10  et  de  20  grammes  à  celles  de  7  gr.  1/2 
et  de  15  grammes  pour  le  port  simple  et  le  port 
double,  ne  modifie  en  rien  le  régime  des  timbres- 
poste,  la  progression  des  taxes  restant  la  même. 

1862.  — Pointillage.  Le  timbre-poste  existe  en 
France  depuis  14  ans;  l'emploi  s'en  est  généralisé. 
Cependant  comme,  au  début,  les  préposés  sont 
astreints  à  séparer  les  figurines  à  l'aide  de  ciseaux, 
c'est  une  opération  fastidieuse,  en  même  temps 
qu'une  grande  perte  de  temps.  M.  Ridoux,  à  cette 
époque,  commis  de  l'Administration,  s'est  appliqué 
à  cette  question  avec  une  remarquable  ingénio- 
sité, qui  devait  lui  assurer,  par  la  suite,  le  succès 
dans  l'industrie  privée  :  il  nous  offre  d'abord  un 
cube  de  quelques  centimètres  renfermant  un  cy- 
lindre mû  ou  retenu,  selon  le  besoin,  par  une 


32  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS 

manivelle;  autour  du  cylindre,  on  enroule  une 
bande  de  timbres-poste  de  plusieurs  mètres  de 
longueur.  Une  fente,  dans  le  bas^  donne  passage  à 
la  bande  et  l'amène  sur  une  petite  lame  dentelée; 
un  léger  effort  de  la  main  suffit  pour  couper  la 
bande  au  point  voulu. 

Vient  ensuite  la  roulette,  dont  l'usage  se  propage 
dans  une  assez  grande  proportion  :  roulette  à  dents 
tranchantes,  fines  et  rapprochées  qui,  sous  la  pous- 
sée, tourne  sur  un  pivot  terminant  le  manche  en 
poignée;  il  suffit,  avec  un  peu  d'expérience,  de 
faire  rouler  l'appareil  dans  les  interstices  séparant 
dans  les  deux  sens  les  rangées  de  timbres-poste 
pour  pointiller  en  quelques  instants  une  feuille  de 
1 50  figures.  Ce  système,  que  nous  avons  employé, 
était  déjà  fort  utile  *. 

Enfin,  en  1862,  à  partir  du  mois  d'octobre,  l'Ad- 
ministration commence  à  faire  pointiller  les  tim- 
bres-poste, tels  que  nous  les  avons  aujourd'hui^ 
Sur  ce  point  encore,  nous  avons  été  précédés,  et 
de  10  ans,  par  les  Anglais.  Tout  pratiques  que 

i.  Un  industriel  parisien,  M.  Susse,  perforait  les  tim- 
bres en  feuilles,  que  lui  apportaient  les  particuliers;  ces 
timbres  sont  aujourd'hui  très  recherchés  par  les  collec- 
tionneurs. 


Fi-,  i. 


HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS  33 

soient  nos  voisins  d'outre-Manche,  ce  n'est  qu'après 
5  années  d'efforts  persévérants  qu'Archer,  qui 
avait  imaginé  la  machine  à  perforer  les  timbres- 
poste,  était  parvenu  à  faire  adopter  son  invention. 

Faisons  remarquer,  à  cette 
occasion  ,  comment  les  innova- 
tions utiles  sont  encouragées  de 
l'autre  côté  du  détroit  :  M.  Hill, 
le  grand  réformateur,  avait  reçu 
une  récompense  de  375  000 
francs  par  voie  de  souscription 
nationale;  le  gouvernement  anglais  lui  avait,  en 
outre,  accordé  une  pension  viagère  de  50  000  francs 
par  an.  Sait-on  ce  que  la  nation  attribua  à  Archer 
pour  sa  seule  machine  à  perforer?  4  000  livres  : 
100  000  francs. 

Dans  les  derniers  jours  de  décembre  1862,  vient 
le  timbre-poste  à  2  centimes,  brun  Van  Dyck,  sui- 
vant, à  deux  ans  d'intervalle,  la  figurine  à  i  cen- 
time et,  comme  elle,  destinée  aux  affranchisse- 
ments réduits.  L'émission  du  timbre  à  2  centimes 
inaugure  un  nouveau  type  de  timbres-poste;  c'est 
le  4°. 

1871.  —  Par  suite  de  l'insuffisance  de  l'approvi- 

8 


34  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS 

sionnement  on  s'est  vu  forcé,  à  Versailles,  de  faire 
un  tirage  de  timbres  de  ce  type,  à  5  centimes,  vert; 
l'aplat  était  bleu  d'azur. 

4""  type. 

L'effigie  impériale  est  laurée;  l'encadrement  rec- 
tangulaire du  timbre-poste  n'est  plus  formé  que 
d'une  mince  ligne  double.  En  tête, 
Empire  français  en  couleur,  sur  le 
fond  légèrement  teinté.  Au  bas,  de 
chaque  côté  du  mot  Postes ,  le 
chiffre  de  la  valeur  nominale  en 
caractères  de  5  millimètres  de  haut, 
et  la  lettre  C.  (abréviation  de  cen- 
times), d'une  dimension  intermédiaire  entre  celle 
de  la  valeur  et  celle  du  mot  Postes.  Par  opposition 
aux  timbres  antérieurs,  les  lignes  formant  le  fond 
ondulé  sont,  en  sens  horizontal,  plus  espacées. 

1863.  —  Le  type  n°  4  est  étendu  aux  timbres- 
poste  à  I  centime  (vert  olive)  et  à  4  centimes  (lilas 
pâle).  Ce  dernier  est  émis  au  mois  de  février  1863. 
1866.  —  En  vue  de  rendre  uniforme  l'effio^ie, 
laurée  sur  certains  timbres  de  création  récente  à 
l'exclusion  des  catégories  de  date  plus  ancienne,  il 


Fit 


HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS  35 

est  décidé  qu'au  fur  et  à  mesure  de  l'épuisement  des 
réserves,  la  tête  laurée  sera  généralisée.  La  trans- 
formation, qui  s'opère  au  cours  des  années  1866 
et  1867,  nous  donne  le  5*^  type,  s'appliquant  aux 
timbres  à  10,  20,  40  et  80  centimes. 

5'  type. 

Différent,  en  3  points,  des  types  n"*  2  et  3  ;  l'ef- 
figie est  laurée;  les  caractères  des  inscriptions  au 
haut  et  au  bas  sont  un  peu  plus 

rts,  et  la  première  de  ces  inscrip-    ^[^^^^^^| 
tions  est  en  toutes  lettres  Empire 
français. 

1866-1867.  —  Le  cinquième 
type  s'applique  également  au  tim- 
bre marron  de  30  centimes  émis 
le  i*^*"  avril  1867.  La  décision  du 
12  avril  1866,  qui  a  autorisé  l'institution  de  ce 
timbre,  en  crée,  en  principe,  un  autre,  celui  de 
5    francs,   couleur   violet  pâle. 

1869.  —  Ce  dernier  timbre  (5  francs)  paraît  seu- 
lement le  i"""  novembre  1869;  employé  d'abord 
pour  les  objets  pesants,  plus  particulièrement  à 
destination  de  l'étranger,  en  vue  d'éviter  l'apposi- 


36  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS 

tien  d'un  nombre  parfois  considérable  de  figurines, 
il  est  beaucoup  plus  utilisé  à  partir  du  moment 
(février  1873)  où  le  maximum  fixé  pour  la  décla- 
ration des  valeurs  insérées  dans  les  chargements 
et  sur  lesquelles  le  droit  proportionnel  est  acquitté 
au  moyen  de  l'emploi  de  timbres-poste,  est  élevé 
de  2  000  francs  à  10  000  francs.  C'est  un  sixième 
type. 

6^  type,  exclusif  au  timbre-poste  de  j  francs. 

Oblong,  de  o  m.  04  de  large^  sur  o  m.  022  de 
haut.  Même  effigie  laurée  que  dans  les  types  4  et  5, 

dans  un  encadrement 
^  circulaire  où  le  rang 
de  perles  est  aug- 
menté d'une  série  de 
dispositions  décora- 
-"i  tives.  Cet  encadre- 
ment coupe,  en  haut 
et  au  bas,  le  cadre 
rectangulaire,  du  fond  duquel  se  détachent  les 
mots  Empire  français  dans  la  partie  supérieure  et 
Timbre-poste  dans  la  partie  du  bas.  La  valeur  est 
indiquée  par  le  chiffre  5  à  gauche,  et  la  lettre  F, 


Fis 


HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS  3 7 

à  droite,  dans  l'intervalle  des  deux  encadrements. 
Nous  avons,  après  cette  émission,  lo  sortes  de 
timbres-poste  : 

1  centime,  vert  olive.  ) 

2  centimes,  brun  Van  Dyck.  |  type  n"  4. 

4  centimes,  lilas  pâle.  ) 

5  centimes,  vert  clair,  du  type  n"  3  (n'a  pas  été  fait 
lauré). 

10  centimes,  jaune  bistre,    j 

20  centimes,  bleu.  / 

3o  centimes,  marron.  ^  type  n"  5. 

40  centimes,  orange.  \ 

80  centimes,  rouge  rose.        ) 

Et  5  francs  violet  pâle,  oblong,  type  n"  6. 

1870.  —  La  guerre!  l'invasion  !  Un  cercle  de  feu 
sépare  la  capitale  du  reste  de  la  France.  Entre  la 
proclamation  de  la  République  et  l'investissement, 
on  a  tiré  avec  les  anciennes  planches  des  timbres  à 
10,  20  et  40  centimes,  tête  de  la  Liberté.  Le  maté- 
riel de  la  fabrication  des  timbres-poste  est  main- 
tenant enfermé  dans  Paris  et  la  province  va  avoir 
épuisé  ses  approvisionnements.  Nous  exposerons 
plus  loin  dans  quelles  conditions  la  délégation 
du  Gouvernement  y  fit  pourvoir  par  la  Monnaie 
de  Bordeaux,  en  vertu  d'une  décision  ministérielle 
du  19  octobre  1870.  Bornons-nous  à  dire  ici  qu'il 
fut  livré  dans  ces  conditions  provisoires  pour  une 
valeur  nominale  de  120  000000  de  francs  de  tim- 


38  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS 

bres-poste ,  reconnaissables  au  dessin  infiniment 
moins  net,  le  procédé  lithographique  ayant  dû  être 
substitué  à  la  typographie.  La  fabrication  de  Bor- 
deaux s'applique  à  toutes  les  catégories  existantes, 
à  l'exception  du  timbre  de  5  francs.  C'est  le  type 
primitif  (n"  i ,  tête  allégorique  de  la  Liberté)  pour 
les  timbres  à  partir  de  5  centimes.  Les  figurines  à 
I,  2  et  4  centimes  nous  donnent  un  nouveau 
modèle,  le 

f  type 

combiné  des  types  n"'  i  et  4  :  du  n°  i  pour  la  tête 
de  la  Liberté  et  l'inscription  du  haut  «  République 
franc.  »  ;  du  n°  4  pour  toutes 
les  autres  dispositions. 

Les  timbres  de  Bordeaux  sont 
émis  à  partir  du  15  novembre 
1870.  Des  différences  sensibles 
se  produisent,  d'un  tirage  à 
l'autre,  dans  les  nuances,  no- 
tamment pour  les  figurines  à  10,  20  et  40  cen- 
times. 

1 871-1872.  —  La  guerre  est  terminée,  laissant 
derrière  elle,  après  tant  de  sang  versé,  tout  un  cor- 


Fisr.  8. 


HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS  3g 

tège  de  calamités.  Grâce  à  la  merveilleuse  vitalité 
de  la  nation  française,  tous  ces  désastres,  tous, 
seront  un  jour  réparés.  Mais  il  faut,  quant  à  pré- 
sent, surélever  les  impôts  existants  et  en  créer  de 
nouveaux  pour  payer  à  l'ennemi  une  somme  con- 
sidérable, relever  nos  places  fortes  et  créer  un 
nouveau  matériel  de  guerre.  Une  loi  du  24  août 
1871  augmente  les  tarifs  postaux;  en  voici  les 
principales  dispositions  : 

Lettres  de  bureau  à  bureau. 

Affranchies.  Non  affranchies. 

Jusqu'à  10  grammes »  25  »  40 

De  I  o  à  20  gr »  40  »  60 

De  20  à  5o  gr »  70  i 

De  5o  à   100  gr i  20  r  yS, 

et  ainsi  de  suite,  en  ajoutant,  par  chaque  5o  gr.  et  pour  la 
fraction  de  5o  gr.  excédant,  5o  centimes  en  cas  d'affranchis- 
sement, et  75  centimes  pour  les  lettres  non  affranchies. 

Lettres  locales  {en  dehors  de  Paris). 

Affranchies.  Non  affranchies. 

Jusqu'à  10  grammes »   i5  »  25 

De  10  à  20  gr »  25  »  40 

De  20  à  5o  gr »  40  »  60 

De  5o  à  100  gr »  65  i 

et  ainsi  de  suite,  en  ajoutant,  par  chaque  5o  gr.  ou  fraction 
de  5o  gr.  excédant,  25  centimes  pour  les  lettres  affran- 
chies, et  40  centimes  pour  les  lettres  non  affranchies. 


40  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS 

Lettres  de  Paris  pour  Paris. 

Affranchies.  Non  affranchies. 

Jusqu'à  i5   grammes »  i5  »  25 

De  i5  gr.  à  3o  gr »>  3o  »  5o 

De  3o  à   60  gr »  45  »  yS 

et  ainsi  de  suite,  en   ajoutant,  par  3o  gr.  ou   fraction  de 
3o  gr.  excédant,  i5  centimes  en  cas  d'affranchissement  et 
"25  centimes  en  cas  de  non-affranchissement. 

La  même  loi  élève  de  i  à  2  centimes  la  taxe 
minimum  des  imprimés,  mesure  qui  gêne  et 
diminue  très  sensiblement  la  propagande  commer- 
ciale par  prospectus. 

Les  remaniements  eurent  pour  conséquence  le 
rétablissement,  à  partir  du  i*""  septembre  1871,  des 
timbres-poste  à  15  et  à  25  centimes,  qui  avaient 
été  supprimés,  le  premier,  le  1°''  juin  1853,  le 
second,  le  i'""  juillet  1854.  On  attribue  la  couleur 
jaune  bistre  au  timbre  à  15  centimes,  la  couleur 
bleue  à  celui  de  23  centimes.  La  suppression  de  la 
figurine  à  20  centimes  résulte  du  nouveau  tarif. 

La  fabrication  est  reprise  dans  les  ateliers  de 
Paris;  les  types  respectifs  sont  les  mêmes  qu'cà 
Bordeaux.  Grâce  aux  planches  de  1850,  les  tim- 
bres qui  avaient  existé  à  cette  époque  peuvent  être 
mis  en  circulation  sans  délai;  pour  les  timbres  à  i, 
2,  4  et  5   centimes,  il  est  nécessaire  d'établir  de 


HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS  4I 

nouvelles  planches  et,  à  cette  occasion,  le  type 
n""  7  est  étendu  aux  figurines  à  5  centimes  ;  ces 
quatre  catégories  paraissent  au  mois  de  mai  1872. 
Les  tim.bres  à  30  centimes  et  à  80  centimes  vien- 
nent au  mois  de  septembre  suivant ,  avec  des 
chiffres  indicatifs  de  la  valeur  un  peu  plus  grands 
que  dans  les  timbres  à  10,  15,  25  et  40  centimes. 
Dans  cette  fabrication,  comme  dans  celle  de  Bor- 
deaux, chaque  timbre  conserve  la  couleur  attribuée 
à  sa  même  valeur  dans  le  type  précédent.  Enfin, 
les  timbres  à  5  francs  ne  nécessitent  aucune  dispo- 
sition immédiate,  l'approvisionnement  existant 
suffisant  pour  les  besoins  prévus  de  vingt  années. 

1873.  ^5  janvier.  —  Substitution,  pour  le  timbre 
à  10  centimes,  de  la  couleur  bistre  foncé  sur 
papier  rose  à  la  couleur  jaune  bistre,  pour  éviter 
la  confusion  entre  ce  timbre  et  celui  de  15  cen- 
times. 

1874.  —  Comme  déjà  pour  les  figurines  à  30  et 
à  80  centimes,  le  chiffre  de  la  valeur  nominale 
est  agrandi  pour  les  timbres  de  10  et  de  15  cen- 
times. Des  entreprises  de  publicité  ayant  mis  en 
vente  des  cartes  postales-annonces  et  des  enve- 
loppes-annonces affranchies  au  moyen  de  timbres- 


42  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS 

poste  frappés,  à  l'emporte-pièce,  de  lettres  ou  de 
chiffres,  le  ministre  décide  (20  décembre  1874) 
que  les  timbres-poste  altérés  ou  lacérés  par  un 
procédé  quelconque  perdent  leur  valeur.  Cette 
prohibition  ne  tardera  pas  à  être  levée. 

1875.  —  Au  cours  de  la  discussion,  en  1875,  de 
la  loi  de  finances  de  1876,  le  vœu  est  émis  que  le 
chiffre  indiquant  la  valeur  sur  les  timbres-poste 
soit  plus  apparent.  L'imperfection  de  la  vignette, 
se  prêtant  à  la  fraude,  fait  également  désirer 
l'adoption  d'un  nouveau  modèle.  Une  décision  du 
ministre  des  Finances,  en  date  du  5  juillet  1875, 
a  donné  satisfaction  à  ce  vœu.  A  la  suite  d'un 
concours  est  adopté  le  type,  encore  en  usage,  pro- 
posé par  M.  Sage.  Le  sujet  de  ce  timbre  est  «  Le 
Commerce  et  la  Paix  s'unissant  et  régnant  sur  le 
Monde  ».  C'est  le 

8'  type. 

Deux  personnages  allégoriques  en  pied,  à  gauche, 
la  Paix,  portant  un  rameau  d'olivier,  à  droite,  le 
dieu  du  Commerce  avec  son  caducée,  se  tien- 
nent par  la  main;  ils  sont  séparés  par  un  globe 
terrestre  coupé  d'un  rectangle  encadrant  le  prix, 


HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS  ^3 

en  gros  caractères,  de  la  valeur  nominale;  le  tout 
repose  sur  un  encadrement  entourant  les  mots 
République  française.  En  tête,  entre  les  deux 
figures,  le  mot  Poste.  Le  timbre 
n'a  d'autre  cadre  que  3  lignes  très 
rapprochées;  le  fond  est  formé  de 
lignes  fines  et  serrées,  dans  le 
sens  horizontal. 

La  loi  du  3  août  1875,  qui  a 
approuvé  le  traité  de  Berne  et  l'entrée  de  la  France 
dans  l'Union  postale,  arrête,  pour  l'intérieur,  les 
tarifs  suivants  : 


Fig.  9. 


Jusqu'à  15  grammes.. 

De  15  gr.  à  30  gr 

De  30gr.  à  50  gr 

puis  pourchaque50gr. 
ou  fractioQ  de  50  gr. 
excédant 

Lettres  d 
à  bu 

affrancliies. 

e  bureau 
reau. 

un  II 
affrauchies. 

Lettres 
et  de  Paris 

affrancliies. 

locales 
pour  Paris. 

uon 
affraachies. 

»  25 
,.  50 
»  75 

..  50 

»  40 
»  80 
1  -20 

»  75 

»  15 
»  30 
»  45 

«  25 

»  25 
»  50 
»  75 

).  40 

La  décision  précitée,  du  5  juillet  1875,  sup- 
prime le  timbre-poste  à  80  centimes  et  crée  trois 
nouvelles  catégories  :  à  20  centimes,  à  75  cen- 
times et  à  I  franc.   (Ces  figurines  ne  paraîtront 


44  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS 

qu'un  an  plus  tard.)  Le  nombre  des  catégories  est 
ainsi  porté  à  treize,  savoir  : 

I,  2,  4,  5  et   lo  centimes,  vert  émeraude. 


r 

10 

— 

gris  d'acier. 

20 

— 

marron  sur  chamois. 

25 

— 

bleu  d'outre-mer. 

3o 

— 

bistre  sur  bistre  clair. 

40 

— 

garance  sur  paille. 

73 

— 

carmin  sur  rose  clair. 

I 

franc. 

bronze  sur  paille. 

5 

— 

lilas  foncé  sur  lilas  clair. 

L'émission  du  nouveau  type  n'aura  lieu  qu'au 
fur  et  à  mesure  de  l'épuisé  aient  des  réserves; 
mais,  avant  d'avoir  été  appliquées,  les  dispositions 
qui  précèdent,  relativement  aux  couleurs,  seront 
remaniées  par  une  décision  du  30  novembre  1876. 

Depuis  le  16  août  1885,  les  timbres-poste 
vendus  par  les  bureaux  français  en  Turquie,  à 
25  centimes,  à  75  centimes  et  à  i  franc,  présen- 
tent, au  moyen  d'une  surcharge,  l'indication  de 
leur  valeur  correspondant  à  la  monnaie  du  pays  : 
soit  respectivement  1,3,4  piastres. 

1876.  —  Sur  la  demande  de  plusieurs  Chambres 
de  commerce,  et  dans  le  but  de  combattre  les 
détournements  de  timbres-poste  par  les  employés 
de  maisons  privées,  le  ministre  des  Finances,  par 
une  décision   du  15  novembre  1876,  autorise   à 


HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS  /\.S 

marquer  les  figurines  de  signes  particuliers,  à 
remporte-pièce ,  ne  dépassant  pas  en  dimension 
un  tiers  du  timbre,  portant  sur  la  partie  supérieure 
et  n'altérant  pas  le  chiffre  de  la  valeur  nominale. 
Une  décision  du  30  novembre  1876  modifie  de 
la  manière  suivante,  la  couleur  respective  des 
timbres-poste  : 

1  centime,  encre  noire  sur  teinte  bleue. 

2  —        encre  Van  Dyck  sur  teinte  chamois  clair. 

4  —        encre  marron  sur  teinte  gris  bleu. 

5  —        encre  émeraude  sur  teinte  vert  d'eau. 
10        —        encre  noire  sur  teinte  violette. 

i5  —  encre  jaune  sur  teinte  jonquille  (cette  dis- 
position reste  sans  effet;  le  timbre  à 
i5  centimes  a  été  imprimé  en  bleu  sur 
bleu  pâle). 

20  —  encre  bleue  sur  teinte  turquoise  (disposi- 
tion non  exécutée;  ce  timbre  est  imprimé 
marron  sur  chamois). 

25        —        encre  noire  sur  laque  rouge. 

3o        —        encre  bistre  sur  teinte  bistre  clair. 

40        —        encre  garance  sur  teinte  paille. 

73        —        encre  carmin  sur  teinte  rose  clair. 
I      franc,     encre  bronze  sur  teinte  paille. 
5     francs,    encre  lilas  sur  teinte  lilas  clair. 

1877.  —  -^^s^  ^^  circulation,  le  i^''  juin,  aux 
termes  d'une  décision  ministérielle  du  26  avril 
précédent,  du  timbre-poste  à  5  francs,  lilas,  du 
type  commun  à  toutes  les  figurines.  Retrait,  à  la 
même  date,  du  timbre  à  5  francs  du  type  spécial 


46  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS 

n°  6,  dernier  vestige  de  l'effigie  de  Napoléon  III 
sur  le  timbre-poste. 

1878.  —  La  réforme  postale  de  1878  (ministère 
de  M.  A.  Cochery  ;  loi  du  6  avril,  exécutoire  à 
partir  du  i''''  mai  1878)  a  établi  les  taxes  actuelles, 
instituant  l'uniformité  de  progression  de  poids  et 
de  prix  pour  toutes  les  lettres  de  l'intérieur,  met- 
tant ainsi  fin  aux  différences  de  tarifs  maintenues, 
jusque-là,  entre  les  lettres  de  bureau  à  bureau  et 
les  lettres  locales  :  15  centimes,  en  cas  d'affran- 
chissement, et  30  centimes  en  cas  de  non-affran- 
chissement, par  15  grammes  ou  fraction  de 
1 5  grammes  excédant. 

Le  tarif  des  journaux  est  modifié  et  le  minimum 
des  imprimés  (5  grammes  et  au-dessous)  est 
ramené  à  un  centime. 

Il  ne  nous  reste  plus  à  enregistrer  que  quelques 
dispositions  d'ordre  survenues  depuis  : 

A  partir  du  i^^  septembre  1878,  émission  du 
timbre-poste  à  3  centimes  (jaune  foncé  sur  jaune 
clair),  nécessité  par  le  nouveau  tarif  des  journaux, 
et  du  timbre  à  3  5  centimes. 

1879.  —  Décision  du  28  février,  modifiant  la 
couleur  des  timbres  à  3,  à  20  et  à  25  centimes. 


HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS  47 

qui  seront  désormais  imprimés  :  celui  de  3  cen- 
times en  gris  foncé  sur  gris  perle  ;  celui  de  20  cen- 
times en  garance  sur  fond  vert  clair,  et  celui  de 
25  centimes  en  jaune  foncé  sur  jaune  clair. 

1886.  Avril.  —  Nouvelle  modification,  la  qua- 
trième du  type,  de  la  couleur  du  timbre  de  25  cen- 
times :  sera  dorénavant  tiré  en  gris  noir  sur  teinte 
rose. 

1887.  —  Le  timbre  de  35  centimes  est  sup- 
primé en  principe  au  mois  de  février,  puis  rétabli 
au  mois  d'avril  suivant,  à  titre  provisoire,  le  réap- 
provisionnement étant  restreint  aux  seuls  bureaux 
de  Paris. 

1889.  Décembre.  —  Aux  trois  timbres  sur- 
chargés des  bureaux  français  du  Levant  vient 
s'ajouter  le  timbre  de  5  francs  surchargé  «  20  pias- 
tres >K 

1890. —  Une  décision  du  7  mars  supprime  le 
timbre-poste  de  75  centimes  carmin  et  crée  le 
timbre-poste  à  50  centimes  même  couleur,  d'un 
emploi  beaucoup  plus  fréquent,  en  raison  de  ce 
qu'il  correspond  au  double  port  pour  l'étranger  et 
à  la  taxe  d'une  lettre  de  poids  simple  avec  valeur 
déclarée  de  100  francs. 


48  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS 

Les  bijoutiers  réclament  contre  cette  mesure 
et  le  timbre  à  75  centimes,  qui  représente  l'affran- 
chissement de  la  plupart  des  boîtes  chargées  est 
rétabli,  mais  il  prendra  la  couleur  violet  foncé  du 
timbre  à  35  centimes,  lequel  est  supprimé  (décision 
du  17  juillet  1890);  le  nouveau  timbre  à  75  cen- 
times est  mis  en  circulation  le  15  octobre  1890. 

Les  tarifs,  après  avoir  été  l'objet  de  nombreux 
remaniements,  n'ont  pas  varié  depuis  douze  ans. 
Est-ce  à  dire  que  le  progrès  a  achevé  son  oeuvre 
en  matière  de  taxes?  Non  pas! 

Après  avoir  constaté  que  la  taxe  d'une  lettre 
simple  affranchie  était  de  10  centimes  en  Angle- 
terre, en  Suisse,  au  Luxembourg,  en  Serbie 
et  aux  États-Unis  ;  qu'elle  variait  entre  des 
unités  monétaires  correspondant  à  notre  monnaie 
pour  10  centimes  2/5  et  14  centimes  en  Hollande, 
en  Danemark,  en  Allemagne,  en  Autriche-Hon- 
grie, en  Norwège  et  en  Portugal;  que  le  chiffre  de 
15  centimes  nous  était  commun  avec  la  Bulgarie 
et  la  Roumanie  ;  enfin ,  que  nous  étions  en 
avance  sur  la  Suède  (17  centimes),  l'ItaHe  (20  cen- 
times),  l'Espagne  (25  centimes),  et  la  Russie 
(28  centimes),  M.  Cochery,  ministre  des  Postes  et 


HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS  49 

des  Télégraphes,  déclarait  avec  une  légitime  fierté 
que,  par  son  personnel  formé,  son  matériel  et  son 
organisation,  l'Administration  se  trouvait  en  me- 
sure de  faire  face  au  développement  incessant  du 
service,  et  il  terminait  par  ces  mots  son  remar- 
quable rapport  du  4  mai  1884  au  Président  de  la 
République  :  «  Nous  pouvons  donc  attendre  avec 
confiance  le  moment  où  l'état  budgétaire  général 
permettra  de  franchir  une  nouvelle  étape  par  la 
réduction  de  la  taxe  des  lettres,  à  «  10  centimes.  » 

Oui,  nous  aurons,  nous  aussi,  après  le  règle- 
ment de  certaines  difficultés  financières,  le  penny- 
postage,  la  lettre  à  10  centimes,  comme  les 
Anglais,  les  Belges...,  etc.  Nous  aurons  la  carte 
postale  à  5  centimes,  comme  d'autres  pays,  et 
alors,  avec  nos  taxes  des  imprimés,  depuis  long- 
temps inférieures  à  celles  des  autres  nations, 
nous  aurons,  le  tarif  le  plus  favorable  du  monde 
entier. 

Nous  verrons  avec  orgueil  dans  ce  résultat  une 
nouvelle  manifestation  de  notre  supériorité  natio- 
nale. Dans  notre  France,  les  idées  libérales  font 
leur  chemin,  un  peu  lentement  parfois,  mais, 
enfin,  elles  le  font,  et  la  question  de  la  poste  à 

4 


50  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS 

bon  marché  est  de  celles  qui  intéressent  la  géné- 
ralité des  citoyens,  depuis  le  gros  financier  dont 
la  maison  expédie  journellement  des  centaines  de 
correspondances,  jusqu'à  l'humble  travailleur  des 
campagnes  qui  prélève  de  loin  en  loin  sur  son 
maigre  salaire  l'affranchissement  de  la  lettre  por- 
tant les  nouvelles  du  pays  au  fils  aimé  qui  paye 
sous  les  drapeaux  sa  dette  à  la  patrie. 


CHAPITRE  III 

DÉRIVÉS  DU  TIMBRE-POSTE  FRANÇAIS 


CHIFFRES-TAXES.  CARTES  POSTALES.   —  ENVELOPPES 

ET    BANDES    TIMBREES. 
CARTES-LETTRES.    TIMBRES-POSTE    COLONIAUX. 

Chiffres-taxes. 

Les  chiffres-taxes  ont  une  signification  absolu- 
ment opposée  à  celle  des  timbres-poste  :  les 
timbres-poste  représentent  le  port  acquitté  par 
l'envoyeur;  les  chiff"res-taxes  indiquent  le  port 
à  réclamer  au  destinataire. 

1858-1859.  —  Aux  term.es  d'une  décision  du 
ministre  des  Finances,  en  date  du  14  octobre  1858, 
exécutoire  à  partir  du  i*''"  janvier  1859,  les  taxes  à 
recouvrer  pour  les  lettres  locales,  jusque-là  figu- 
rées, comme  pour  les  lettres  de  bureau  à  bureau, 
par  des   chifi"res  tracés  à  la  main  ou  apposés  à 


52  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS 

l'aide  d'un  timbre  humide,  seront  représentées 
à  l'avenir  par  des  timbres  gommés,  dénommés 
chifFres-taxes,  appliqués  en  nombre  suffisant  sur 
les  lettres,  soit  par  les  préposés  des  bureaux,  soit 
(en  ce  qui  concerne  les  correspondances  recueil- 
lies et  distribuables  au  cours  d'une  même  tournée) 
par  les  facteurs. 

Il  est  créé  une  catégorie   unique   de   chiffres- 
taxes  :  à  10  centimes. 


i""'  type  du  chiffre-taxe* 

Vignette  carrée,  de  2  centimètres  de  côté.  Du 
cadre  noir  se  détachent  en  blanc  :  des  lignes,  pro- 
longées, dans  les  angles,  en 
dessin  d'ornement;  en  haut,  le 
mot  «  chiffre  »,  au  bas  le  mot 
«  taxe  »,  et,  des  deux  côtés  ver- 
ticaux, le  mot  «  postes  ».  A 
l'intérieur  du  cadre,  imprimé  en 
noir  sur  le  fond  blanc  «  10  centimes  à  percevoir  » 
en  quatre  lignes,  le  dernier  mot  formant  la  dernière 
ligne,  disposé  en  courbe  légère.  Non  pointillé. 
Ce  type  sera  appliqué  par  la  suite  aux  figurines 


Fig.  10. 


HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS  5  3 

de  diverses  valeurs  qui  seront  successivement 
créées  jusqu'au  mois  d'août  1880. 

1862.  —  La  loi  de  finances  du  2  juillet  1862, 
établissant  le  budget  de  1863,  élève  à  15  centimes, 
au  cas  de  non-affranchissement,  à  partir  du  i*'''  jan- 
vier de  cette  dernière  année,  la  taxe  des  lettres  lo- 
cales; elle  entraîne,  par  voie  de  substitution,  la 
création  des  chiffres-taxes  à  i  5  centimes  et  la  sup- 
pression de  la  figurine  primordiale  à  10  centimes. 

1871.  —  La  loi  du  24  août  1871,  exécutoire  à 
partir  du  i*''"  septembre  suivant,  dont  l'économie 
a  été  indiquée  au  chapitre  précédent,  a  fixé  la 
taxe  des  lettres  locales  non  affranchies  à  25  cen- 
times jusqu'à  10  grammes;  40  centimes,  de  10  à 
20  grammes;  60  centimes,  de  20  à  50  grammes; 
I  franc,  de  50  à  100  grammes;  puis,  au  delà,  à 
40  centimes  en  plus  par  50  grammes  ou  frac- 
tion de  50  grammes  excédant.  Pour  représenter 
les  taxes  simple,  double  et  triple,  il  est  créé  des 
chiffres-taxes  :  à  25  centimes,  noir;  à  40  centimes, 
bleu  pâle;  et  à  60  centimes,  orange. 

1875.  —  La  taxe  des  lettres  locales  non  affran- 
chies est  modifiée  de  la  façon  suivante  par  une 
loi  du  3  août  1875  •  ^5  centimes  jusqu'à  15  gram- 


54  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS 

mes;  50  centimes,  de  15  à  30  grammes;  75  cen-' 
times,  de  30  à  50  grammes;  au  delà,  augmema- 
tion  de  40  centimes  par  50  grammes  ou  fraction 
de  50  grammes  excédant.  Les  chiffres-taxes  à 
60  centimes,  n'étant  plus  susceptibles  d'entrer 
dans  la  composition  d'une  taxe  locale,  l'Adminis- 
tration les  retire  du  service  le  i"  février  1876. 

1878.  —  La  loi  du  3  avril  1878,  qui  a  fait  l'uni- 
fication des  taxes  en  supprimant  les  distinctions 
précédemment  existantes  entre  la  taxe  des  lettres 
locales  et  celle  des  lettres  circulant  d'un  bureau 
à  un  autre,  fixe  à  30  centimes,  par  15  grammes 
ou  fraction  de  15  grammes  excédant,  la  taxe  des 
lettres  non  affranchies;  cette  disposition,  exécu- 
toire à  partir  du  i*"""  mai  suivant,  a  pour  consé- 
quence le  retrait  des  chiffres-taxes  à  25  et  à 
40  centimes,  et  l'émission  de  figurines  à  30  cen- 
times (noir)  et  à  60  centimes  (bleu  pâle),  repré- 
sentant les  deux  premiers  degrés  de  la  taxe. 

1880.  —  Une  décision  du  6  août  1880  modifie 
le  modèle  du  chiffre-taxe  à  30  centimes.  Le  nou- 
veau type  adopté  à  cette  occasion  et  émis  au  com- 
mencement de  1881,  a  été  généralisé  depuis;  il 
est  encore  en  usage. 


HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS 


55 


Fi-,   li. 


2^  type  du  chiffre-taxe. 

Mêmes  dimensions  que  le  timbre-poste ,  et 
pointillé  comme  lui.  Ce  chiffre-taxe  est  composé 
d'un  dessin  d'ornement  entouré  d'un  cadre  fond 
noir  duquel  se  détachent  en  blanc  les  mots  sui- 
vants :  en  haut  «  chiffre  »,  au 
bas  «  taxe  »  ;  sur  les  deux  côtés 
verticaux  «  postes  »  ;  aux  angles 
gauche  supérieur  et  droit  infé- 
rieur les  lettres  «  R.  F.  »  Sur  le 
dessin  d'ornement  se  déroule  en 
travers  une  banderole  coupant  le  cadre  des  deux 
côtés  et  portant  en  gros  caractères,  imprimée, 
noire  sur  le  fond  blanc,  l'inscription  «  trente  cen- 
times à  percevoir  ». 

1882.  —  Jusqu'ici  l'emploi  du  chiffre-taxe  était 
limité  aux  lettres  locales.  A  partir  du  i"  octobre 
1882 ,  il  est  étendu  aux  correspondances  de 
bureau  à  bureau,  sur  lesquelles  il  sera  apposé  par 
le  bureau  destinataire.  Cette  mesure  simplifie  con- 
sidérablement la  comptabilité  de  la  taxe  des  lettres 
et  fait  supprimer  plusieurs  formules  de  relevés, 
notamment  cet  imprimé  haut  et  fort  étroit  que 


56  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS 

nos  prédécesseurs  avaient  facétieusement  dé- 
nommés les  «  bretelles  »  et  encore  les  «  états 
longs  ».  Le  2"^  type  (1880)  du  chiffre-taxe  à 
30  centimes  est  généralisé,  et  pour  faire  face  aux 
besoins  créés  par  le  nouveau  régime,  il  en  est 
créé  à  I,  2,  3,  4,  5,  10,  15,  20,  40,  60  centimes; 
I,  2  et  5  francs,  tous  imprimés  en  noir  sur  fond 
blanc. 

1881.  —  La  communauté  de  modèle  et  de 
couleur  rend  facile  la  confusion  entre  les  chiffres- 
taxes  à  1,2,  5  centimes  d'une  part;  i,  2,  5  francs, 
d'autre  part.  Pour  remédier  à  cet  inconvénient,  les 
chiffres-taxes  à  i,  2  et  5  francs  seront  imprimés 
en  brun  Van  Dyck;  on  épuisera,  toutefois,  les 
réserves  en  magasin. 

1887- 1888.  —  Les  chiffres-taxes  sont  bien 
nombreux;  l'expérience  a  démontré  que  la  con- 
sommation est  très  peu  importante  sur  plusieurs 
catégories;  aussi  supprime-t-on  successivement, 
en  principe  : 

Le  chiffre-taxe  de  20  centimes  au  mois  d'avril 
1887,  le  chiffre-taxe  de  40  centimes  au  mois  de 
juin  suivant,  et  celui  de  2  francs  au  mois  de  juin 
1888. 


HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS  5/ 

Les  bureaux  ne  seront  pas  réapprovisionnés  des 
figurines,  après  épuisement  des  réserves  en  caisse. 


Cartes  postales. 

La  première  idée  de  la  carte  postale  a  été  émise 
dans  la  conférence  internationale  de  Carlsruhe, 
en  1865,  sans  succès  immédiat.  Ce  mode  de  cor- 


Fig.  12,  13.  —  Filets  de  cartes  postales. 

respondance  fut  inauguré  en  Autriche,  au  tarif  de 
2  kreutzers  (5  centimes)  en  1869.  Les  dimensions 
de  cette  première  carte  postale  sont  celles  d'une 
feuille  in-8  pliée  en  quatre.  Il  en  fut  vendu 
400000  le  premier  mois;  c'était  le  prélude  du 
succès  général  réservé  à  la  carte  postale  dont  la 
consommation  annuelle  en  Europe  dépasse  actuel- 
lement un  milliard. 

Au  cours  de  la  discussion  du  budget  de  1871, 


58  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS 

M.  Wolowski,  député,  demanda  radoption,  dans 
notre  pays,  de  la  carte  postale,  déjà  usitée  alors 
dans  toute  l'Europe,  moins  la  France  et  la  Tur- 
quie. Hâtons-nous  d'ajouter  que  deux  années 
avaient  suffi  pour  la  propager  et  que  l'ajournement 
de  son  institution  chez  nous  n'a  été  motivé  que 
par  la  crainte  de  voir  la  carte  postale  se  substituer 
à  la  lettre  dans  une  très  grande  proportion,  à  un 
moment  où  le  Gouvernement  devait  recourir  à  la 
surélévation  des  impôts  pour  subvenir  aux  charges 
énormes  léguées  par  la  guerre.  M.  Wolowski  pro- 
posait les  taxes  de  lo  centimes  pour  les  cartes 
postales  circulant  dans  le  ressort  d'un  bureau  de 
poste,  et  de  15  centimes  pour  celles  qui  seraient 
acheminées  d'un  bureau  sur  un  autre.  Un  certain 
nombre  de  députés,  tout  en  s'associant  au  prin- 
cipe de  la  création,  proposèrent  de  restreindre 
l'usage  de  la  carte  postale  à  la  correspondance 
échangée  entre  les  soldats  et  leurs  familles;  ces 
vœux,  présentés  sous  forme  d'amendement,  furent 
écartés. 

1872.  —  M.  Wolovv^ski  reprit  l'année  suivante 
son  projet  qui  prévalut,  cette  fois,  sur  l'opposition 
du  ministre  des  Finances,   et  la  carte  postale  fut 


HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS  5 9 

créée  par  la  loi  du  20  décembre  1872,  dans  les  con- 
ditions de  taxe  primitivement  proposées  :  10  cen- 
times et  15  centimes,  selon  que  la  circulation 
était,  ou  non,  limitée  à  l'arrondissement  postal  du 
bureau  de  dépôt. 

1873.  —  Au  mois  de  janvier,  l'Administration 


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Fi-    il 


Fis.  15. 


met  en  vente  les  premières  cartes  postales,  éta- 
blies sur  carton  léger,  de  deux  modèles.  Tune 
pour  le  service  local,  l'autre  pour  la  correspon- 
dance de  bureau  à  bureau;  elles  ne  portent  pas 
de  signe  d'affranchissement,  et  doivent  recevoir, 
par  le  soin  des  agents,  avant  d'être  livrées  au 
public  et  à  l'endroit  indiqué  par  un  tracé  rectan- 
gulaire à  l'angle  droit  supérieur,  le  timbre-poste 
représentatif  du  port.  Le  recto,  préparé  pour  la 
suscription,  ne  doit  porter  aucune  autre  indication, 
le  verso  étant  exclusivement  réservé  à  la  corres- 
pondance. 


6o  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS 

Divers  modèles,  une  douzaine,  variant  pour  le 
texte  imprimé  et  l'encadrement,  furent  successi- 
vement pratiqués. 

1875.  —  Au  mois  d'octobre,  l'industrie  privée 
est  autorisée  à  fabriquer  des  cartes  postales  et  à 
les  vendre  directement,  à  la  condition  qu'elles 
aient  exactement  les  dimensions  des  cartes  de 
fabrication  officielle  :  12  centimètres  de  large  sur 
8  de  haut;  que  le  poids  soit  de  2  grammes  au 
moins,  de  5  grammes  au  plus,  et  que  le  recto 
reproduise  absolument  et  sans  additions  les  indi- 
cations des  cartes  vendues  par  l'État;  toutefois,  la 
vignette  d'encadrement  n'est  pas  imposée. 

1876.  —  En  vertu  du  décret  rendu  pour  l'exé- 
cution du  traité  de  FUnion  générale  des  Postes,  la 
carte  postale,  restreinte  jusque-là  aux  relations  inté- 
rieures, est  introduite,  à  partir  du  i^'  janvier,  aux 
rapports  avec  les  pays  de  l'Union;  taxe  :  20  cen- 
times pour  les  contrées  les  plus  éloignées  d'outre- 
mer; 15  centimes  pour  les  autres  pays. 

A  partir  du  mois  de  juillet,  les  cartes  postales 
peuvent  recevoir  sur  la  suscription ,  comme  les 
autres  objets  de  correspondance,  une  griffe,  une 
étiquette  ou  une  mention  manuscrite  indiquant  le 


HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS  Ôl 

nom,    l'adresse    et  la  profession  de    l'envoyeur. 

1878.  —  L'article  2  de  la  loi  du  6  avril  1878 
établit  l'unité  de  taxe  (10  centimes)  pour  les  cartes 
postales  circulant  en  France  et  en  Algérie,  à  partir 
du  i"^  mai  suivant. 

A  dater  du  mois  d'août,  les  cartes  postales  por- 
tant imprimée   la    figurine  d'affranchissement,  à 


^^"v^j'Tj^hj^n 


Fiff.  16. 


Fiff.  17. 


10  centimes  et  à  15  centimes,  sont  substituées 
aux  cartes  primitives  sur  lesquelles  on  devait  coller 
le  timbre-poste.  De  simple  imprimé,  la  carte  pos- 
tale est  ainsi  transformée  en  valeur  fiduciaire;  ses 
dimensions  sont  portées  de  12  à  14  centimètres 
pour  la  largeur  et  de  8  à  9  pour  la  hauteur. 

1879.  —  Les  décrets  des  4  février  et  27  mars 
réduisent  la  taxe  des  cartes  postales,  de  15  à  10 
centimes  pour  la  i'""  zone  de  l'Union  postale,  et 
de  20  à  15  centimes,  pour  la  2*"  zone. 

Un    arrêté  du  21   juin  établit  l'a  carte  postale 


62  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS 

avec  réponse  payée  :  à  20  centimes,  pour  la 
France,  l'Algérie  et  la  1'^  zone  de  l'Union  postale; 
à  30  centimes  pour  la  2""  zone  de  l'Union.  Ces 
dispositions,  exécutoires  à  partir  du  i''  juillet 
suivant,  sont  également  applicables  aux  cartes 
fabriquées  par  l'industrie  privée. 

1881.  —  Un  décret  du  7  septembre  ayant  sup- 
primé, à  partir  du  i'^'"  octobre,  les  surtaxes  mari- 
times établies  pour  certains  pays  lointains  d'outre- 
mer formant  jusque-là  la  2^  zone  de  l'Union  postale, 
2*"  zone  qui  se  confond,  à  dater  de  ce  moment, 
avec  la  i''^  les  cartes  postales,  simple  à  15  cen- 
times et  double  (réponse  payée)  à  30  centimes, 
restent  sans  emploi  et  sont  retirées  du  service. 

1882.  —  Aux  termes  d'instructions  du  mois  de 
décembre,  confirmées  par  l'article  15  de  l'arrêté 
ministériel  du  24  novembre  1883,  les  timbres-poste 
découpés  des  cartes  postales  ne  peuvent  être  utilisés 
pour  Taffranchissement  d'autres  objets;  mais  les 
cartes  détériorées  ou  hors  d'usage  peuvent  être 
échangées  dans  les  bureaux  de  poste,  contre  des 
timbres-poste,  à  valeur  égale. 

1887.  —  Un  arrêté  du  12  mai  permet,  sur  auto*- 
risation  spéciale  du  ministre,  la  mise  en  vente,  à 


HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS  63 

prix  réduit,  voire  la  livraison  gratuite  au  public, 
des  cartes  postales  achetées  à  l'Administration,  et 
revêtues  ensuite  d'annonces  imprimées.  Toute- 
fois, les  receveurs  des  Postes  ne  peuvent  participer 
à  ces  opérations. 

iggg,  —  L'arrêté   du   5    octobre  admet  à  cir- 
culer comme  carte  postale  toute  carte  portant  au 


Fis.  18. 


Fi-.   19. 


recto  le  timbre  d'affranchissement,  l'adresse  du  des- 
tinataire et  même  les  nom  et  adresse  de  l'expédi- 
teur; au  verso,  de  la  correspondance,  des  men- 
tions soit  manuscrites,  soit  imprimées  de  quelque 
nature  qu'elles  soient.  Les  dimensions  peuvent 
varier  de  9  à  14  centimètres  pour  la  largeur  et  de 
6  à  9  pour  la  hauteur;  le  poids,  de  i  gr.  1/2  à  5 
grammes.  Ces  dispositions  s'appUquent  aussi  aux 
cartes  avec  réponse  payée,  de  fabrication  non  offi- 
cielle. 


64  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS 

1889.  —  Un  arrêté  ministériel  du  30  avril 
autorise  l'inscription,  au  recto  des  cartes  de  fabri- 
cation officielle  ou  privée,  de  mentions  ou  indi- 
cations (annonces,  réclames)  concernant  l'expédi- 
teur, à  l'exclusion  de  toute  correspondance  ayant 
un  caractère  personnel. 

1890.  —  Un  arrêté  ministériel  du  8  décembre 
1890  rapporte  toutes  les  dispositions  autorisant 
l'échange,  contre  des  timbres-poste,  des  enveloppes 
timbrées,  des  cartes  postales,  des  cartes -lettres, 
des  cartes-télégrammes  et  des  bandes  timbrées. 


Enveloppes  et  bandes  timbrées. 

Dès  1823,  un  Suédois,  le  lieutenant  d'artillerie 
Treffenberg,  avait  proposé  à  la  Diète,  l'émission 
d'un  papier  timbré  destiné  à  servir  d'enveloppes 
aux  lettres,  qui  se  trouvaient  ainsi  affranchies  : 
c'était  exactement  l'idée  de  l'enveloppe  timbrée. 

Nous  avons  parlé,  au  début  de  cet  ouvrage,  de 
l'enveloppe  Mulready,  adoptée  en  Angleterre  en 
1840. 

Presque  tous  les  pays  instituèrent  successive- 
ment ce   système,  que   les  Chinois  pratiquèrent 


HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS  65 

longtemps  avant  nous.  Les  Fils  du  Ciel  avaient  trois 
sortes  différentes  d'enveloppes  portant,  dans  le 
style  imagé  des  peuples  orientaux,  l'indication  de 
leur  affectation  respective  : 

i"  Enveloppe  officielle  servant  à  la  correspon- 
dance des  ministres  avec  les  gouverneurs  de  pro- 
vince ;  rose,  avec  l'inscription  suivante  en  carac- 
tères rouge  vif  :  «  Q.ue  le  ciel  accorde  noblesse  et 
bénédiction  à  toutes  les  générations.  » 

2"  Enveloppe  pour  la  correspondance  limitée  à 
l'intérieur  du  pays;  blanche,  portant  en  caractères 
roses  :  «  Moyennant  3  sapèques,  cette  lettre  ira 
par  delà  toutes  les  provinces  de  la  Chine  et  s'arrê- 
tera au  bord  de  la  mer.  » 

3''  Enveloppe  pour  l'étranger;  verte,  en  carac- 
tères rouges  :  «  Moyennant  10  sapèques  cette 
lettre  ira  par  delà  toutes  les  mers  et  toutes  les 
grandes  montagnes.  » 

1882.  —  Par  une  loi  du  20  avril,  le  gouverne- 
ment français  a  été  autorisé  : 

1°  A  mettre  en  vente  des  enveloppes  et  des 
bandes  timbrées,  revêtues  du  signe  d'affranchisse- 
ment ; 

2°  A  faire  imprimer   le   timbre  d'affranchisse- 


66  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS 

ment  sur  les  enveloppes  et  bandes  présentées  à 
cet  effet  par  le  public. 

Un  décret  rendu  le  lo  août  suivant,  pour  l'exé- 
cution de  cette  loi,  détermine  le  prix  des  enve- 
loppes et  des  bandes  timbrées  :  i  centime  par 
enveloppe  et  i  centime  par  trois  bandes,  en 
dehors  de  la  valeur  représentée  par  l'affranchis- 
sement. 

Le  public  sera  admis  à  présenter  des  enveloppes 
et  des  bandes  au  timbrage,  moyennant  la  valeur 
représentative  de  l'affranchissement,  majorée  de 
2  francs  par  mille  d'enveloppes,  et  de  i  franc 
20  centimes  par  mille  de  bandes. 

Aux  termes  d'un  arrêté  du  8  septembre,  exé- 
cutoire à  partir  du  i*''"  octobre,  il  est  mis  en  vente 
des  enveloppes  de  trois  formats  différents,  unifor- 
mément timbrées  15  centimes,  et  deux  catégories 
de  bandes  d'un  même  format,  à  i  et  à  2  centimes. 

L'estampille  Groupe  allégorique  est  imprimée  en 
bleu  sur  papier  bleuté  pour  les  enveloppes  des 
trois  formats;  en  noir  à  i  centime,  et  en  brun  à 
2  centimes  pour  les  bandes,  lesquelles  sont  de 
papier  chamois  bulle. 

Les  enveloppes  présentées  au  timbrage  par  le 


HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS  Çi'J 

public  devront  avoir  au  minimum  7    centimètres 
sur  10;  au  maximum,  24  sur  35. 

Les  bandes  devront  être  présentées  en  feuilles 
de  10  au  moins;  leurs  dimensions  seront,  au 
minimum,  de  35  millimètres  de  hauteur  sur  15  cen- 
timètres de  longueur,  et,  au  maximum,  de  6  cen- 
timètres sur  40;  le  timbrage  ne  pourra  être  requis 
pour  moins  de  mille. 

Les  timbres-poste  découpés  des  enveloppes  et 
des  bandes  ne  peuvent  être  employés  pour  affran- 
chir d'autres  objets;  mais  on  peut  échanger,  à 
valeur  égale,  pour  des  timbres-poste,  dans  tous  les 
bureaux,  les  enveloppes  et  les  bandes  mises  hors 
d'usage  pour  une  cause  quelconque. 

En  vertu  d''un  décret  du  7  novembre  1882  et 
d'un  arrêté  ministériel  de  la  même  date,  sont 
émises,  le  i  5  novembre,  des  enveloppes  de  petit 
format,  estampille  verte  sur  papier  vert,  affranchies 
à  5  centimes  et  pour  lesquelles  la  valeur  maté- 
rielle de  l'enveloppe  est  fixée  à  un  demi-centime. 

1883.  —  Mise  en  vente,  à  partir  du  19  mars,  de 
bandes  tim.brées  à  3  centimes.  Mêmes  conditions 
et  même  papier  que  pour  les  bandes  à  i  et  à  2  cen- 
times ;  estampille  rouge  (arrêté  du  8  mars  1883). 


68  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS 

1887.  —  Émission,  en  juin,  d'enveloppes  blan- 
ches à  5  centimes  au  même  prix  que  les  enve- 
loppes vertes  d'égale  valeur;  estampille  verte. 

Aux  termes  d'un  arrêté  du  12  mai,  les  enve- 
loppes timbrées  achetées  dans  le  service,  puis 
revêtues  d'annonces,  peuvent,  de  même  que  les 
cartes  postales-annonces,  être  livrées  au  public  à 
prix  réduit,  gratuitement  même. 

1889.  —  Un  arrêté  ministériel  du  12  janvier 
autorise  la  mise  en  vente  d'enveloppes  grand  for- 
mat affranchies  à  5  centimes,  destinées  surtout  aux 
papiers  d'affaires.  Ces  enveloppes,  de  couleur  jau- 
nâtre pâle,  sont  mises  en  vente  à  partir  du  mois 
d'août  suivant. 

Cartes-lettres. 

1884.  —  En  exécution  de  la  loi  du  20  avril  1882, 
autorisant  le  gouvernement  à  faire  imprimer  le 
timbre  d'affranchissement  sur  les  enveloppes  et 
bandes  présentées  à  cet  effet,  un  décret  du 
I"  mars  1884  admet  le  pubHc  à  présenter  au  tim- 
brage à  15  centimes  des  cartes-lettres  non  pliées, 
au  prix  de  4  francs  le  mille  en  sus  de  la  valeur  de 
l'affranchissement.  Un  arrêté  ministériel  a  été  rendu 


HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS  69 

le  7  du  même  mois,  pour  l'exécution  de  ce  décret  : 
le  papier  doit  être  de  couleur  claire  et  de  qualité 
suffisante  pour  recevoir  une  bonne  empreinte; 
le  format  de  la  carte-lettre  ouverte  ne  doit  pas 
dépasser  30  centimètres  sur  40. 

1886.  —  A  partir  du  15  juin,  mise  en  vente,  au 
prix  de  15  centimes  pour  le  service  intérieur,  et 
de  25  centimes  pour  les  relations  internationales, 
de  cartes-lettres  fabriquées  par  l'État,  et  portant 
l'empreinte  «  groupe  allégorique  »  du  timbre- 
poste  représentatif  de  leur  valeur.  La  carte  portant 
l'estampille  bleue  de  1 5  centimes  est  d'abord  cha- 
mois; elle  est  grise  à  partir  du  mois  de  novembre 
i88é;  la  carte  pour  l'étranger  est  rose  avec  estam- 
pille noire. 

Comme  pour  les  cartes  postales  ainsi  que  les 
enveloppes  et  bandes  timbrées,  les  timbres-poste 
découpés  des  cartes-lettres  ne  peuvent  affranchir 
d'autres  objets  de  correspondance. 

A  partir  du  mois  de  septembre,  des  cartes-lettres 
non  gommées  sont  mises  en  vente  dans  les  bureaux 
importants,  afin  que  les  envoyeurs  puissent  les 
passer  au  registre  des  copies  de  lettres  avant  de 
les  fermer. 


70  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS 

1887.  —  Arrêté  ministériel  du  12  mai,  autori- 
sant, sur  demande  adressée  à  l'Administration,  la 
mise  en  vente,  à  prix  réduit,  voire  la  livraison  gra- 
tuite, en  dehors  du  concours  des  agents,  de  cartes- 
lettres  fabriquées  par  l'État  et  revêtues  ensuite 
d'annonces  imprimées. 

1890.  —  Mise  en  vente  au  mois  de  juillet  d'une 
nouvelle  carte  postale  d'une  teinte  chamois  clair 
uniforme  des  deux  côtés.  Le  timbre  est  imprimé 
en  couleur  brun  pâle. 

Timbres-poste  coloniaux. 

Ce  chapitre  serait  incomplet  si  nous  ne  disions 
un  mot  des  valeurs  fiduciaires  postales  de  nos 
Colonies. 

De  1860  à  1872,  le  timbre-poste  colonial  est 
carré,  représentant  un  aigle,  les  ailes  ouvertes;  il 
en  existe  à  i  centime  vert  olive;  5  centimes  vert 
clair;  10  centimes  jaune  bistre;  20  centimes  bleu; 
40  centimes  orange  et  80  centimes  rose.  Petit 
format;  non  pointillé. 

En  1872,  on  écoule  par  les  colonies  un  stock 
à  l'effigie  de  Napoléon  III,  laurée,  comprenant  des 


HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS  7  I 

timbres  non  pointillés  à  i  centime  olive;  à  5  cen- 
times vert;  à  30  centimes  (deux  nuances  :  brun  et 
brun  clair)  et  à  80  centimes  rose. 

Suivent,  les  uns  en  1872,  les  autres  en  1873,  les 
timbres  Tête  de  la  Liberté  à  l'exception  de  la  figu- 
rine à  5  francs;  à  partir  de  1877,  le  groupe  allé- 


Fiff.  20. 


Fis:.  21. 


gorique  la  Paix  et  Mercure  employé  depuis  Tannée 
précédente  dans  la  métropole  avec  les  couleurs 
primitives  et  ensuite^,  de  1878  à  1880^  avec  les 
couleurs  substituées  à  celles-ci  pour  les  timbres  à 
I,  2,  4,  10,  15,  20,  25  (successivement  bleu, 
noir  sur  rouge,  et  jaune)  et  35  centimes.  Aucun 
timbre  des  colonies  n'est  pointillé  jusque-là. 

Enfin,  au  mois  de  juin  1881,  un  nouveau  type 
spécial  est  adopté  :  Femme  assise  s'appuyant  de 
la  main  gauche  sur  une  ancre  et  tenant  un  fi'ag- 
ment  de  sceptre  dans  la  main  droite  ;  à  droite,  en 
haut  u  Colonies,  Postes  »,  dans   le  bas  «   Repu- 


72  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS 

blique  française  ».  Le  chiffre  indiquant  la  valeur 
est  tracé  dans  un  parallélogramme.  La  couleur  de 
chaque  timbre  est  la  même  que  celle  du  timbre- 
poste  correspondant  du  service  métropolitain;  il 
en  existe  à  i,  2^,  4,  5,  10,  15,  20,  25  (deux  cou- 
leurs successives  :  jaune  sur  jonquille  et  noir  sur 
rose),  30,  35,  40,  75  centimes,  et  à  i  franc.  Ces 
timbres  sont  pointillés. 

Les  chiffres-taxes  sont  du  type  actuel  de  la 
métropole,  mais  ne  sont  pas  pointillés  \  on  en  emploie 
dans  le  service  colonial,  à  partir  de  1884,  à  5,  10, 
15,  20,  30,  40,  60  centimes  noir;  i,  2  et  5  francs 
brun  Van  Dyck. 

Les  colonies  ont  aussi,  avec  le  même  type 
imprimé,  des  cartes  postales  :  simples,  10  cen- 
times, estampille  noire  sur  carte  violette  doublée 
blanc,  et  avec  réponse  payée,  20  centimes,  estam- 
pille noire  sur  papier  bleu  clair;  des  cartes-lettres  à 
15  centimes  pour  Tintérieur  de  la  colonie,  estam- 
pille bleue  sur  papier  carte  gris,  et  à  25  centimes 
pour  l'extérieur,  estampille  noire  sur  papier  carte 
rose;  et  des  bandes  timbrées  estampillées  :  noir, 
sur  papier  bulle  chamois,  à  i  centime;  brun,  même 
papier,   à    2    centimes;  rouge,    même  papier,  à 


HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS  78 

3  centimes;  brun,  sur  papier  bleuté,  à  4  centimes; 
vert  sur  papier  bulle  chamois,  à  5  centimes. 

Nous  parlerons  plus  loin,  dans  un  chapitre  con- 
cernant particuUèrement  les  collectionneurs,  des 
surcharges  officielles  au  moyen  desquelles,  au  cas 
d'épuisement  de  certaines  catégories,  il  y  est 
pourvu,  plus  particulièrement  dans  les  Colonies, 
au  moyen  d'une  modification  temporaire  d'autres 
figurines. 

Chacune  de  nos  principales  colonies  aura  pro- 
chainement un  timbre-poste  distinct. 


Timbres  spéciaux  aux  bureaux  français 
à  l'étranger. 

Les  timbres  en  usage  dans  les  bureaux  de  poste 
français  à  l'étranger  sont  les  mêmes  que  ceux  de 
la  métropole,  mais  ils  portent  une  surcharge  en 
encre  noire  ou  rouge,  indiquant  leur  valeur  : 

En  monnaie  turque  (25  cent.  =  i  piastre; 
50  cent.  =  2  piastres;  75  cent.  =•-  3  piastres; 
I  fianc  =4  piastres;  5  fi^ancs  =  20  piastres)  pour 
les  bureaux  du  Levant; 


74  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS 

Et  en  monnaie  espagnole  (centimos  et  peseta) 
pour  celui  de  Tanger.  La  peseta  vaut  un  franc. 

Ces  surcharges  existent  depuis  le  i6  août  1885 
pour  les  bureaux  du  Levant  et  depuis  le  i"'  jan- 
vier 1891  pour  Tanger. 


CHAPITRE  IV 


FABRICATION. 


Historique  et  prix  de  revient.  —  Procédés  de 
fabrication.  —  Garanties  pour  lÉtat. 

Lorsque,  en  1848,  l'usage  du  timbre-poste  fut 
adopté  en  France,  l'Administration,  à  court  de 
temps  pour  la  fabrication,  s'adressa  d'abord  à  l'in- 
génieur anglais  Perkins,  qui  demanda  un  délai  de 
six  mois  pour  livrer,  à  raison  d'un  franc  la  feuille 
de  240  exemplaires,  la  quantité  nécessaire  pour  la 
mise  en  œuvre  du  nouveau  système  :  c'était  trop 
de  temps  et  trop  d'argent! 

Deux  compositions  furent  alors  proposées,  et 
une  commission  spéciale,  à  la  tète  de  laquelle  était 
M.  Pelouze,  président  de  la  Commission  des  Mon- 
naies, adopta  notre  premier  type  Tête  de  la  Liberté.  La 
gravure  du  coin-type  fut  exécutée  en  cinq  semaines. 


'](i  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS 

Au  début,  et  jusqu'en  185 1,  les  timbres-poste 
sont  fiibriqués  à  la  Monnaie,  en  régie;  puis  M.  Hu- 
lot  entreprend,  sous  la  direction,  la  surveillance 
et  le  contrôle  de  la  Commission  des  Monnaies,  la 
fabrication  pour  son  compte  personnel,  à  raison 
de  I  fr.  50  centimes  le  mille.  Un  arrêté  du  2  avril 
185 1  nomme  ensuite  M.  Hulot  directeur  de  la 
fabrication  et  fixe  ainsi  les  prix  de  rétribution  : 
I  franc  par  mille  pour  les  200  premiers  millions; 
90  centimes  pour  les  200  millions  suivants,  et 
80  centimes  pour  les  quantités  excédantes. 

A  la  suite  d'offres  de  concurrence,  les  bases 
de  la  rétribution  de  M.  Hulot  sont  abaissées,  au 
mois  de  janvier  1869,  à  éo  centimes  par  mille 
pour  les  500  premiers  millions,  et  à  50  centimes 
par  mille  pour  le  surplus;  le  nouveau  traité  spé- 
cifie, en  outre,  l'abandon  à  l'État  de  la  propriété 
des  planches. 

En  1875,  à  l'occasion  de  l'adoption  du  type 
allégorique  actuel  h  Commerce  et  la  Paix  s'unis- 
sant  pour  régner  sur  le  Monde,  la  fabrication  est 
retirée  à  l'industrie  privée  et  transportée  de  la 
Monnaie  à  la  Banque  de  France,  pour  être  exécutée 
d'après  un  traité  basé  sur  le  système  de  la  régie; 


HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS  'J'J 

on  obtient  ainsi  la  diminution  progressive  du  prix 
de  revient,  à  58  centimes  en  1876  ;  à  39  centimes 
en  1877  ;  à  34  centimes  en  1878  ainsi  qu'en  1879. 

Le  traité  passé  avec  la  Banque  de  France  expire 
le  i^""  juillet  1880.  L'Administration  rachète  alors 
l'outillage  et  s'assure  la  prolongation  du  bail  du 
vaste  local  de  la  rue  d'Hauteville,  n°  36,  où  déjà 
étaient  installés  les  ateliers.  Depuis,  elle  pourvoit 
elle-même  à  la  fabrication  des  valeurs  fiduciaires 
relatives  au  service.  Sous  la  direction  de  l'un  de 
nos  jjklus  savants  ingénieurs  et  habiles  chimistes, 
secondé  par  un  chef  d'atelier  capable  et  très  expé- 
rimenté, le  prix  de  revient  baisse  encore  :  il  est  de 
32  centimes  par  mille  en  1880;  reste  à  peu  près 
stationnaire  à  27  centimes  pendant  plusieurs 
années,  diminuant  toutefois  de  nouveau  pour 
arriver  en  1888  à  o  fr.  2435,  c'est-à-dire  à  moins 
de  un  sixième  du  prix  du  début. 

Le  service  de  la  fabrication  et  de  l'agence  comp- 
table occupe  environ  250  personnes  :  graveurs, 
compositeurs,  mécaniciens,  chauffeurs,  galvano- 
plastes,  fondeurs,  broyeurs,  gommeurs,...  etc. 
Limité  d'abord  aux  timbres-poste,  il  s'est  étendu 
successivement  aux  chiffres-taxes,  aux  cartes  pos- 


78  HISTOIRE    DU    TIMBRK-POSTE    FRANÇAIS 

taies,  aux  bandes  et  enveloppes  timbrées,  aux 
cartes-lettres,  aux  cartes-télégrammes,  ouvertes  et 
fermées,  aux  enveloppes  du  service  pneumatique, 
aux  tickets  téléphoniques,  aux  mandats  et  aux 
bons  de  poste  ;  il  comprend  encore  les  timbres- 
épargne,  établis  d'abord  sous  forme  de  timbres 
mobiles  et,  depuis  le  i'^"  juillet  1889,  dans  le  corps 
même  des  souches  d'inscription  des  dépôts  de 
fonds  à  la  Caisse  nationale  d'épargne. 

Il  est  procédé  de  la  manière  suivante  à  la  fabri- 
cation des  timbres-poste  : 

Le  graveur  étabUt  le  prototype  en  reproduisant 
en  relief  sur  acier  le  dessin  de  la  figurine;  c'est 
la  partie  essentiellement  artistique  du  travail. 

Avec  ce  prototype,  on  frappe,  à  l'aide  d'un 
balancier,  des  blocs  de  plomb  rendant  en  creux 
les  reUefs  du  type  gravé  original;  puis,  au  moyen 
de  ces  plombs,  on  obtient,  par  la  galvanoplastie, 
des  chchés  reproduisant  fidèlement  en  cuivre  le 
prototype.  A  leur  tour,  ces  clichés  servent  à  frapper 
de  nouveaux  blocs  qui,  réunis,  forment  des  plan- 
ches de  chchés  de  50  types.  L'assemblage  de  six 
de  ces  chchés  produit  la  planche  de  300  figu- 
rines servant  à  l'impression  d'une  feuille,  et  les 


HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS  79 

planches  reconnues  irréprochables  sont  livrées  à 
l'imprimeur. 

L'encrage  s'opère  d'après  les  procédés  ordi- 
naires, et  l'impression  se  fait,  au  moyen  de  la 
presse,  sur  des  feuilles  de  papier  préalablement 
recouvertes  d'une  teinte  de  fond  qui  rend  impos- 
sible le  report  sur  pierre. 

Après  séchage,  les  feuilles  passent  à  l'atelier  du 
gommage^  opération  qui  nécessite  annuellement  la 
quantité  énorme  de  40  000  kilogrammes  de 
gomme  du  Sénégal.  Il  y  est  procédé  au  moyen  de 
machines  sur  chacune  desquelles  passent  environ 
700  feuilles  à  l'heure.  Les  feuilles  sont  ensuite 
séchées  de  nouveau  et  redressées  sous  la  presse. 
Finalement,  placées  dans  des  châssis,  avec  les  minu- 
tieuses précautions  nécessaires  pour  que  les  ran- 
gées d'aiguilles  emporte-pièces  portent  exactement 
dans  l'étroit  intervalle  séparant  les  figurines  impri- 
mées, elles  sont  pointillées  par  des  machines  per- 
foreuses qui  traitent  près  de  300  feuilles  chacune 
à  l'heure. 

La  fabrication  des  cartes  postales  ne  compor- 
tant ni  teinte  de  fond,  ni  gommage,  par  conséquent 
pas  de  séchages  répétés,  est  beaucoup  plus  simple 


80  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS 

que  celle  des  timbres-poste.  Le  prix  de  revient 
des  cartes  postales,  qui  était  encore  de  5  fr.  90  cen- 
times le  mille  en  1879,  de  5  fr.  74  centimes  en 
1880  et  de  4  fr.  96  en  1883,  ^  baissé,  comme  celui 
des  timbres-poste;  il  a  été  de  3  fr.  98  centimes  en 
1888.  La  principale  dépense  consiste  ici  dans  la 
matière  première,  le  papier-carte. 

Pour  les  cartes-lettres,  le  travail  est  fort  long, 
le  pliage,  le  gommage  et  le  perforage  devant  être 
faits  pour  chaque  objet,  un  à  un;  aussi  reviennent- 
elles  à  environ  7  francs  le  mille. 

Quant  aux  enveloppes  timbrées,  après  Timpres- 
sion  par  feuilles,  elles  sont  découpées  à  l'aide  d'un 
gabarit,  gommées  une  à  une,  puis  achevées  par  la 
plieuse-colleuse. 

La  fabrication  achevée,  les  valeurs  fiduciaires 
sont  prises  en  charge  par  l'agent  comptable,  dont 
la  responsabiUté  est  garantie  par  un  cautionne- 
ment de  20  000  francs. 

Les  dispositions  les  plus  minutieuses  prémunis- 
sent l'Administration  contre  toute  tentative  d'abus  : 
l'agent  comptable  se  charge  d'abord  en  compte 
des  feuilles  de  papier  blanc;  ces  feuilles  qui,  au 
cours  des  travaux,  passeront  dans  de  nombreuses 


HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS  8l 

mains,  sont,  avant  toute  opération,  frappées  d'un 
poinçon  de  contrôle  qui  garantit  contre  la  possi- 
bilité d'une  falsification  clandestine  au  moyen  de 
l'introduction  subreptice  de  feuilles  semblables. 

Le  chef  d'atelier  prend  livraison,  sur  reçu,  des 
feuilles  en  blanc  destinées  à  l'impression  ;  il  devra 
ultérieurement  les  remettre  à  l'agent  comptable, 
réussies  ou  manquées;  trimestriellement,  les  feuilles 
mal  venues  ou  mises  au  rebut  pour  une  cause 
quelconque  sont  contrôlées  par  une  commission 
de  surveillance  qui  en  décharge  l'agent  comp- 
table ;  elles  sont  ensuite  lacérées  et  mises  au 
pilon. 

Les  timbres-poste  fabriqués  constituant  des 
valeurs  en  caisse,  sont  envoyés  aux  receveurs  des 
Postes  par  l'intermédiaire  des  receveurs  principaux 
placés  au  chef-lieu  de  chaque  département.  Les 
récépissés  de  ces  receveurs  constituent  la  décharge 
de  Tagent  comptable. 

En  dehors  de  la  comptabilité  matière  des  valeurs 
fiduciaires,  l'agent  comptable  en  tient  une  seconde, 
celle  des  clichés,  qui  sont  renfermés  dans  un 
coffre-fort  à  deux  clés  dont  l'une  est  gardée  par 
ce  fonctionnaire,  et  l'autre  par  le  chef  d'ateUer. 

6 


82  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS 

Les  clichés  ne  sont  remis,  pour  les  besoins  du 
service,  à  ce  dernier  agent  que  sur  son  reçu. 
S'agit-il  d'un  poinçon  devant  servir  à  la  frappe  de 
nouveaux  clichés,  la  surveillance  de  l'agent  comp- 
table n'est  pas  un  seul  instant  interrompue  :  c'est 
sous  ses  yeux  que  s'opère  la  frappe  et  le  poinçon 
est,  séance  tenante,  réintégré  dans  le  coffre-fort 
par  les  deux  responsables. 

Les  clichés  hors  d'usage  sont  brisés  en  présence 
de  la  commission  de  surveillance. 

Pour  clore  ce  chapitre,  quelques  chiffres  mar- 
quant l'importance  progresssive  de  la  fabrication, 
partant  de  l'emploi  du  timbre-poste,  ne  seront 
pas  sans  intérêt  : 

La  première  année  (1849)  la  fabrication  est  de 
21  millions  de  figurines  et  ne  s'accroît  que  de 
10  millions  en  cinq  ans.  La  prime  à  Taffranchisse- 
ment  la  porte  tout  d'un  coup  à  31  milUons  en 
1853,  à  83  millions  en  1854.  Le  chiffre  du  début 
est  décuplé  en  1858  (200  millions)  et,  onze  années 
plus  tard,  l'année  précédant  la  guerre,  nous  sommes 
à  550  millions.  On  retombe  au-dessous  de  500  mil- 
lions en  1870  et  1871,  à  la  suite  de  nos  épreuves, 
en  raison  des  augmentations  de  tarif  qui  en  sont  la 


HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS  83 

conséquence,  notamment  pour  les  imprimés,  dont 
le  nombre  diminue  à  cause  de  l'élévation  d'un  à 
deux  centimes  du  minimum  d'affranchissement. 
Mais  la  reprise  des  affaires  et  le  retour  à  un  tarif 
libéral  entraînent  rapidement  de  nouvelles  augmen- 
tations. La  consommation  actuelle  excède  le  double 
de  celle  de  1869  ;  elle  est  60  fois  plus  importante 
que  celle  de  la  première  année.  L'agent  comptable 
a  livré  au  service  en  1889  : 

I  255  000  000  de  timbres-poste, 
42  000  000  de  cartes  postales, 
i5  000  000  d'enveloppes  timbrées, 
20  000  000  de  bandes  timbrées, 

non  compris  la  fabrication  de  la  Tunisie  et  de  la 
principauté  de  Monaco,  exécutée  également  aux 
ateliers  de  la  rue  d'Hauteville. 


CHAPITRE  V 

CONSOMMATION    ANNUELLE    DES    TIMBRES-POSTK, 

CHIFFRES-TAXES,     CARTES    POSTALES,     ENVELOPPES     ET 

BANDES    TIMBRÉES,    CARTES-LETTRES. 

Ce  relevé  de  la  consommation  de  la  dernière 
année  écoulée  (1889)  va  indiquer,  en  même  temps 
que  l'importance  colossale  acquise  par  le  service 
des  Postes  en  France,  la  proportion  des  diffé- 
rents systèmes  de  correspondance  mis,  depuis 
quelques  années,  à  la  disposition  du  public. 

Timbres-poste,  —  En  chiffres  ronds,  les  timbres- 
poste  livrés  au  service  en  1889  ont  dépassé, 
comme  valeur  136000000  de  francs,  et  comme 
nombre  i  250000000,  répartis  comme  suit  : 


A  I  centime  188000000  A  5  centimes  266  000  000 

2  —         49  000  000  10        —           3o  000  000 

3  —          18000000  i5        —         (3i3oooooo 
a        —          12000000  20        —             5  000  000 


HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS  85 

A  25  centimes  Sy  ooo  ooo  A  yS  centimes  2  000  000 

3o    —    6  000  000      I  franc  2  5oo  000 

35    —     800000      5  —  100  000 
40   —    6  000  000 

Chiffres-taxes.  —  Il  a  été  consommé  pendant  la 
même  année  environ  7  000  000  de  chiffres-taxes, 
représentant  une  valeur  de  1400000  francs.  Le 
chiffre-taxe  à  30  centimes  (taxe  d'une  lettre  sim- 
ple non  affranchie)  entre  pour  moitié  (3  350000) 
dans  ce  nombre. 

Viennent    ensuite,    dans    l'ordre    d'importance 

d'emploi,  la  figurine  à   10  centimes  (i  250  000) 

et  celle  à  15  centimes  (900000). 

Cartes  postales.  —  Simples.   .   .     42  000  000 
Avec  réponse  payée.   .   .  11  600 

E?tveloppes  timbrées.   —    Fabri- 
quées par  l'Etat 15  000000 

Présentées  par  le  public.  300000 

Bandes  timbrées.  —  Fabriquées 

par  l'État 20  000  000 

Présentées  par  le  public.  155  000 

Cartes-lettres.  — A  15  centimes.       7  000  000 
A  25  centimes 80  000 


CHAPITRE  VI 

CONTREFAÇON     ET    EMPLOI     FRAUDULEUX    DE    TIMBRES- 
POSTE.    —    LÉGISLATION    PENALE. 

Antérieurement  à  l'existence  du  timbre-poste, 
rélévation  des  tarifs  avait  suscité  de  nombreuses 
fraudes  :  transport  clandestin  par  les  messagers; 
lettres  dont  la  suscription,  par  un  libellé,  une 
sorte  d'écriture  ou  quelque  signe  de  convention, 
avait  un  sens  secret  compréhensible  pour  le  desti- 
nataire seul,  et  saisissable  sur  un  rapide  examen; 
centralisation  sur  une  même  feuille  des  correspon- 
dances de  plusieurs  personnes  pour  une  même 
localité...,  etc. 

Les  premières  instructions  adressées  par  l'Admi- 
nistration à  ses  agents,  relativement  aux  abus  en 
matière  de  timbres-poste,  suivent  de  près  la  mise 
en  service  de  notre  figurine;  elles  sont  du  25  jan- 
vier   1849  et  prévoient  deux  genres  de  fraude  : 


HISTOIRE    DU    TIMBRE -POSTE    FRANÇAIS  87 

1°  la  contrefaçon  ou  reproduction  de  timbres  par 
un  procédé  quelconque,  dessin,  gravure,  transport 
lithographique  ou  tout  autre  moyen;  2°  l'emploi 
de  timbres-poste  ayant  déjà  servi,  lavés  ou  net- 
toyés. 

Contrefaçon. 

La  contrefaçon  d'un  timbre-poste  et  la  mise  en 
circulation  de  timbres-poste  frauduleux  rentrent 
dans  la  catégorie  des  faits  qualifiés  Faux.  En  con- 
séquence, et  par  application  de  l'article  142  du 
code  pénal,  la  fabrication,  ou  l'emploi,  fait  sciem- 
ment, de  faux  timbres-poste  sont  passibles  d'un 
emprisonnement  de  2  ans  au  moins  et  de  5  ans 
au  plus.  Les  coupables  peuvent,  en  outre,  être  pri- 
vés de  l'exercice  de  leurs  droits  civils  pendant  5  à 
10  ans,  à  compter  de  l'expiration  de  leur  peine,  et 
être  assujettis  à  la  surveillance  de  la  haute  police 
pendant  le  même  laps  de  temps. 

Disons  bien  vite  que  les  cas  de  contrefaçon  ne 
se  sont  produits  que  de  loin  en  loin,  et  que  leurs 
auteurs  rencontrent  deux  obstacles  d'ordres  divers 
au  succès  de  leur  œuvre  criminelle  :  la  difficulté 
d'arriver  à    une    imitation  suffisamment  parfaite 


88  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS 

pour  que  la  fraude  ne  soit  pas  facilement  décou- 
verte; celle,  plus  grande  encore,  de  l'écoulement 
des  timbres  faux. 

Dès  le  4  mars  1849,  le  Moniteur  mentionne  des 
contrefaçons,  mais  tellement  grossières  qu'il  n'y  a 
pas  à  s'y  méprendre. 

Au  mois  de  juillet  1863,  l'Administration,  fon- 
dée à  craindre  des  tentatives  ayant  pour  but 
d'écouler  en  France  de  faux  timbres-poste  fabri- 
qués à  l'Étranger,  prend  des  mesures  pour  em- 
pêcher, le  cas  échéant,  l'introduction  de  ces  figu- 
rines. 

Sur  l'avis  que  de  faux  timbres  à  25  centimes  à 
l'effigie  de  la  RépubUque,  provenant  principale- 
ment d'Algérie,  sont  mis  en  circulation,  l'atten- 
tion du  personnel  est  appelée,  en  février  1876, 
sur  cette  fraude,  facile  à  découvrir  aux  indications 
suivantes  :  imperfection  de  l'impression;  chiffres 
défectueux,  lettres  malvenues  et  plus  petites;  cou- 
leur plus  claire;  gommage  imparfait,  et  pointillage 
différent  de  celui  du  timbre  authentique. 

Au  mois  de  septembre  suivant,  des  instructions, 
formellement  rappelées  à  la  fin  de  la  même  année, 
sont  concertées  avec  l'administration  des  contribu- 


HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS  8q 

tiens  indirectes  pour  prescrire  aux  débitants  de 
tabac  de  s'approvisionner  exclusivement  de  tim- 
bres-poste au  bureau  de  leur  résidence  :  double 
garantie^  et  pour  l'Administration,  qui  entrave 
ainsi  le  placement  de  timbres  faux,  et  pour  les 
préposés  à  la  vente,  précédemment  exposés  à 
acheter  de  ces  figurines,  à  l'appât  d'une  remise 
plus  élevée. 

L'année  suivante,  un  faussaire  s'en  est  pris  au 
timbre  de  25  centimes  nouveau  modèle  :  les  mots 
Postes  et  République  française,  de  même  que  le 
chiffre  2^  sont  plus  petits  ;  le  mot  Postes  est  dans 
un  cadre  dépourvu  des  lignes  qui,  dans  le  timbre 
authentique,  forment  le  fond  de  la  figurine  et  se 
continuent  entre  chacune  des  lettres.  Ces  difi"é- 
rences,  ainsi  que  d'autres  détails  inexacts,  sont 
signalés  à  l'attention  du  service  au  mois  de  mars 
1887. 

Ces  essais  criminels   ont  piteusement  échoué. 

Mentionnons  les  trois  derniers  jugements  ren- 
dus, à  notre  connaissance. 

Le  tribunal  correctionnel  de  Chalon  a  condamné 
le  24  décembre  1886  :  un  dessinateur  lithographe, 
fort  habile  ouvrier,  auteur  de  la  pierre  matrice  qui 


90  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS 

avait  servi  à  la  fabrication  de  faux  timbres-poste, 
à  4  ans  de  prison  et  2000  francs  d'amende;  un 
imprimeur  lithographe,  complice  dans  la  fabrica- 
tion et  dans  l'émission,  à  2  ans  de  prison  et  i  000 
francs  d'amende  ;  et  trois  autres  inculpés  qui  s'étaient 
occupés  de  l'écoulement  des  figurines  fabriquées, 
l'un  à  2  ans  de  prison  et  i  000  francs  d'amende 
et  les  deux  autres,  des  femmes,  à  six  mois  de  pri- 
son et  100  francs  d'amende. 

Au  mois  de  septembre  1889,  ^^'^  sieur  E...., 
agent  matrimonial,  demeurant  à  Paris,  rue  Saint- 
Sulpice,  était  arrêté  sur  les  indications  d'un  gra- 
veur à  qui  il  avait  demandé  la  retouche  d'un  cli- 
ché en  cherchant  à  é2:arer  l'artiste  sur  son  but. 
Une  perquisition  opérée  au  domicile  de  l'inculpé 
faisait  mettre  la  main  sur  une  certaine  quantité  de 
timbres-poste  contrefaits  ainsi  que  sur  le  matériel 
de  fabrication  :  six  mois  de  prison. 

En  dernier  lieu,  un  jugement  du  tribunal  cor- 
rectionnel de  Belfort,  en  date  du  21  mars  1890,  a 

condamné  le  sieur  S à  2  ans  de  prison  pour 

contrefaçon  de  timbres-poste  à  15  centimes.  Les 
résultats  obtenus  étaient  très  impar^uts;  la  fraude 
sautait  aux  yeux. 


HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS  91 

A  propos  de  la  première  de  ces  affaires,  Tho- 
mas Grimm,  le  chroniqueur  du  Petit  Journal,  après 
avoir  constaté  que  les  timbres-poste  contrefaits 
étaient  recherchés,  comme  curiosités,  par  les  col- 
lectionneurs qui  payaient  3  et  4  francs  un  timbre 
faux,  alors  qu'une  figurine  authentique  ne  vaut  que 
15  centimes,  en  concluait  qu'il  fallait  s'attendre  à 
ce  que  les  contrefaçons  trouvassent,  à  leur  tour, 
des  contrefacteurs. 

Emploi  frauduleux  de  timbres-poste 
ayant  déjà  servi. 

La  circulaire  précitée,  du  25  janvier  1849,  pres- 
crivait de  considérer  comme  nul  tout  timbre-poste 
ayant  déjà  servi,  lavé  ou  nettoyé  par  un  procédé 
quelconque,  et  de  frapper  de  la  double  taxe  l'objet 
de  correspondance  sur  lequel  aura  été  apposée  une 
figurine  dans  ces  conditions  :  pénalité  bien  ano- 
dine, en  vérité,  et  qui  présentait,  en  outre,  l'incon- 
vénient d'atteindre  non  pas  l'auteur  de  la  fraude, 
mais  le  destinataire,  qui  avait  à  acquitter  la  taxe 
doublée.  Aussi  cette  mesure  est-elle  bientôt  jugée 
insuffisante  en  même  temps  qu'anormale  et,  par 


92  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS 

une  circulaire  du  lo  mai  1849,  le  directeur  géné- 
ral de  l'Administration  des  Postes,  après  avoir  pris 
Tavis  du  Ministre  des  Finances,  prescrit  les  dispo- 
sitions suivantes,  de  la  part  du  bureau  expéditeur  : 
ne  pas  oblitérer  la  figurine,  taxer  la  lettre  en  moti- 
vant, par  une  annotation,  l'application  de  la  taxe, 
et  l'adresser  sous  chargement  d'office  au  bureau 
destinataire;  aviser  l'Administration.  Au  bureau 
de  destination,  convoquer  la  personne  à  qui  la 
lettre  est  adressée,  établir  un  procès-verbal  et  le 
transmettre  à  l'Administration  avec  la  lettre  ou 
partie  de  lettre  portant  le  timbre-poste-incriminé. 
Le  i*""  août  suivant,  l'Administration  fait  remar- 
quer qu'un  certain  nombre  de  lettres  sont  revê- 
tues de  timbres-poste  ayant  déjà  servi,  sans  que 
l'on  ait  recouru  à  aucune  manœuvre  en  vue 
d'eflacer  la  marque  oblitérante,  circonstance  qui 
dénote  de  l'ignorance,  plutôt  qu'une  intention 
frauduleuse.  Un  avis  au  public,  ayant  pour  but  d'y 
remédier,  est  apposé  à  la  porte  des  bureaux,  aux 
guichets,  ainsi  qu'à  proximité  de  toutes  les  boîtes 
aux  lettres.  Il  est,  en  outre,  recommandé  de  dis- 
tinguer, dans  la  mention  explicative  de  la  taxe,  la 
nature  du    cas,  soit  «  Taxe  pour  timbre  contre- 


HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS  qS 

fait  »  —  «  taxe  pour  timbre  altéré  —  taxe  pour 
timbre  ayant  servi  ».  Des  instructions  sont,  d'autre 
part,,  adressées  aux  agents  pour  les  cas  où  le  des- 
tinataire refuse  de  laisser  entre  leurs  mains  le  corps 
du  délit,  ou  cherche  à  les  intimider  par  la  ruse 
ou  l'audace. 

Enfin,  une  législation  pénale  spéciale  est  établie 
par  l'article  unique  de  la  Loi  du  i6  octobre  1849, 
ainsi  conçu  : 

(c  Quiconque  aura  fait  sciemment  usage  d'un 
timbre-poste  ayant  déjà  servi  à  l'affranchissement 
d'une  lettre,  sera  puni  d'une  amende  de  50  francs 
à  I  000  francs. 

«  En  cas  de  récidive,  la  peine  sera  d'un  empri- 
sonnement de  5  jours  à  un  mois  et  l'amende  sera 
doublée. 

«  Sera  punie  des  mêmes  peines,  suivant  les 
distinctions  sus-établies,  la  vente  ou  tentative  de 
vente  d'un  timbre-poste  ayant  déjà  servi.  » 

Les  faits  prévus  par  cette  loi  constituent,  à 
rencontre  des  infractions  d'autre  nature  aux  lois 
postales,  non  une  contravention,  mais  un  délit. 
En  conséquence,  les  dispositions  pénales  ne  sont 
applicables,  pour  l'emploi  de  timbres-poste  ayant 


94  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS 

déjà  servi ,  qu'au  cas  d'intention  frauduleuse , 
d'emploi  fait  sciemment,  tandis  que  les  contraven- 
tions résultent  du  fait  même,  sans  que  l'on  ait  à 
rechercher  l'intention,  la  connaissance  de  cause. 

Au  mois  de  novembre  1863,  l'Administration  se 
préoccupe  de  voir  certaines  personnes  accumuler 
de  grandes  quantités  de  timbres-poste  dans  un  but 
qui  n'est  pas  bien  défini.  L'admission,  comme 
échantillon,  des  figurines  amassées  dans  ces  con- 
ditions ,  est  interdite ,  et  des  instructions  sont 
adressées  dans  le   service. 

Un  peu  plus  tard  se  produisent  des  tentatives 
consistant  à  enduire  la  face  des  timbres  -  poste 
d'une  couche  de  gomme  ou  de  vernis,  de  telle 
sorte  que,  cet  enduit  formant  corps  isolant,  un 
simple  lavage  suffise  pour  enlever  à  la  fois  l'enduit 
et  l'empreinte  d'annulation.  Des  mesures  sont 
prises  pour  déjouer  ces  tentatives  coupables. 

Au  fur  et  à  mesure  de  la  propagation  de  l'ins- 
truction, les  cas  d'emploi  de  timbres-poste  ayant 
déjà  servi  sont  devenus  de  moins  en  moins  nom- 
breux. Un  peu  de  statistique,  pour  établir  les  ré- 
sultats successifs  : 

1856.  —  Nombre  des  procès-verbaux,  6  ooo« 


HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS  9 5 

Affaires  abandonnées,  i  050.  Acquittements,  950. 
Condamnations,  4  000. 

1860. —  2233  affaires,  dont  532  abandonnées; 
pour  le  surplus,  412  acquittements  et  i  289  con- 
damnations. 

1865.  —  I  051  affaires.  170  sont  laissées  sans 
suite  par  l'Administration  faute  de  preuves  maté- 
riellessuffisantes.  Les  parquets  en  abandonnent383, 
prononcent  31  acquittements  et  467  condamna- 
tions. 

1869.  —  817  affaires.  97  sont  abandonnées  par 
l'Administration  et  344  par  les  parquets;  il  est  pro- 
noncé 35  acquittements  et  341  condamnations. 

1875.  —  I  193  affaires,  dont  686  abandonnées; 
39  acquittements  et  468  condamnations. 

1882.  —  954  affaires.  679  restent  sans  suite; 
37  acquittements  et  238  condamnations. 

Il  résulte  de  ces  chiffres  que,  de  1856  à  1860  et 
de  cette  dernière  année  à  1865,  les  cas  délictueux 
ont  diminué  de  moitié  d'une  période  à  l'autre,  et 
que,  depuisj  les  chiffres  ont  peu  varié;  la  fraude 
diminue  néanmoins,  la  proportion  s'abaissant  par 
rapport  à  la  consommation  qui  est  en  progression 
constante. 


g6  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS 

Les  dispositions  prises  pour  la  composition 
secrète  des  encres  d'impression  d'une  part  et, 
d'autre  part,  des  encres  employées  pour  l'oblité- 
ration, constituent  pour  l'Administration  la  meil- 
leure garantie  contre  le  lavage  des  timbres  ayant 
servi.  Il  résulte,  en  effet,  de  la  combinaison  des 
principes  communs  à  ces  deux  encres,  qu'il  n'est 
pas  possible  de  détruire  l'empreinte  oblitérante  sans 
attaquer  en  même  temps  Tencre  du  timbre  même. 

La  fraude  ne  s'est  pas  exclusivement  produite 
par  l'emploi  à  nouveau  de  timbres  ayant  servi, 
nettoyés  ou  non.  Citons  un  cas  assez  original  où 
la  perversité  du  coupable  ne  manquait  pas  d'être 
doublée  de  facultés  inventives  dignes  d'une  meil- 
leure application;  il  s'est  produit  à  Marseille  il  y 
a  quelque  vingt  ans. 

Encore  actuellement,  mais  beaucoup  plus  à  cette 
époque  où  les  départs  des  paquebots  pour  les 
pays  lointains  étaient  infiniment  moins  fréquents 
et  les  tarifs  beaucoup  plus  élevés,  des  correspon- 
dances volumineuses,  des  ballots  de  journaux 
réunis  dans  l'intervalle  d'un  départ  à  l'autre,  don- 
naient lieu  à  la  perception  de  ports  relativement 
considérables.    Le  timbre-poste    de    la  valeur   la 


HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS  97 

plus  élevée  étant,  à  cette  époque,  celui  de  80  cen- 
times, il  en  fallait  un  certain  nombre  et  les  figu- 
rines ne  trouvaient  point  facilement  place  sur  l'en- 
veloppe ou  la  bande  d'adresse;  on  était  obligé  de 
les  superposer  partiellement,  chacune  d'elles  re- 
couvrant en  partie  sa  voisine. 

Exploitant  cet  usage,  un  agent  partageait  en  deux 
des  timbres-poste  à  80  centimes,  collait  une  moitié 
sur  laquelle  il  faisait  à  peine  porter  la  figurine 
placée  à  la  suite  et  qui,  apparemment,  recouvrait  le 
reste  du  timbre  mutilé;  la  seconde  moitié  était  un 
peu  plus  loin,  ou  dans  une  autre  occasion,  l'objet 
du  même  subterfuge,  et  notre  homme  arrivait 
ainsi  à  employer  une  figurine  pour  deux.  Mais  il 
avait  compté  sans  la  gent  timbrophile,  qui  est  uni- 
verselle; un  destinataire  collectionneur  n'y  trouva 
pas  son  compte.  De  là,  réclamation,  enquête  et, 
finalement,  révocation  de  l'agent  infidèle  qui,  pour 
avoir  voulu  augmenter  frauduleusement  ses  res- 
sources, perdit  Tem-ploi  qui  assurait  son  existence 
et  celle  de  sa  famille. 

Comme  suite  aux  renseignements  relatifs  à  la 
législation  pénale  des  timbres-poste,  essayons,  par 
une  diversion  à  la  longue  énonciation  de  dates  et 


98  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS 

de  chiffres  des  sujets  qui  précèdent,  de  dérider  un 
peu  le  front  du  lecteur,  en  lui  offrant  un  chapitre 
tant  soit  peu  fantaisiste  qu'un  ami  met  à  notre 
disposition,  à  titre  de  collaboration.  Je  tairai  le  nom 
de  l'auteur...  en  vertu  des  devoirs  sacrés  de  l'ami- 
tié; il  ne  faut  pas  que  l'on  mette  en  doute  le  sé- 
rieux de  son  caractère. 


CHAPITRE  VII 

VARIÉTÉS 

Le  timbre -poste  à  la  «  Correctionnelle  ». 

Eh  quoi?  mon  pauvre  timbre-poste,  c'est  toi  que 
je  trouve  en  présence  du  Tribunal  de  la  police  cor- 
rectionnelle ! 

Empressons-nous  de  rassurer  tes  amis  en  ajou- 
tant que  ce  n'est  point  en  coupable,  les  mains 
chargées  de  chaînes,  flanqué  de  deux  gendarmes, 
que  tu  comparais  devant  l'appareil  sévère  de  la 
Justice  de  ton  pays;  c'est  comme  accusateur,  et  tu 
vas  victorieusement  confondre  les  impudents  qui 
ont  tenté  de  ternir  ta  réputation  d'irréprochable 
honnêteté.  Mais  un  coup  de  sonnette  retentit;  un 
huissier  annonce  «  Le  Tribunal  »  ;  c'est  le  mo- 
ment solennel.  Écoutons  ! 


100  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS 

C'est  d'abord  l'accusé  X***  qui  a  fait  insérer  à 
profusion  l'annonce  suivante  :  «  On  offre  gratis 
le  moyen  de  gagner  de  5  000  francs  à  10  000  francs 
par  an;  occupation  facile  et  agréable,  n'exigeant 
ni  capital,  ni  connaissances  spéciales.  S'adresser 
à  M.  X***,  poste  restante,  à  Bruxelles.  Joindre  un 
«  timbre-poste  de  25  centimes  pour  l'affranchis- 
sement de  la  réponse.  » 

In  cauda  venenum!  Les  naïfs  envoient  un  timbre- 
poste;  M.  X***  ne  répond  pas;  le  tour  est  joué. 

Vous  me  ferez  observer  que  la  valeur  d'un 
timbre-poste  est  bien  minime.  Mais  point  n'est 
besoin  d'être  grand  clerc  en  mathématiques  pour 
savoir  que,  quelque  faible  que  soit  le  multipli- 
cande, le  produit  n'a  pas  de  limites  à  condition 
que  le  multiplicateur  soit  suffisamment  élevé.  Or, 
dans  notre  cas,  il  n'est  que  trop  élevé,  le  multipli- 
cateur, le  nombre  des  gogos!  Aussi,  par  25  cen- 
times, l'accusé  a-t-il  escroqué,  au  total,  une 
somme   ronde. 

Il  s'entend  condamner...  non,  que  dis-je?  je 
me  laisse  égarer  par  le  cliché  :  il  est  condamné 
par  contumace  à  la  prison.  Mais  il  ne  «  s'entend 
point  »  condamner,  car  il  a  eu  la  sage  précaution 


HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS  10 1 

de  mettre  la  frontière  entre  lui  et  ses  dupes,  pour 
deux  motifs  : 

Afin  de  se  soustraire  au  châtiment,  d'abord; 

Puis,  pour  rendre  l'affaire  plus  lucrative  :  de 
France,  il  n'aurait  pu  demander  qu'un  timbre- 
poste  de  1 5  centimes,  tandis  que,  de  par  les  tarifs 
de  l'Union  postale  universelle,  le  port  d'une  lettre 
de  la  Belgique  pour  notre  pays  est  de  25  centimes, 

d'où  une  augmentation  de  40  0/0  dans  les 

bénéfices. 


*  * 


Malgré  notre  profonde  déférence  pour  la  Magis- 
trature,  nous  sommes  forcés  de  reconnaître  qu'ici 
elle  a  été  un  peu  vite  ;  le  ministère  public  va  man- 
quer tout  à  l'heure  de  textes  légaux  nécessaires 
pour  requérir  condamnation. 

C'est  encore  par  la  voie  des  annonces  que  l'in- 
culpé a  procédé  : 

«  Méthode  de  fabrication  d'excellent  vin  reve- 
nant à  cinq  centimes  le  litre,  envoyée  franco  contre 

un  timbre-poste  de  1 5  centimes.  » 

Au  moins,  dans  ce  cas,  on  a  eu  quelque  chose 

pour  son  argent  :  un  imprimé  de  deux  décimètres 


102  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS 

carrés,  affranchi  un  centime.  Notre  homme  a 

gagné  14  centimes  par  envoi,  le  prix  de  revient  de 
la  circulaire,  de  la  fameuse  méthode  étant  pour 
ainsi  dire  nul. 

Même  observation  théorique  qu'à  la  première 
affaire,  en  ce  qui  concerne  la  multiplication  et  les 
naïfs. 

L'avocat  de  l'accusé  déclare  que  le  secret  com- 
muniqué par  son  client  n'a  pas  de  prix;  c'est  la 
fortune  pour  ceux  qui  l'emploieront...  mais  encore 
faut-il  bien  procéder. 

—  Le  produit  obtenu  est  infect,  opposent  les 
plaignants  indignés. 

—  C'est  que  vous  avez  mal  opéré,  leur 
répond-on,  et  puis...  tous  les  goûts  sont  dans 
la  nature.  Admettons  même  que  votre  objec- 
tion soit  fondée;  après  tout,  l'accusé  a  tenu  son 
engagement;  il  vous  a  envoyé  sa  méthode;  elle 
est  sur  une  feuille  simple,  c'est  entendu;  vous 
a-t-il  promis  un  volume  ? 

Bref,  l'acquittement  est  prononcé;  toutefois 
l'indélicatesse  du  prévenu  est  sévèrement  blâmée 
par  le  président. 


HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS  Io3 


*  * 


Quel  peut  bien  être  ce  jeune  homme  ?  Sa 
figure  honnête  contraste  avec  la  mine  astucieuse 
de  celui  qui  l'a  précédé  :  une  vingtaine  d'années; 
bonne  tenue;  physionomie  ouverte,  non  cepen- 
dant sans  quelque  chose  de  jovial  et  de  préten- 
tieux. 

C'est  M.  X***,  clerc  de  notaire,  une  célébrité 
locale;  pas  un  bon  calembour  qui  ne  soit  de 
lui;  pas  de  semaine  sans  que  le  journal  de  l'ar- 
rondissement ne  consigne  son  nom  dans  la  liste 
des  malins  qui  «  ont  deviné  »,  qui  ont  envoyé 
une  «  solution  juste  »  aux  énigmes,  mots  carrés 
ou  combinaisons  d'autre  forme  géométrique  qui 
ont  défié  leur  perspicacité  dans  le  numéro  pré- 
cédent. 

Décidément^  il  t'en  voulait,  mon  cher  timbre- 
poste,  et  ça  devait  mal  finir.  N'est-ce  pas  lui  qui 
prétendait  avoir  trouvé  la  solution  du  grand  pro- 
blème humanitaire,  l'abolition  de  l'esclavage  :  du 
simple  fait  de  l'apposition  d'un  timbre-poste  sur 
le  nez  d'un  esclave,  il  le  trouvait  affranchi! 

N'est-ce   pas    lui    encore  qui  estimait   comme 


104  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS 

gens  pratiques  les  Australiens  parce  que,  pour 
composer  leur  timbre-poste,  il  leur  a  suffi  de 
faire  un  cygne,  qui  reconnaissait  une  lettre  de 
Chambéry  au  Timbre  de  Savoie^  et  prétendait  que 
les  demi-dieux  de  la  mythologie  dont  la  voix  por- 
tait le  plus  loin  é talent  les  faunes  \ 

Mais  ce  ne  sont  point  là  cas  pendables.  Qu'est- 
ce  que  M.  X***  peut  avoir  à  démêler  avec  la  jus- 
tice à  propos  du  timbre-poste?  L'acte  d'accusa- 
tion va  nous  l'apprendre. 

L'œil  toujours  vigilant  de  l'Administration  a 
constaté  sur  un  journal  affranchi  au  taux  réduit 
des  périodiques  quelques  hgnes  courtes  et  ser- 
rées, dissimulées  sous  la  figurine  d'affranchisse- 
ment. 

Le  timbre-poste  enlevé,  l'employé  étonné  lit 
une  phrase  énigmatique  se  terminant  par  la 
réponse  de  Cambronne  au  général  anglais,  écrite 
dans  une  orthographe  étrange.  Il  y  a  deux  ver- 
sions au  sujet  de  cette  réponse...  rassurez- vous, 
c'était  la  plus  explicite,  la  plus  académique,  la 
plus...  propre,  mais,  par  contre,  la  moins  éner- 
gique. «  Le  train  part  et  se  rend;  la  gare  demeure 
et  ne   se  rend  pas.  »  C'était  une  solution   juste, 


HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS  I05 

par  un  triple  et  affreux  jeu  de  mots.  Ecrivant  à 
l'un  de  ses  confrères  en  basoche  et  en  jeux  d'es- 
prit, l'accusé  lui  avait  posé  la  question  :  «  duelle 
différence  y  a-t-il  entre  un  train  et  une  gare?  » 
ajoutant  :  «  si  tu  ne  trouves  pas  la  réponse,  je 
te  l'enverrai  sous  le  timbre-poste,  à  décoller 
avec  soin,  d'un  journal;  une  bonne  farce,  hein! 
histoire  de  prolonger  un  peu  ton  impatience; 
cherche  bien  !  » 

Mais  les  postiers,  eux  aussi,  cherchent  bien 
pour  combattre  la  fraude,  et  dame  Justice  n'en- 
tend pas  la  plaisanterie,  lorsqu'elle  franchit  les 
bornes  de  la  Loi.  On  devine  le  reste  :  procès- 
verbal  de  contravention  à  la  loi  du  25  juin  1856, 
interdisant  toute  correspondance  sur  les  objets 
affranchis  à  prix  réduit,  sous  peine  d'une  amende 
de  150  à  300  francs,  et,  finalement,  les  bons 
antécédents  et  la  pureté  des  intentions  du  pré- 
venu étant  admis,  en  tant  que  possible,  comme 
circonstances  atténuantes  ,  il  n'est  condamné 
qu'au  minimum  de  la  peine.  Mais  prends  garde 
à  toi,  jeune  facétieux;  en  cas  de  récidive,  l'amende 
peut  aller  à  3  000  francs. 

Assez...  n'est-ce  pas? 


CHAPITRE  VIII 

PRÉPOSÉS   A   LA   VENTE.   REMISES  AUX    INTER- 
MEDIAIRES. 

Aux  termes  d'une  circulaire  du  20  décem- 
bre 1848,  la  vente  des  timbres-poste  est  d'abord 
interdite  à  toute  personne  étrangère  à  l'Adminis- 
tration; nous  trouvons  dans  cette  mesure  une 
nouvelle  manifestation  des  craintes  exagérées  de 
contrefaçon  qui  dominaient  au  début  de  l'insti- 
tution. Les  facteurs  eux-mêmes,  seuls  préposés 
à  la  vente  avec  les  titulaires  des  bureaux  de  poste, 
ne  pouvaient,  qu'au  cours  de  leurs  tournées,  en 
approvisionner  le  public;  il  leur  était  interdit 
d'en  vendre  à  leur  domicile. 

Certains  facteurs  se  montrent  récalcitrants  à 
faire    l'avance    de    la  valeur    des    timbres-poste 


HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS  I OJ 

qu'ils  sont  chargés  de  vendre.  Pour  vaincre  cette 
résistance,  l'Administration  est  obligée  d'avertir 
son  personnel  qu'elle  considérera  tout  fait  de  ce 
genre  comme  un  refus  de  service  entraînant  la 
peine  de  la  suspension  de  fonctions. 

La  circulaire  n°  12,  du  22  juin  1849,  porte 
que  plusieurs  directeurs  ont  demandé  que  les 
débitants  de  tabac,  boîtiers  et  entreposeurs  fussent 
autorisés  à  vendre  des  timbres-poste  ;  mais  l'Admi- 
nistration estime  qu'il  n'y  a  pas  lieu,  «  pour  le 
moment  du  moins  »,  d'adopter  cette  disposition. 
Quelques  mois  plus  tard  (arrêté  du  21  jan- 
vier 1850)  le  Ministre  des  Finances  autorise  l'Ad- 
ministration à  faire  vendre  des  timbres-poste,  au 
prix  nominal  des  taxes  que  représentent  ces  figu- 
rines, par  les  entreposeurs  de  dépêches,  les  boî- 
tiers et  les  débitants  de  tabac  :  véritable  charge 
d'emploi,  comportant  un  danger  de  pertes,  sans 
compensation.  Il  n  y  avait  pas  grand  empresse- 
ment à  attendre  des  préposés,  dans  de  telles  con- 
ditions. Aussi,  pour  stimuler  leur  zèle,  a-t-on 
vite  jugé  indispensable  de  les  intéresser  pécuniai- 
rement et,  le  31  août  1853,  une  remise  de  2  0/0, 
à  prélever  par  voie  de  défalcation  du  prix  d'achat, 


I08  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS 

est  accordée  aux  boîtiers  de  Paris,  comme  essai. 
En  présence  des  bons  résultats  obtenus,  la  mesure 
est  étendue  (décision  du  Ministre  des  Finances, 
du  3  juin  1854,  appuyée  sur  un  décret  de  la 
même  date)  d'abord  à  tous  les  agents,  sous- 
agents  et  personnes  étrangères  à  l'Administration 
chargées  de  la  vente  des  timbres-poste  ,  puis 
(décision  du  21  décembre  1854)  aux  vaguemes- 
tres des  armées  de  terre  et  de  mer. 

Une  circulaire  du  16  juin  1854  prescrit  aux 
directeurs  des  bureaux  d'approvisionner,  à  partir 
du  i"  juillet  suivant,  les  préposés  à  la  vente,  dans 
les  proportions  ci-après,  au  minimum  :  facteurs, 
boîtiers  comamissionnés  et  préposés  des  gares, 
5  francs;  distributeurs,  10  francs;  débitants  de 
tabac,  des  villes,  10  francs,  et  des  communes 
rurales,  5  francs.  Dans  le  but  de  prévenir  le  mau- 
vais effet  de  cette  obligation,  un  appendice  à  cette 
instruction  fait  remarquer  que  la  remise  de  2  0/0 
compense  et  au  delà  la  perte  d'intérêt  du  capital 
représentant  l'approvisionnement. 

La  remise  allouée  aux  personnes  obligées  ou 
simplement  autorisées  à  vendre  des  timbres- 
poste,  est  ramenée  de  2  0/0  à  i  0/0  à  partir  du 


HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS  lOQ 

i^""  janvier  1862,  aux  termes  d'une  décision 
ministérielle  du  16  décembre  i86r. 

A  dater  du  i"  juillet  1878  (décision  du 
20  mars  1878),  cette  remise  qui,  jusque-là,  pro- 
fitait exclusivement  aux  titulaires  des  bureaux 
pour  les  figurines  vendues  directement  par  eux 
au  public,  est  attribuée,  dans  les  bureaux  com- 
posés, pour  moitié  au  titulaire,  et  pour  moitié, 
par  parts  égales,  aux  commis  principaux^  commis 
et  surnuméraires. 

La  vente  des  timbres-poste  a  été  étendue  aux 
guichets  des  bureaux  télégraphiques  par  une  déci- 
sion du  mois  d'avril  i88r,  et  aux  bibliothécaires 
des  gares  où  il  n'existe  ni  débit,  ni  sous-débit  de 
tabac,  par  une  décision  du  7  juillet  1888. 


CHAPITRE  IX 

OBLITÉRATION    DES    TIMBRES-POSTE. 

Aux  termes  d'une  circulaire  du  20  décembre 
1848,  rannulation,  ou  oblitération  des  timbres- 
poste  s'effectue  d'abord  «  au  moyen  du  timbre  à 
date,  fortement  imprégné  d'encre  ».  Mais,  à 
peine  la  figurine  a-t-elle  paru  qu'une  instruction 
du  3  janvier  1849,  constatant  que  le  timbre  à  date 
marque  insuffisamment  ou  que  l'empreinte  s'efface 
aisément,  annonce  l'envoi  prochain  d'un  timbre 
oblitérant  et  d'une  encre  spéciale.  En  attendant, 
les  agents  doivent  continuer  à  faire  usage  du 
timbre  à  date,  mais  en  employant  l'encre  d'impri- 
merie; au  cas  d'impossibilité  de  se  procurer  de 
cette  encre,  les  timbres-poste  devront  être  annulés 
au  moyen  «  d'une  large  croix  faite  à  l'encre,  à  la 


HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS  I  I  I 

main,  au  travers  du  blanc  de  la  petite  figure  de 
la  République  »,  les  barres  se  prolongeant  sur  la 
lettre  même.  En  présence  des  nombreuses  omis- 
sions d'annulation  signalées,  il  est,  en  même  temps, 
décidé  que  chaque  constatation  de  l'espèce  entraî- 
nera une  retenue  de  traitement  de  5  francs,  à 
peine  d'amende  plus  forte  en  cas  de  récidive,  ou 
contre  les  agents  qui  ne  signaleraient  pas  les  man- 
quements imputables  à  leurs  correspondants. 

Le  timbre  oblitérant  annoncé  est  envoyé 
au  cours  du  même  mois;  il  représente  un 
«  losange  grillé  ».  Les  agents  ne  devront  pas 
employer  d'autre  encre  que  celle  qui  leur  est 
fournie  par  l'Administration,  et  ils  éviteront  de  la 
modifier  par  addition  d'huile,  la  composition 
chimique  de  cette  encre  étant  la  même  que  celle 
de  l'encre  servant  à  l'impression  des  figurines,  de 
telle  sorte  que  les  tentatives  de  lavage  attaquent 
la  vignette,  en  même  temps  que  la  marque  obli- 
térante. 

Une  circulaire  du  22  juin  1849  insiste  en  vue  de 
parer  aux  omissions  d'annulation;  étant  donné  que 
l'amende  fixe  appliquée  jusque-là  frappe  d'une 
manière  inégale  les  agents  selon  que  leurs  appoin- 


I  I  2  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS 

tements  sont  plus  ou  moins  élevés,  les  bases  d'ap- 
plication sont  modifiées  :  dorénavant,  et  à  partir 
du  i^''  juillet  suivant,  les  amendes  seront  graduées 
de  I  franc  à  5  francs  selon  l'importance  du  traite- 
ment de  l'agent  fautif  :  i  franc  et  i  fr.  50  cent, 
pour  les  bureaux  simples  et  de  2  à  5  francs  pour  les 
bureaux  composés,  suivant  la  classe.  Il  est  aussi 
recommandé  de  ne  frapper  qu'une  fois  les  timbres- 
poste  de  l'empreinte  oblitérante,  certains  agents, 
par  un  excès  de  zèle  nuisible  au  contrôle,  apposant 
plusieurs  empreintes  les  unes  sur  les  autres.  Le 
timbre  oblitérant  est  officiellement  dénommé 
«  timbre  à  losanges  ». 

Aux  termes  d'un  arrêté  du  Ministre  des  Finances, 
en  date  du  6  décembre  1850,  la  peine  applicable 
aux  omissions  d'annulation  est  réduite  à  une 
amende,  égale  à  la  valeur  du  timbre  dont  l'oblité- 
ration aura  été  négligée,  et  double  de  cette  valeur, 
en  cas  de  récidive.  Cette  pénalité  devait  elle-même 
disparaître,  ainsi,  d'ailleurs,  que  toutes  les  punitions 
pécuniaires,  abolies  par  une  décision  ministérielle 
(M.  Cochery),  du  15  janvier  1878. 

Circulaire  du  i'^''  janvier  1852  :  substitution,  au 
timbre   à    losanges^   d'un  timbre  oblitérant   d'un 


HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS  I  I  3 

nouveau  modèle  «  dont  la  surface,  armée  de 
pointes  coniques  »,  puisse  pénétrer  le  papier  et  y 
laisser  des  traces  qui  empêchent  «  le  lavage  et  le 
double  emploi  de  la  figurine  ».  Ce  timbre  porte  au 
centre  un  numéro  conventionnel,  correspondant 
au  rang  du  classement  alphabétique  du  bureau,  de 
manière  à  permettre,  au  besoin,  de  reconnaître,  à 
ce  timbre,  Torigine  de  la  lettre;  pour  Paris  et  les 
bureaux  ambulants,  les  chiffres  sont  remplacés  par 
des  initiales;  celui  du  «  Départ  »  de  Paris  est  étoile 
et  ne  comporte  ni  lettres  ni  chiffres;  la  section  de 
.  «  l'Etranger  »  du  même  service  emploie  aussi  des 
timbres-roulettes  à  pointes  coniques,  pour  obli- 
térer plus  promptement  les  timbres-poste  apposés 
parfois  en  grand  nombre  sur  des  correspondances 
comportant  un  port  élevé.  Quelques  années  plus 
tard,  et  au  fur  et  à  mesure  des  remplacements,  les 
dimensions  du  numéro  d'ordre  central  du  timbre 
oblitérant  des  bureaux  sédentaires  sont  portées  au 
double. 

A  la  suite  de  la  décision  du  17  novembre  1859, 
qui  a  créé  les  timbres-poste  à  i,  2  et  4  centimes, 
le  Directeur  général  de  l'Administration  décide,  le 
5  octobre  1860,  en  annonçant  la  mise  en  circula- 

8 


I  14  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS 

tien,  le  i^''  novembre  suivant,  du  premier  de  ces 
timbres,  que  roblitération  des  figurines  apposées 
sur  les  imprimés  aura  lieu  au  moyen  de  l'applica- 
tion du  timbre  à  date  du  bureau  expéditeur. 

Les  timbres  des  cartes  postales  doivent  d'abord 
être  annulés  au  moyen  du  timbre  oblitérant 
(loi  du  20  décembre  1872). 

Enfin,  au  mois  de  mars  1876,  l'unification 
s'opère  dans  le  procédé  d'oblitération  et,  depuis 
cette  époque,  les  timbres-poste  sont,  sans  dis- 
tinction de  nature  de  correspondances,  annulés  au 
moyen  du  timbre  à  date,  dont  la  machine  à  tim- 
brer Daguin  facilite  aujourd'hui  l'application  cor- 
recte, en  frappant  d'un  seul  coup  les  lettres  d'une 
double  empreinte  portant,  l'une  sur  le  timbre- 
poste,  et  l'autre  sur  la  suscription. 


CHAPITRE  X 

LE  TIMBRE-POSTE  PENDANT  LA   GUERRE    DE    187O-187I. 

11  nous  faut  parler  du  timbre-poste  pendant  la 
guerre  franco-allemande. 

En  ta  qualité  de  bon  Français,  pauvre  timbre- 
poste,  tu  devais  avoir  ta  part  des  vicissitudes  de  la 
Patrie.  Quelles  furent  tes  destinées  aux  heures  des 
douloureuses  angoisses,  alors  qu'en  une  pha- 
lange improvisée  de  cinq  cents,  les  agents  des 
Postes  de  la  capitale  avaient  quitté  la  plume  pour 
le  fusil  Snider,  le  bureau  pour  les  remparts,  sous 
le  commandement  de  sous-agents  qu'ils  avaient 
choisis  pour  chefs  en  raison  de  l'expérience  acquise 
par  ces  derniers,  anciens  sous-officiers;  alors  que, 
tous  camarades,  tous  frères,  réunis  en  un  bataillon 
d'élite  de  l'armée  parisienne,  nous  avons  combattu 


Il6  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS 

et  souffert;  impuissants  à  la  victoire,  hélas!  mais 
luttant  pour  l'honneur  national  jusqu'à  la  dernière 
cartouche,  jusqu'à  la  dernière  bouchée! 

Le  10  septembre  1870,  les  receveurs  des  dépar- 
tements menacés  de  l'invasion  sont  invités  à 
adresser  au  Receveur  principal  de  la  Seine,  dès 
que  l'ennemi  sera  signalé  à  une  journée  de 
marche,  les  valeurs  en  caisse,  y  compris  les  timbres- 
poste.  Cette  mesure  ne  peut  être  partout  assurée 
en  temps  utile,  et,  sur  certains  points,  on  dut 
recourir  à  l'incinération  des  figurines. 

Devant  l'imminence  de  l'investissement  de  Paris, 
l'Administration  centrale  écoule  d'office  sur  les 
départements  du  Sud  et  de  l'Ouest  tous  les  tim- 
bres-poste fabriqués;  puis,  pour  parer  à  la  pénurie, 
les  receveurs  sont  mis  en  demeure  d'opérer  les 
affranchissements  en  numéraire  dans  la  plus  large 
mesure  possible;  en  outre,  on  fait  passer  dans  les 
bureaux  importants  la  majeure  partie  des  appro- 
visionnements des  bureaux  moindres,  ces  derniers 
étant  moins  gênés  pour  pratiquer  le  système  peu 
expéditif  de  la  perception  du  port  en  numéraire. 

Plusieurs  journaux  ayant  annoncé  que  les  tim- 
bres-poste à  l'effigie  de  l'ex- empereur  cesseraient 


HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS  II7 

d'être  valables  à  partir  du  i^""  novembre  1870, 
l'Administration  contredit  cette  indication  :  L'in- 
térêt du  Trésor  commande  Temploi  de  l'approvi- 
sionnement, qui  représente  une  valeur  importante, 
et  ce  n'est  qu'après  épuisement  de  la  réserve  fa- 
briquée que  seront  mises  en  circulation  les  figu- 
rines à  l'effigie  de  la  République  (Moniteur  universel 
de  Tours,  21  octobre  1870). 

Finalement,  le  matériel  de  la  fabrication  étant  en- 
fermé dans  Paris  investi,  une  décision  du  Ministre 
des  Finances,  en  date  du  19  octobre  1870,  autorise 
l'Administration  à  faire  confectionner  des  timbres- 
poste  et  des  chiffres-taxes  par  la  Monnaie  de  Bor- 
deaux ;  ces  figurines  ne  devront,  toutefois,  être 
mises  en  circulation,  dans  chaque  département, 
qu'après  épuisement  des  anciennes. 

A  la  suite  de  l'essai,  sans  succès,  d'une  planche 
imprimée,  sur  une  matrice  faite  à  la  plume,  on 
grava  sur  pierre  des  matrices  représentant  chaque 
catégorie  de  timbres-poste  et  au  moyen  desquelles 
on  établit  des  planches  servant  à  l'impression  par 
un  procédé  lithographique.  De  ces  difficultés, 
imposées  par  le  manque  de  temps  qui  aurait  été 
nécessaire  pour  employer  la  gravure  sur  métaux, 


Il8  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS 

résulte  le  défaut  de  netteté,  le  flou  qui  fait  recon- 
naître, à  première  vue,  ces  timbres-poste. 

La  Monnaie  de  Bordeaux  a  produit  dans  ces 
conditions  :  24500000  timbres-poste  à  i  cen- 
time; 8900000  à  2  centimes;  4200000  à 
4  centimes;  6  400  000  à  5  centimes;  17  800  000 
à  10  centimes;  52400000  à  20  centimes; 
2900000  à  30  centimes;  3  300000  à  40  cen- 
times; 2  300000  à  80  centimes;  et  2  600000  chif- 
fres-taxes; au  total  125  300000  figurines. 

La  fabrication  de  Bordeaux  cessa  à  la  fin  de 
février  1871;  les  matrices  furent  détruites  le 
12  août  suivant. 


CHAPITRE  XI 

USAGE    DU    TIMBRE-POSTE    EN    DEHORS 
DE    l'affranchissement    DES    CORRESPONDANCES. 

En  dehors  de  l'affranchissement  des  correspon- 
dances, le  timbre-poste  n'a  qu'un  cas  d'emploi 
officiel  :  il  se  rattache  au  service  de  la  Caisse  natio- 
nale d'épargne. 

Aux  termes  d'un  décret  du  30  novembre  1882, 
qui  a  reçu  son  exécution  à  partir  du  1*='  jan- 
vier 1883,  «  toute  personne  qui  désire  obtenir  un 
livret  de  la  Caisse  d'épargne  et  tout  déposant  déjà 
titulaire  d'un  livret  de  cette  nature,  peuvent  réa- 
liser, au  moyen  de  timbres-poste  de  5  et  de  10 
centimes,  le  versement  minimum   d'un  franc  ». 

Des  imprimés  spéciaux,  dits  «  bulletins  d'épar- 
gne » ,  divisés  en  rectangles  de  la  grandeur  des 


120  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS 

figurines,  sont  mis  gratuitement,  à  cet  effet,  à  la 
disposition  du  public  dans  les  bureaux  de  poste. 
Les  timbres-poste  sont  collés  sur  ces  bulletins  et, 
lorsque  la  valeur  totale  représente  un  franc,  le 
bulletin  est  reçu  comme  versement  à  la  Caisse 
d'épargne.  Il  ne  peut  être  versé  de  la  sorte  pour 
plus  de  lo  francs  par  mois  au  compte  de  la  même 
personne. 

Les  timbres-poste  servent  encore  à  effectuer, 
surtout  au  moyen  d'envois  dans  les  lettres,  le 
paiement  de  sommes  peu  importantes.  Le  troupier 
aime  assez,  malgré  la  difficulté  du  change,  ce 
mode  d'envoi,  qui  le  dispense  de  l'intermédiaire 
du  vaguemestre  nécessaire  pour  l'encaissement 
des  mandats  d'articles  d'argent,  et  le  soustrait  ainsi 
aux  tentatives  partageuses  de  la  chambrée.  Dans 
certains  pays,  en  cas  de  crise  monétaire,  le  timbre- 
poste  a  acquis  temporairement,  avec  l'adhésion 
du  gouvernement,  le  caractère  d'un  véritable 
papier-monnaie,  remboursable  par  les  Caisses  de 
l'État. 

La  Presse  s'était  beaucoup  occupée,  il  y  a  un 
an  environ,  de  la  création  d'un  timbre-poste 
international,  unique,  spécial  pour  les  envois  de 


HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS  121 

petites  sommes  dans  le  ressort  de  l'Union  postale. 
Tout  séduisant,  tout  simple  aussi  que  le  projet 
paraisse,  à  première  vue,  il  n'est  point  facilement 
réalisable  :  tout  papier-monnaie  aboutit  à  une 
réalisation  en  numéraire  et  il  serait  nécessaire  que 
l'oftice  d'émission,  qui  aurait  encaissé  le  montant 
de  la  figurine,  en  tînt  compte  à  l'office  qui  l'au- 
rait remboursé.  Il  est,  pour  cela,  indispensable 
que  les  timbres  se  distinguent,  ne  serait-ce  que 
par  l'indication  du  pays  d'émission  ;  nous  sortons, 
par  cette  indication,  du  timbre-poste  international 
unique  rêvé,  et  retombons  dans  le  timbre-poste. 
Un  mot  aussi  de  l'emploi  fantaisiste  du  timbre- 
poste  comme  ornementation  ;  on  en  a  recouvert  des 
objets  de  toutes  sortes  ;  on  en  a  fait  des  tableaux,  des 
tapisseries.  La  salle  des  nouvelles  du  Figaro  expo- 
sait tout  dernièrement  une  chasse  au  cerf  com- 
posée de  morceaux  de  figurines.  Le  Collectionneur 
de  timbres-poste  cite  une  salle  de  restaurant,  à 
l'Eden  de  Baie,  décorée  de  800  000  timbres  de 
tous  pays,  et,  à  Leipzig,  une  vaste  tapisserie  en 
timbres-poste,  représentant  Guillaume  L%  l'empe- 
reur Frédéric,  le  roi  de  Saxe  et  le  Chancelier  de 
fer,  tous  frappants  de  ressemblance,  ainsi  que  la 


122  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS 

Ger mania  de  la  Wacht  am  Rheim.  Enfin,  pour 
terminer  sur  une  idée  française,  ajoutons  que 
pendant  l'Exposition  de  1889,  on  voyait  à  Paris, 
chez  un  marchand  de  vins  de  la  rue  Lafayette,  la 
reproduction,  dans  des  proportions  inusitées,  du 
chef-d'œuvre  de  la  construction  métallurgique, 
de  la  Tour  Eiffel,  toute  recouverte  de  timbres- 
poste. 


II 

LES  COLLECTIONS 
ET  LES  COLLECTIONNEURS 


Des  collectionneurs  en  général. 

Lecteur,  êtes-vous  collectionneur? 

Supposons  la  négative.  Faut-il  vous  en  plaindre 
ou  vous  en  féliciter? 

D'une  part,  à  combien  de  préoccupations,  de 
soins,  de  recherches,  d'envies,  de  jalousies, 
n'échappez-vous  pas?  Mais,  d'un  autre  côté,  que 
d'émotions,  souvent  renouvelées  sans  perdre  de 
leur  vivacité,  vous  sont  inconnues  :  après  les 
patientes  investigations,  la  joie  de  la  trouvaille, 
l'anxiété  de  négociations  exigeant  parfois  des  pro- 
diges de  diplomatie;  finalement,  la  jouissance  de 

l'entrée  en  possession quand  ce  n'est  pas  une 

amère  déception. 


124  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS 

L'attachement  aux  objets  qui  nous  sont  fami- 
liers est  inné  en  nous;  il  a  été  de  tous  les  temps  et 
de  tous  les  peuples;  nous  en  trouvons  le  témoi- 
gnage dans  les  plus  antiques  sépultures  où,  par 
une  touchante  coutume  empreinte  du  respect  porté 
aux  morts,  l'on  enterrait  le  guerrier  avec  ses 
armes,  la  femme  avec  ses  ornements  primitifs, 
l'enfant  avec  ses  jouets  de  prédilection.  La  préoc- 
cupation de  collectionner  des  objets  préférés  est 
l'une  des  formes  de  la  manifestation  de  ce  senti- 
ment; reconnaissons  que  ce  goût  est  entaché 
d'égoïsme,  car,  pour  le  collectionneur,  rien  n'est 
de  posséder  un  objet  tout  beau  qu'il  soit,  si  cet 
objet  est  commun.  Mais  quel  prix  il  attache  à  une 
chose  rare  !  quel  triomphe,  s'il  a  mis  la  main  sur 
un  exemplaire  qu'il  est  seul  à  posséder,  que  ce  soit 
peinture,  livre,  autographe,  monnaie...,  ou  timbre- 
poste!  La  Bruyère,  dont  la  critique  vigoureuse  et 
acérée  a  pris  à  partie,  dans  ron  chapitre  sur  «  La 
Mode  »,  les  curieux  de  divers  genres,  le  curieux 
de  médailles,  le  curieux  d'estampes,  de  hvres, 
d'oiseaux,  etc.,  dépeint  ainsi  ce  sentiment  : 

<c  La   curiosité  n'est  pas  un  goût  pour  ce   qui 


HKSTOIRK    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS  125 

est  bon  ou  pour  ce  qui  est  beau,  mais  un  goût 
pour  ce  qui  est  rare,  unique,  pour  ce  qu'on  a  et 
que  les  autres  n'ont  point.  Ce  n'est  pas  un  atta- 
chement à  ce  qui  est  parfait,  mais  à  ce  qui  est 
couru,  à  ce  qui  est  à  la  mode.  Ce  n'est  pas  un 
amusement,  mais  une  passion,  et  souvent  si  vio- 
lente, qu'elle  ne  cède  à  Tamour  et  à  l'ambition 
que  par  la  petitesse  de  son  objet;  ce  n'est  pas  une 
passion  qu'on  a  généralement  pour  les  choses 
rares  et  qui  ont  cours,  mais  qu'on  a  seulement 
pour  une  chose  qui  est  rare,  et  pourtant  à  la 
mode.  » 

Des  gens  moroses  ont,  je  le  sais,  qualifié  de 
maniaques  les  collectionneurs.  Tout  beau,  mes- 
sieurs! Passe  encore  votre  dédain  quand  il  s'adresse 
à  des  originaux  appliquant  leurs  recherches  à  des 
objets  bizarres.  Ceux-là,  je  le  dis  avec  vous,  sont 
des  maniaques  qui,  sans  but  d'utilité,  sans  idée 
d'esthétique,  passent  leur  temps  à  réunir  des 
choses  plus  ou  moins  singulières.  J'ai  connu  une 
personne  collectionnant  des  bouteilles  de  toutes 
formes;  elle  en  avait  réuni  plusieurs  centaines;  une 
autre,   des  boutons,  ce  qui  serait  tout    au    plus 


120  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS 

admissible  pour  quelqu'un  du  métier;  enfin,  un 
original,  passant  sa  vie  sur  les  routes,  examinant 
un  à  un  les  cailloux  amoncelés,  pour  tâcher  d'en 
découvrir  de  formes  particulières,  plus  heureux 
qu'un  roi,  quand,  l'imagination  aidant,  il  en 
trouvait  un  ressemblant...  plus  ou  moins,  à  un 
fruit,  à  un  objet,,  à  un  animal! 

Mais,  quand  il  s'agit  de  documents  intéressants 
ou  de  raretés  artistiques,  il  ne  viendra  pas  à  l'es- 
prit d'une  personne  sensée  de  critiquer  l'applica- 
tion de  ceux  qui,  par  leurs  patientes  et  laborieuses 
recherches,  ont  sauvé  de  la  destruction  d'innom- 
brables et  inestimables  merveilles.  Allez  à  Saint- 
Germain  voir  revivre  l'époque  préhistorique  dans 
les  collections  rassemblées  par  M.  de  Mortillet; 
voyez  dans  les  galeries  du  Louvre  les  travaux 
géants,  remontant  à  des  milliers  d'années,  de 
l'Egypte  et  de  l'Assyrie;  regardez,  au  Musée  de 
Cluny,  les  chefs-d'œuvre  du  Moyen  Age  et  de  la 
Renaissance.  Pour  l'histoire  du  siècle,  à  com- 
mencer par  la  Révolution  française,  visitez  le 
Musée  Carnavalet.  Vous  ne  pourrez  vous  défendre 
d'un  sentiment  d'admiration  pour  ces  raretés  ins- 


HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS  12, J 

tructives,  de  reconnaissance  pour  ceux  qui  nous 
les  ont  conservées. 

Rendons  alors  justice  aux  collectionneurs,  aux 
fureteurs  éclairés;  gardons-nous  de  les  confondre 
avec  les  simples  curieux,  sacrifiant  à  la  mode 
plutôt  qu'au  goût;  mais  ne  méconnaissons  pas, 
toutefois,  que  ceux-ci  ont  souvent  aidé   ceux-là. 

L'inclination  à  collectionner  remonte  donc  aux 

époques  les  plus  reculées, aussi  loin   que   la 

coquetterie  féminine  :  nos  premières  mères, 
n'ayant  pas  à  leur  disposition  les  éblouissantes 
merveilles  de  la  rue  de  la  Paix,  recherchaient  cer- 
taines coquilles,  qu'elles  perforaient  et  réunis- 
saient pour  s'en  faire  des  colUers,  des  bracelets; 
elles  collectionnaient!  Pour  établir  que  ce  senti- 
ment, la  jalousie  de  posséder  les  choses  rares,  se 
perd  dans  la  nuit  des  temps,  nous  sommes  bien 
obligés  à  une  digression,  le  timbre-poste  n'étant 
pas  encore  à  son  demi-siècle,  et  la  mention,  dans 
l'opérette  de  la  Belle  Hélène,  d'une  excursion 
d'Oreste  à  la  petite  bourse  aux  timbres,  étant  de 
la  dernière  fantaisie. 

Nous  ne  traiterons   cependant    point   ici    des 
curiosités  artistiques  de  haut  goût,  chefs-d'œuvre 


128  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS 

de  la  peinture,  de  la  sculpture,  de  la  céramique, 
du  meuble;  cela  nous  mènerait  trop  loin.  Après 
avoir  rappelé  que,  dans  les  guerres  de  l'antiquité, 
la  première  chose  qui  suivait  la  victoire  était  le 
partage  du  butin,  partage  dans  lequel  les  objets 
précieux  étaient  vivement  disputés,  témoin  le  vase 
de  Soissons,  limitons-nous  aux  collections  en 
album  et  parlons  un  peu  d'un  genre  qui  nous  est 
particulièrement  cher  :  les  autographes. 

N'y  a-t-il  pas  un  sentiment  d'exquise  délicatesse 
à  conserver,  comme  pieuses  reliques,  l'écriture 
d'une  personne  aimée,  d'un  homme  illustre!  Lar- 
gius  Lucinius  offrit  400  000  sesterces  des  manus- 
crits de  Pline  l'Ancien,  et  le  bon  Montaigne  s'ex- 
prime ainsi,  parlant  de  ceux  dont  le  souvenir  lui 
est  doux  :  «  ]'en  conserve  l'escripture,  le  seing, 
les  heures,...  je  les  conserve  pour  l'amour  d'eux.  » 
Voilà  pour  le  cœur.  Quant  à  la  curiosité, 
je  vois,  dans  un  autographe,  le  produit  d'une 
partie  de  l'existence  de  celui  dont  il  émane, 
et  je  suis  heureux  de  songer  que  j'ai  là,  sous  la 
main,  quelques  minutes  de  la  vie  de  nos  grands 
hommes,  voire  de  célébrités  des  genres  les  plus 


HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS  I29 

divers,  les  hasards  du  classement  alphabétique 
amenant  tantôt  d'heureux  rapprochements  :  Bérat 
faisant  suite  à  Déranger;  Tamburini  à  Talma; 
tantôt  de  singuHers  contrastes  :  About  coudoyant 
Abd-el-Kader;  le  spirituel  et  gai  Labiche,  auprès 
de.....  Lacenaire;  Rouget  de  Lisle  avec  Rouher; 
George  Sand,  terrifiée  au  voisinage  de  l'exécuteur 
Sanson!  Et  quand  je  parcours  l'album  de  mes 
autographes,  la  mémoire  suivant  les  yeux  me  rap- 
pelle à  grandes  lignes  les  chefs-d'œuvre,  les  actes 
glorieux  ou  la  personnaUté  originale  de  leurs 
auteurs;  la  pensée  rapide  voit  défiler,  comme  dans 
une  magique  évocation,  les  célébrités  du  siècle  : 
Hugo,  Lamartine,  Lesseps,  Musset;  les  généraux 
des  jours  heureux,  et  aussi  les  grands  hommes 
qui,  par  leur  patriotisme  et  leur  valeur,  ont  adouci 
nos  plaies  vives  :  Gambetta,  Thiers,  Mac-Mahon, 
Faidherbe,  Chanzy. 

Des  collections  de  timbres-poste. 

Les  timbres-poste  ont  un  côté  commun  avec 
les  autographes  :  comme  ceux-ci,  ils  rappellent  à 
l'esprit  toute  une  série  de  personnages,  de  lieux. 


l30  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS 

de  temps,  de  faits,  constituant  une  véritable  ency- 
clopédie. Nous  y  trouvons,  en  effet  : 

En  premier  lieu,  une  galerie  de  souverains;  les 
portraits  d'une  centaine  de  rois,  de  reines,  de  pré- 
sidents de  tous  âges,  depuis  la  reine  Victoria,  qui 
a  inauguré  le  timbre-poste  il  y  a  tantôt  cinquante 
ans,  si  gracieusement  représentée  sur  les  timbres 
des  colonies  anglaises  de  1857  à  1860,  Grenade, 
Natal,  Queensland,  etc.,  jusqu'au  bébé  royal 
d'Espagne;  de  tous  pays,  depuis  nos  souverains 
européens  jusqu'aux  types  étranges  des  contrées 
lointaines,  radjahs  de  l'Inde,  rois  et  reines 
d'Hawaï.  Nous  avons  même,  articles  de  fantaisie, 
des  timbres-poste  à  l'effigie  de  prétendants;  des 
timbres-poste  d'un  prétendu  royaume,  les  Se- 
dangs. 

Les  armes  de  certaines  nations  :  Allemagne, 
Danemark,  Russie,  etc..  et  des  allégories  :  France, 
Suisse  et  certaines  colonies  anglaises  notamment. 

Pour  d'autres  pays,  un  simple  chiffre  indicatif 
de  la  valeur;  cette  forme,  simple  entre  toutes,  est 
plutôt  adoptée  pour  les  chiffres-taxes. 

Des  paysages  :  Libéria,  Nouvelle -Galles  du 
Sud,  Paraguay. 


HISTOIRE    DU     TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS  l3l 


-rtru-L'-ir-.-Ln.-', 


"  u~i-n-rvj  "v_n  r* 
Fi  g.  25. 


Fig.  2(3. 
Nouvelle-Galle?  du    Sud. 


Fig.  27.  —  Duché 
de  Brunswick. 


Fi.çr.  28.  —  Canada. 


Fig.  29.  —  Etats-Unis. 


Fig.  31.  —  Nouveau-       Fig.  32.— Nouvelle- 
Fig.  30.  —  Tasmanie.  Brunswick.  Galles,  Sydney. 


l32  HISTOIRE   DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS 


-»  _r  _^J^.'^-  '-"—'-', 


Fier.  33.    —  Samoa. 


Fig,  3-i.  —  Orange.  Fig.  35.  —  Nicaragua. 


rtnn  ".rt/vua 


Fig.  36,  —  Australie 
occidentale. 


Fig.  37.  —  Egypte. 


l'  •'^\.r\j-\j-.j-^^-\j~\j-^,r^n 


Fig.  38.  —  Nouveau- 
Brunswick. 


Fie.39.  — Gualemala.  Fig.  iO.  — Japon. 


HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS  l33 


Fig.  41.  —  Panama. 


Fig.  42.  —  Nouvelle-Galles 
du  Sud. 


\^  v_?-i>y  KJXy^^-y  KJ\^ 


g   lat^*i»g»»tw't<>fO»,-« 


f\àr\i'\r\r\y^'~\r\r^(-\r\jr 


Fig.  43.  —  Terre-Neuve. 


Fig.  44,  —  Terre-Neuve. 


ru-u-yu-, 


Fis.  45.  —  Etats-Unis. 


Fig.  46.  —  Étals-Unis. 


l34  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE   FRANÇAIS 

Les  accidents  naturels  :  la  Bolivie,  le  Nicaragua, 
San  Salvador,  avec  leurs  volcans. 

Les  grands  travaux  de  l'antiquité  :  les  pyra- 
mides, les  sphinx  et  les  obélisques  égyptiens. 

Des  pays  ont  fait  entrer  dans  la  composition  de 
leurs  timbres-poste  les  animaux  ou  les  plantes  qui 
les  distinguent  ou  constituent  des  éléments  de 
prospérité;  dans  le  premier  de  ces  genres,  le  cygne 
de  l'Australie,  le  castor  du  Canada,  le  quetzal  du 
Guatemala,  le  lama  du  Pérou,  Tornithorynque  de 
la  Tasmanie,  le  kanguroo  et  l'émou  de  la  Nou- 
velle-Galles du  Sud,  le  chien  et  le  phoque  de  Terre- 
Neuve;  dans  le  second,  le  chrysanthème  du  Japon, 
le  palmier  de  Samoa,  Toranger  d'... Orange,  la 
fleur  du  Rigi.  Les  animaux  qui  sont  les  chefs  de 
leur  race  sont  pris  dans  le  sens  allégorique  :  le 
lion,  l'aigle,  l'ours. 

Les  astres  ont  leur  part  :  le  soleil  et  les  étoiles, 
ces  dernières  venant  dans  plusieurs  États  en 
représentation  des  pays  confédérés,  et  en  nombre 
égal  :  13  sur  d'anciens  timbres  des  États-Unis 
d'Amérique,  9  pour  la  Colombie,  21  pour  la 
nouvelle  République  Brésilienne,  22  (nombre  des 
cantons)  sur  le  chiiïre-taxe  de  la  Suisse. 


HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS  :  35 

Nous  y  rencontrons  encore  l'image  des  divers 
modes  de  transport  des  correspondances  ;  un 
piéton  à  la  course  sur  le  timbre  d'exprès  des  États- 
Unis;  le  cheval,  libre  dans  le  Brunswick,  monté 
par  un  courrier,  dans  les  États-Unis;  la  locomo- 
tive, aux  États-Unis  et  au  Nouveau-Brunswick; 
le  navire  :  à  voiles  pour  Buenos-Ayres,  la  Guyane 
anglaise,  Terre-Neuve;  à  vapeur  pour  le  Nouveau- 
Brunswick,  le  Paraguay,  le  Pérou,  Saint-Thomas. 

Les  timbres-poste  de  Flnde,  de  la  Chine,  du 
Japon,  nous  offrent  de  curieux  spécimens  d'écri- 
ture et  d'animaux  fantastiques. 

Citons  comme  séries  particulièrement  intéres- 
santes et  variées,  deux  émissions  des  États-Unis 
d'Amérique  : 

1°  Celle  de  1869,  composée  :  des  bustes  de 
Franklin  (i  cent),  de  Washington  (6  cents)  et  de 
Lincoln  (90  cents);  des  Armes  surmontées  d'un 
aigle  (10  et  30  cents);  d'un  coursier  à  cheval 
lancé  au  grand  galop  dans  la  steppe  (2  cents); 
d'une  locomotive  (3  cents);  d'un  steamer,  véri- 
table marine  en  miniature  (12  cents),  et  de  deux 
grandes  scènes  de  l'histoire  américaine  :  le  débar- 
quement de  Christophe  Colomb   (15    cents)   et 


r36  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS 

la  séance  de  la  déclaration  de  l'Indépendance 
(24  cents);  en  somme,  autant  de  chefs-d'œuvre 
de  gravure.  L'artiste  qui  a  exécuté  le  prototype 
de  ce  dernier  timbre  y  a  passé  plusieurs  années; 
aussi,  quelle  merveilleuse  finesse  dans  les  moindres 
détails!  C'est,  à  notre  avis,  le  plus  beau  de  tous 
les  timbres-poste. 

2°  Les  24  timbres  imprimés  de  l'émission  de 
1875;  ces  figurines  ont  été  employées  surtout 
comme  papier-monnaie.  Elles  représentent  :  de 
I  à  10  cents,  la  statue  de  l'Amérique,  placée 
sur  le  dôme  du  Capitole  national  ;  de  12  a 
96  cents,  Astrée  (la  Justice);  celles  de  i  dollar 
92  cents,  Cérès  (l'Agriculture)  ;  de  3  dollars,  la 
Victoire;  de  6,  Clio  (l'Histoire);  de  9,  Minerve 
(la  Sagesse  et  la  Guerre);  de  12,  Vesta  (le  bonheur 
domestique);  de  24,  la  Paix;  de  36,  le  Com- 
merce; de  48,  Hébé  (la  Jeunesse  et  la  Beauté); 
enfin,  de  60  dollars  (300  fi'ancs) ,  Minnehaha, 
héroïne  du  poète  national  Longfellovvr.  Très  jolie 
collection,     dont    le    seul    tort    est    de    coûter 

I  200  francs Je  me  hâte  d'ajouter  qu'on  se  la 

procure  en  fac-similé  de  belle  imitation  pour 

moins  d'un  franc. 


HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS  I  Sj 

L'émission  du  centenaire  (1889)  de  la  fondation 
de  la  Colonie  anglaise  de  la  Nouvelle-Galles  du 
Sud  mérite  aussi  une  mention  spéciale.  Au  con- 
cours institué  à  cet  effet  ont  pris  part  de  200  à 
300  artistes  qui  ont  déposé  un  millier  de  projets. 
Les  types  adoptés  nous  donnent  :  le  i  penny,  le 
paysage  de  Sydney;  le  2  pence,  un  émou;  le 
4  pence,  le  capitaine  Cook  avec  armes  et,  en 
petit,  un  émou  et  un  kanguroo;  le  6  pence,  la 
reine  Victoria  et  des  armes;  le  8  pence,  un  oiseau- 
lyre;  le  I  shilling,  un  kanguroo;  le  5  shillings, 
une  carte  de  l'Australie,  et  le  20  shillings,  deux 
gouverneurs  généraux  :  Carrington,  celui  de  la 
fondation  (1788),  et  Philip  (1888).  Chacun  de  ces 
limbres'poste  porte,  outre  l'indication,  en  toutes 
lettres,  du  pays  et  de  la  valeur,  l'inscription  «  one 
hundred  Years  »  :  un  siècle. 

Les  timbres  ne  sont  pas  moins  variés  dans  la 
forme  que  dans  le  sujet.  Ils  sont  rectangulaires 
pour  la  très  grande  majorité;  mais  nous  en  trou- 
vons aussi  des  triangulaires  au  Cap  de  Bonne- 
Espérance,  à  Terre-Neuve,  dans  la  Colombie;  un 
circulaire  à  la  Nouvelle-Galles  du  Sud;  dés  hexa- 
gonaux  (Nouvelle -Galles    du    Sud,   Belgique   et 


l38  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS 

Pays-Bas  —  Télégraphe);  des  octogones  (Victoria). 
Il  en  est  de  grandes  dimensions,  en  Perse  notam- 
ment, sans  parler  des  timbres  d'imprimés  des  États- 
Unis  i86'6;  les  plus  étroits,  ayant  à  peine  un  cen- 
timètre en  ce  sens,  se  rencontrent  dans  Victoria  et 
l'Australie  du  Sud.  Deux  timbres,  d'Espagne  et 
de  Mecklembourg,  se  subdivisent  par  quarts  de 
leur  valeur. 

Nous  avons  des  timbres-poste  lithographies  et 
des  typographies;  le  Portugal  et  Héligoland  dans 
leurs  timbres-poste  et,  dans  leurs  enveloppes,  un 
grand  nombre  de  pays,  nous  donnent  des  reliefs 
parfois  d'un  charmant  effet;  à  citer  les  enve- 
loppes du  Guatemala. 

Voilà  pour  le  timbre-poste  en  lui-même.  Parlons 
maintenant  des  différentes  formes  sous  lesquelles, 
au  hasard  de  la  trouvaille,  il  prend  place  dans  nos 
collections:  neuf  intact;  en  spécimen;  réimprimé; 
oblitéré;  surchargé;  transformé;  provisoire;  en 
fac-similé. 

En  grande  majorité,  les  collectionneurs  préfè- 
rent le  timbre  neuf;  il  est  toujours  plus  net,  d'un 
meilleur  effet;   ceux  qui  font  exception  recher- 


HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS  l3g 

client  dans  roblitération  une  garantie  d'authen- 
ticité. 

Les  spécimens  sont  des  timbres  neufs  frappés 
d'un  mot,  le  plus  souvent  le  mot  «■  spécimen  » 
même.  Cette  disposition,  prise  à  l'égard  de  figu- 
rines échano^ées  entre  administrations  ou  vendues 
au  rabais  à  destination  des  collections,  a  pour 
objet  d'en  empêcher  l'emploi  en  affranchissement; 
elle  s'explique  lorsqu'elle  porte  sur  des  timbres  qui 
valent  jusqu'à  20  shillings  (25  francs),  jusqu'à 
60  dollars  {300  francs). 

Les  réimpressions  sont  le  produit  du  tirage  de 
figurines  qui  ont  cessé  d'avoir  cours;  elles  présen- 
tent généralement  quelque  différence  sur  les  ori- 
ginaux, soit  dans  la  nuance  du  timbre,  soit  dans 
la  nature  du  papier. 

Rappelons  ici  que  l'oblitération  consiste  dans 
l'apposition  d'un  timbre  d'annulation. 

Les  surcharges  ont  pour  objet,  soit  de  modifier 
la  valeur  nominale  des  timbres  lorsque  certaines 
catégories  font  momentanément  défaut,  notam- 
ment dans  les  colonies  éloignées  de  leur  métro- 
pole, soit  de  leur  donner  une  affectation  spéciale 
en  les  réservant  pour  la  correspondance  de  service. 


140  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS 

En  cas  de  pénurie,  des  timbres  fiscaux,  des  tim- 
bres de  chemin  de  fer,  des  chiffres-taxes  ont  été, 
à  l'aide  de  surcharges,  transformés  en  timbres- 
poste  par  mesures  temporaires. 

Les  timbres  provisoires  sont  des  figurines  impro- 
visées pour  remplacer,  par  expédient,  les  timbres 
normaux  manquants. 

Enfin,    les  fac-similé   sont    des    imitations 

avouées. 

Dans  les  premiers  mois  de  1889,  on  a  dû 
recourir,  au  Gabon,  à  toute  une  série  de  disposi- 
tions exceptionnelles  assez  curieuses,  résumant  les 
circonstances  dans  lesquelles  il  est  recouru  aux 
surcharges,  aux  transformations,  aux  timbres  pro- 
visoires. 

Un  approvisionnement  des  timbres-poste  com- 
muns à  toutes  les  Colonies  françaises,  envoyé 
de  la  métropole,  était  tombé  à  la  mer,  lors  du 
déchargement  du  navire  le  Brave.  Un  second 
envoi,  fait  par  la  Violette,  fut  volé  par  un  nègre 
et,  vraisemblablement,  détruit  par  lui,  sous  le 
coup  du  désappointement  qu'il  éprouva  en  con- 
statant le  contenu  de  la  caisse  dérobée.  Trois 
envois    successifs    dans    notre    colonie    sud-afri- 


HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS  14! 

Cciine  demandent  beaucoup  de  temps  et,  dans 
l'intervalle,  se  produisit  une  extrême  pénurie.  Le 
gouvernement  local  s'en  tira  par  les  mesures  admi- 
nistratives suivantes,  prises  sur  la  proposition  du 
directeur  de  l'Intérieur  : 

«  Un  arrêté  du  28  décembre  1888,  visant  la 
perte,  par  cas  de  force  majeure,  des  envois  faits  par 
le  Brave  et  la  Violette,  autorise  la  transformation, 
par  surcharge,  de  4  000  timbres  à  5  centimes  en 
timbres  à  25  centimes.  »  On  prévoit  la  spéculation 
sur  ces  raretés  et  l'arrêté  spécifie  que  les  affran- 
chissements pour  l'extérieur  seront  opérés  exclu- 
sivement au  guichet,  la  vente  de  figurines  qui  ne 
seraient  pas  employées  séance  tenante  étant  pro- 
hibée; cette  précaution  devient  illusoire  pour  cer- 
taines personnes,  qui  déposent  en  même  temps 
de  nombreuses  enveloppes  à  l'adresse  d'un  même 
destinataire.  En  outre,  et  pour  ménager  les  réser- 
ves, les  affranchissements  pour  l'intérieur  du  pays 
sont  opérés  en  numéraire  et  •  constatés  par  la 
simple  apposition  dun  timbre  humide. 

Les  4  000  timbres  sont  bientôt  épuisés  et  il  faut 
recourir  successivement  à  de  nouvelles  sur- 
charges : 


142  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS 

Arrêté  du  7  février  1889  :  surcharge,  en  25  cen- 
times de  1 000  timbres  à  75  centimes,  et,  en 
15  centimes,  de  i  200  timbres  à  i  franc. 

Arrêté  du  8  mars  suivant  :  surcharge,  en 
25  centimes  de  800  timbres  à  10  centimes,  et,  en 
15  centimes,  de  400  timbres  à  10  centimes. 

Les  timbres-poste  sont  épuisés;  les  surcharges 
ont  donné  tout  ce  qu'on  pouvait  en  retirer;  on 
recourt  alors  aux  chiffres-taxes,  que  l'on  transforme, 
par  l'inscription,  en  caractères  d'imprimerie,  du 
mot  Gabon  dans  la  partie  supérieure  du  mot 
Timbre  au  miUeu  de  la  figurine,  et  du  chiffre  indi- 
catif de  la  valeur  2j  ou  //,  dans  le  bas.  Sont 
transformés  dans  ces  conditions  : 

Par  arrêté  du  27  mars  1889,  i  500  chiffres- 
taxes  de  20  centimes  en  timbres  à  25  centimes  et 
I  500  chiffres-taxes  de  5  centimes  en  timbres  à 
15  centimes. 

Par  arrêté  du  16  avril  1889,  i  200  chiffres-taxes 
de  20  centimes  en  timbres  à  25  centimes,  et 
par  arrêté  du  i^^^'mai  suivant,  i  500  nouveaux  chif- 
fres-taxes de  20  centimes  en  timbres  à  25  cen- 
times et  250  chiffres-taxes  de  30  centimes  en 
timbres  à  15  centimes. 


HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS  148 

On  a  fait  flèche  de  tout  bois...  et  le  bois  est 
épuisé.  Au  cours  du  mois  de  mai,  on  crée  un  timbre- 
poste  provisoire.  C'est  un  rectangle  oblong  encadré 
par  une  simple  ligne,  de  25  millimètres  de  largeur 
sur  21  de  hauteur;  en  diagonale,  entre  deux  lignes 
de  l'angle  gauche  supérieur,  à  l'angle  droit  infé- 
rieur :  République  Française',  dans  le  triangle  supé- 
rieur limité  par  la  diagonale  Gabon-Congo  et  au- 
dessous  Pc?^/^^  ;  dans  le  triangle  inférieur,  la  valeur 
2j  ou  i^.  Ce  timbre  provisoire  est  imprimé  en 
noir  sur  papier  :  vert  pour  les  timbres  à  25  cen- 
times, rose  pour  les  timbres  à  15  centimes. 

Enfin,  les  timbres-poste  coloniaux,  tant  atten- 
dus, arrivent,  et  les  choses  rentrent  dans  Tordre 
normal. 

Voyons  quelles  sont,  pour  les  collectionneurs, 
les  conséquences  de  semblables  événements  :  ces 
timbres  accidentels  acquièrent  une  valeur  inverse- 
ment proportionnée  aux  quantités  émises,  résultat 
de  la  rareté  relative.  Il  a  été  émis,  au  total,  au 
Gabon  : 

4000  timbres  à  5  centimes  surchargés  25  ;  ils 
se  vendaient  d'abord  5  francs  pièce. 


144  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS 

I  000  timbres  de  75  centimes  surchargés  25  ; 
catalogués  12  francs. 

800  de  10  centimes  surchargés  25,  catalogués 
jusqu'à  20  francs. 

Les  chiffres-taxes  de  20  centimes  transformés 
en  timbrés  à  25,  ainsi  que  les  timbres  provisoires 
vendus  librement  et  employés  en  assez  grand 
nombre,  ont  valu  jusqu'à  5  francs  pièce. 

Les  valeurs  transformées  en  1 5  centimes  pres- 
que exclusivement  apposées  sur  des  correspon- 
dances qui  ne  sont  pas  sorties  du  pays,  sont  for- 
cément plus  rares  et  plus  recherchées  encore  ;  les 
timbres  à  10  centimes  au  nombre  de  400,  et  les 
chiffres-taxes  (250  seulement),  surchargés  les  uns 
et  les  autres  15  centimes,  sont  presque  introu- 
vables. 

Mais  les  prix  de  début  n'ont  pas  tenu,  tant  s'en 
faut;  on  trouve  de  ces  figurines,  beaucoup  plus 
qu'on  n'en  a  fait,  authentiques...  et  autres  parfai- 
tement imitées. 

La  vogue  des  collections  de  timbres-poste, 
véritable  passion,  qui  compte  dans  tous  les  pays 
du  monde  des  miUiers  d'adeptes,  a  donné  nais- 
sance, par  voie  de  suffixes,  à  des  expressions  nou- 


HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE   FRANÇAIS  I45 

velles  auxquelles  il  ne  manque  que  la  consé- 
cration académique  :  nous  avons  les  sociétés  de 
Timbrologie  et  les  Timbrophiles  ;  la  Philatélie  et  les 
Philatélistes  ;  les  profanes  disent  sans  ménagement 
Timhromanie  et  Timbromanes;  ils  affirment  que 
La  Bruyère  aurait  eu  beau  jeu  avec  le  Curieux  de 
timbres-poste,  surtout  avec  les  collectionneurs  qui 
établissent  des  distinctions  basées  sur  une  ligne, 
sur  la  nature  du  papier,  sur  la  nuance,  variant  tou- 
jours un  peu,  pour  qui  a  la  rétine  suffisamment 
délicate,  d'un  tirage  à  l'autre  selon  le  dosage  des 
couleurs,  sur  la  nature  du  pointillé  et  le  nombre 
des  perforations  qui  le  forment.  C'est  vérita- 
blement un  peu  de  chinoiserie  que  de  trouver 
que  votre  collection  de  cartes  postales  françaises 
est  incomplète  si,  à  côté  de  celle  qui  présente  la 
mention  :  ce  côté  est  réservé  exclusivement  à  Fadresse, 
vous  n'en  avez  une  autre  identique,  à  cette  seule 
différence  près,  qu'elle  porte  :  ce  côté  est  exclusive- 
ment réservé  à  l'adresse.  Et  si  le  typographe,  par 
une  légère  erreur,  a  employé. un  e  pour  un  é.», 
bon,  encore  une  variété  ! 

Il  existe,  en  France,  plusieurs  sociétés  d'ama- 
teurs de  timbres-poste. 

10 


146  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS 

Mentionnons  tout  particulièrement  la  Société  fran- 
çaise de  Timbrologie,  qui,  en  1878,  a  organisé  un 
congrès  international  \  dont  le  Président  est 
M.  Donatis  et  le  Secrétaire,  M.  le  D""  A.  Legrand. 
Elle  a  une  sainte  horreur  des  faux  timbres  et 
de  ceux  qui  en  font  commerce.  Ses  réunions 
ont  lieu  mensuellement.  Elle  publie  un  bul- 
letin depuis  1875.  Citons,  parmi  ses  membres, 
MM.  de  Ferrari,  de  Bosredon,  Mirabaud,  Le 
Roy  d'Étiolles,  Langlois,  de  Rosny,  Berger- 
Levrault. 

Les  journaux  sont  nombreux. 

A  Paris  : 

L'Ami  des  Timbres,  de  M.  Roussin,  publie, 
depuis  dix-huit  ans,  le  catalogue  le  plus  com- 
plet; 

Le  Collectionneur  de  Timbres-poste,  de  M.  Maury, 
dont  la  réputation  n'est  plus  à  faire  ; 

LEcho  de  la  Timbrologie^  dirigé  par  MM.  Frémy 
et  Hoffmann  ; 

La  Revue  Philatélique  (organe  de  la  Société  du 

i.  Mémoires  du  Congrès  international  des  Timbrophiles^ 
Paris,   in-S"  carré. 


HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS  I47 

même  nom),  de  MM.  Victor  Robert  et  Vervelle; 

La  Carte  postale,  de  M.  Schœller. 

A  Bruxelles,  le  Timbre- Poste,  de  M.  J.-B.  Moens, 
qui  est  l'éditeur  de  nombreuses  publications  spé- 
ciales très  estimées  des  érudits. 

A  notre  merveilleuse  Exposition  universelle  de 
1889,  l'Administration  des  Postes  et  des  Télégra- 
phes de  France  avait  consacré,  dans  son  pavillon, 
une  vitrine  aux  timbres-poste  et  à  leur  fabrication  ; 
prototypes,  clichés,...  etc.  Un  certain  nombre  de 
nations  avaient  exposé  leurs  timbres  ou  des  docu- 
ments s'y  rapportant  :  Bolivie,  Haïti,  Hawaï, 
Luxembourg,  Mexique,  Nicaragua,  Portugal,  Sal- 
vador, TransM^aal.  Mais  notre  figurine  est  d'impor- 
tance à  comporter  des  expositions  spéciales  :  il 
s'en  est  tenu  une  à  Anvers,  la  première,  du  i^""  au 
15  mai  1887;  on  y  trouvait  de  riches  collections, 
des  éditions  d'albums,  des  tapisseries  et  des 
tableaux  dont  les  couleurs  étaient  exclusivement 
composées  de  timbres-poste  et  de  fragments  de 
timbres;  des  meubles  recouverts  en  entier  de  figu- 
rines,... etc.  Une  autre,  qui  vient  de  se  tenir  à 
Vienne,  a  été  close  le  4  mai  1890.  Enfin  l'Angle- 
terre, berceau  du  timbre-poste,  a  eu   son   expo- 


148  HISTOIRE   DU    TIMBRE-POSTE   FRANÇAIS 

sition  postale  pour  célébrer  le  cinquantenaire  de  la 
petite  estampe. 

En  1867,  M.  Pierre  Zaccone  estimait  à  2  000  le 
nombre  de  timbres-poste  parus  jusque-là;  ce 
nombre  est  bien  aujourd'hui  de  3  à  4  fois  plus 
considérable,  en  ne  parlant  que  des  timbres-poste 
proprement  dits,  des  chiffres-taxes  et  des  timbres- 
télégraphe  ,  non  compris  les  cartes  postales,  les 
enveloppes  timbrées,...  etc.  Pour  le  collectionneur 
débutant,  la  tâche  est  facile  et  peu  coûteuse  jusqu'à 
I  200  ou  I  500  variétés;  mais  alors,  difficulté  et 
dépense  deviennent  plus  sérieuses  pour  aller  tou- 
jours en  s'accroissant. 

Le  roi  des  collectionneurs  est...  un  collection- 
neur impérial,  Sa  Majesté  l'Empereur  de  Russie; 
il  faut  remarquer  que  cet  auguste  souverain  a,  à  sa 
disposition,  des  moyens  d'action  qui  ne  sont  pas 
à  la  portée  du  vulgaire. 

A  citer  particulièrement,  pour  la  France,  la  col- 
lection de  M.  de  Ferrari  (estimée  à  2  millions  1/2), 
celle  de  M.  de  Rothschild  et  celle  de  M.  le  D""  Le- 
grand  qui  compte  200  000  timbres  postaux  ou 
fiscaux.  Le  premier  de  ces  Messieurs,  un  docte 
professeur,  occupe  plusieurs  personnes  à  l'admi- 


HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS  I49 

nistration  de  sa  collection,  qui  a  Timportance  d'une 
bibliothèque.  Dans  certains  cas,  ce  n'est  point  par 
exemplaires,  mais  par  feuilles  entières  que  pro- 
.  cèdent  ces  fastueux  amateurs. 

Le  champ  principal  de  l'approvisionnement  du 
commun  des  collectionneurs  est  le  magasin  des 
marchands  spéciaux.  Quantité  de  succursales  sont 
érabHes,  au  moyen  de  dépôts,  chez  des  débitants 
de  tabac  et  des  papetiers;  la  vérité  nous  force  à 
dire  que,  dans  ces  dépôts,  les  timbres  faux  sont 
nombreux. 

Mais  comment  les  marchands  s'approvision- 
nent-ils eux-mêmes?  Par  l'achat  de  collections, 
et  principalement  au  moyen  des  relations  entre- 
tenues dans  tous  les  pays  du  monde,  oii  chacun 
d'eux  a  ses  représentants. 

Parlons  maintenant  d'un  petit  coin  de  Paris, 
bien  connu  des  collectionneurs  et  qui,  deux  fois 
par  semaine,  le  dimanche  et  le  jeudi,  prend  un 
aspect  particulier  et  une  animation  inaccoutumée 
capable  d'intriguer  le  promeneur  non  initié.  C'est 
aux  Champs-Elysées,  derrière  le  cirque  d'Été, 
au  débouché  de  l'avenue  de  Marigny.  A  partir 
de    deux  heures,   bravant  les   ardeurs    du    soleil 


I  5o  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS 

aussi  bien  que  les  rigueurs  de  l'hiver,  arrivent,  de 
toutes  directions,  amateurs  et  marchands;  des 
groupes  se  forment,  les  albums  s'ouvrent,  les 
transactions  commencent;  une  demi-heure  plus 
tard,  le  marché  bat  son  plein  :  c'est  la  Bourse  aux 
timbres-poste.  Là,  comme  à  la  Bourse  des  valeurs 
financières,  il  y  a  la  hausse  et  la  baisse,  mais  les 
événements  politiques  y  produisent  les  variations 
opposées;  la  chute  d'un  empire,  le  renversement 
d'un  gouvernement,  la  mort  d'un  souverain  font 
tomber  le  cours  des  valeurs  du  pays;  c'est  la 
hausse  pour  les  timbres-poste,  qui  vont  passer 
dans  la  catégorie  plus  recherchée  des  anciennes 
émissions.  La  spéculation  fait  des  siennes;  ici 
comme  là-bas,  la  finesse^  l'habileté,  la  ruse  jouent 

leur  rôle;  il  y  a  des  naïfs  et les  autres,  les 

pigeons  et  ceux  qui  les  plument.  Les  affaires  se 
font  généralement  au  comptant;  Taléa  consiste 
principalement  dans  les  trouvailles.  Il  n'est  pas 
rare  de  rencontrer  tel  timbre  fort  recherché  dans 
l'album  commencé  par  des  amateurs  à  qui  la  vertu 

de  persistance  a  fait  défaut potaches  pour  la 

plupart,  qui,  avec  l'inconstance  et  l'imprudence 
excusables  à  leur  âge,  viennent  solder,  au  détri- 


HISTOIKE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS  l5l 

ment  d'un  estomac  encore  peu  familiarisé  avec  les 
âcretés  de  la  nicotine,  un  commencement  de  col- 
lection pour  se  procurer  quelques  cigares 

A  la  Bourse  aux  timbres-poste,  on  fait  aussi  du 
bric-à-brac  :  achat,  vente,  échange!  Mais  prenons 
bien  garde,   comme  parfois  sous   le  Temple  de 
Plutus,  les  valeurs  produites  sur  le   marché   ne 
sont  pas  toutes  d'une  irréprochable  authenticité; 
on  ne  peut  pourtant  pas  y  placer  des  agents  de 
change  assermentés!   Aussi,   à  côté   du  débutant 
qui  va  payer  son  inexpérience,  voyez  avec  quelle 
méticuleuse  attention  cet  amateur  aussi  méfiant 
que    passionné   examine   à    la   loupe   la    figurine 
rarissime  qui  lui  manque,  qu'il  convoite  ardem- 
ment, mais  qu'il  n'achètera  pas  à  la  légère.  Le 
sentiment  qu'il  éprouve,  par  rapport  à  ce  timbre- 
poste  qui  lui  fait  défaut,  est  une  sorte  d'obsession. 
La  Bruyère,  que  nous  avons  déjà  cité  au  commen- 
cement de  ce  chapitre,  l'exprime  ainsi,  parlant  du 
curieux  de  médailles  :  «  11  a  une  tablette  dont  toutes 
les  places  sont  garnies,  à  l'exception  d'une  seule; 
ce  vide  lui  blesse  la  vue  et  c'est  précisément  et  à 
la  lettre  pour  le  remplir  qu'il  emploie  son  bien  et 
sa  vie  ». 


l52  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS 

La  Bourse  aux  timbres  a  ses  catastrophes,  ses 
krachs  et  ses  coups  de  fortune,...  toutes  propor- 
tions gardées.  Ecoutez  Sardou  dans  la  Famille 
Benoiton  : 

Champrosé  a  pris  à  tâche  l'étude  du  caractère  de 
Benoiton,  de  cette  famille  fin  de  siècle  (déjà....  en 
i865!)  où  les  pères  n'ont  qu'une  visée  :  faire  de 
leurs  enfants  des  gagneurs  d'argent,  des  hommes.... 
en  zinc;  leur  mettre  un  barème  à  la  place  du 
cœur.  Il  en  est  à  Fanfan  Benoiton  (six  ans),  un 
futur  membre  du  Potacli  Club  !  Madame  Benoiton 
est  sortie....  comme  toujours. 

Champrosé.  —  Et  pourquoi  ne  sortez-vous  pas  avec  elle? 

Fanfan,  avec  importance.  —  Oh  !  parce  que  je  ne  peux 
pas  sortir  à  cette  heure-ci. 

Champrosé.  —  A  cause  de.... 

Fanfan.  —  A  cause  de  mes  affaires. 

Champrosé.  —  Vos  aff'aires? 

Fanfan.  —  Oui,  il  faut  que  j'aille  tout  à  l'heure  à  la 
Bourse! 

Champrosé,  ahuri.  —  Il  va  à  la  Bourse!  {A  Fanfan.)  Quelle 
Bourse.'' 

Fanfan,  montrant  la  fenêtre.  —  Eh  bien!  dans  le  parc!... 
Tu  sais  bien,  là  oii  il  y  a  le  marchand  de  gaufres!  C'est 
la  petite  Bourse? 

Champrosé.  —  De  quoi? 

Fanfan.  —  Mais....  de  timbres-poste (Il  ne  sait  donc 

rien?)  Tu  ne  sais  rien  donc?...  C'est  le  petit  Musot,  le 
grand  Lasalle  et  moi,  qui  avons  organisé  ça....  comme  aux 
Tuileries!... 

Champrosé,  ahuri.  —  Stupéfiant  ce  jeune  être!  —  (A  Fan- 
fan.) Alors  vous  vous  réunissez  comme  ça 

Fanfan.  —  A  deux  heures,  et  c'est  nous  qui  menons  le 


HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS  l53 

marché....  Vous  comprenez....  parce  que  nous  avons  des 
timbres  de  partout,  à  cause  de  nos  papas!...  Alors,  nous 
nous  entendons  tous  les  trois,  et  les  petits  boursiers  du 
pays....  {Riant.)  nous  les  roulons! 

Champrosé.  —  Abrutissant! 

Fanfan.  —  Je  viens  de  faire  un  joli  mois,  monsieur.... 
à  cause  des  affaires  d'Amérique! 

Champrosé.  —  Ah!  ah!  Comment  ça?.... 

Fanfan.  —  Papa  me  dit  un  jour  en  arrivant  :  '(  Fanfan, 
les  Fédéraux  sont  vainqueurs....  Marche  là-dessus  !...  »  Moi, 
je  vas  à  la  Bourse,  j'achète  tous  les  Sud  qui  étaient  sur  la 
place,  contre  mes  Anglais  et  mes  Italiens....  Bibi  Lasalle, 
qui  ne  savait  pas  ça,  disait  :  «  Est-il  jobard,  ce  Fanfan, 
d'accaparer  comme  ça  tous  les  Sud!...  mais  à  quatre 
heures,  qu'est-ce  qui  a  fait  une  tête....  quand  on  a  su 
qu'il  n'y  aurait  plus  de  timbres  séparatistes!  J'ai  revendu 
les  miens  avec  un  bénéhcel...  Ils  rageaient,  les  autres.... 
Ah!  Ils  ne  sont  pas  de  force!  » 


Mais  la  fortune  est  inconstante  :  après  le  succès 
le  déboire!  La  scène  change  : 

Benoiton  père.  —  Voilà  Fanfan!  oh!  cette  hgure! 
Qu'est-ce  que  tu  as.'' 

Fanfan.  —  J'ai  que  tu  m'as  fait  jouer  à  la  hausse  et  que 
j'ai  tout  perdu!...  tous  mes  timbres,  les  bleus,  les  verts, 
les  rouges!  {Il  fond  en  larmes!) 

Benoiton.  —  Mais,  petit  imbécile,  quel  tripotage  as-tu 
faitr 

Fanfan.  —  Mais  c'est  toi,  tu  me  dis  :  à  la  hausse!... 
J'achète,  moi;  mais,  voilà  que  c'est  congé.  Ils  sont 
tous  venus,  les  collégiens,  avec  des  timbres!...  {Pleurant.) 
Il  y  avait  une  grande  bête....  il  en  avait  plus  de  lOo,  même 
du  Guatemala!  Il  a  écrasé  le  marché!...  J'ai  vendu  à  perte, 
moi!...  Et  je  ne  peux  pas  payer  la  diffé...ren...ce.  {Autres 
sanglots.) 

Benoiton.  —  Bah!  nous  rattraperons  ça!...  Nous  com- 
binerons ensemble  quelque  joli  coup.... 

Fanfan. —  Avec  toi?...  plus  souvent!.,.  Tu  n'es  pas  assez 
sérieux!.... 


l54  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS 

Il  existe  des  sociétés  d'échange  qui  font  circuler 
entre  ceux  qui  en  font  partie  des  cahiers  de 
timbres,  tarifés,  dans  lesquels  chacun  d'eux  peut 
puiser,  à  charge  soit  de  paiement,  soit  de  rempla- 
cement à  valeur  égale. 

Les  transactions  entre  amateurs  ont  souvent 
été  le  point  de  départ  de  relations  agréables;  on 
met  même  sur  le  compte  de  notre  figurine  quel- 
ques mariages,  et  pas  des  moins  heureux. 

La  pratique  des  collections  de  timbres-poste 
donne  à  l'enfant  des  idées  d'ordre,  de  classement, 
de  méthode  et  éveille  chez  lui  le  goût  de  l'histoire 
et  de  la  géographie;  elle  excite  l'adulte  au  déve- 
loppement de  ces  sciences,  et  tel  amateur  qui, 
autrement,  connaîtrait  à  peine  le  nom  des  souve- 
rains régnants  de  l'Europe,  vous  énumérera  sans 
broncher  la  chronologie  d'Hawaï,  sans  omettre  un 
Kamehameha,  un  Kekuanoa,  un  Leliohoku;  pour 
les  reines  à  la  figure  peu  timide  du  même  pays, 
pas  de  danger  qu'il  confonde  Kamamalu  avec 
Likelike  ou  Kapiolani.  Le  goût  des  timbres-poste 
a  parfois  révélé  chez  des  enfants  des  aptitudes 
commerciales  particulières;  nous  avons  admiré, 
à  la  Bourse,  l'aplomb  et  l'habileté  d'un  bambin. 


HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS  l55 

démonstration  de  véritables  qualités  innées,  de 
nature  à  guider  les  parents  sur  l'adoption  d'une 
carrière  pour  leur  enfant...  sans  tomber,  surtout, 
dans  l'exclusivisme  de  M.  Benoiton. 

Les  timbres  français 

(poste,  télégraphe  et  téléphone)  au  point 

de   vue   des   collections. 

Revenons  à  notre  timbre  poste  français  et  à  ses 
dérivés,  car  nous  entendons,  pour  notre  pays, 
n'avoir  pas  de  vides;  nous  voulons  tout  :  Timbres- 
poste,  chiffres-taxes,  cartes  postales,  enveloppes  et 
bandes  timbrées,  cartes-lettres,  timbres  coloniaux, 
et,  de  par  la  fusion,  nous  tenons  à  joindre  timbres- 
télégraphe,  cartes  et  lettres  pneumatiques,  tickets 
téléphoniques.  Consacrons  un  chapitre  spécial  à 
chacun  de  ces  objets;  pour  ceux  qui  ont  déjà  été 
traités,  ce  ne  sera  que  le  résumé  succinct  de  ce 
qui  a  été  dit,  avec  quelques  renseignements  com- 
plémentaires de  nature  à  intéresser  particulière- 
ment le  collectionneur. 

Timbres -poste. 
Le  plus  rare  de  nos  anciens  timbres-poste  est 


l56  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    P^RANÇAIS 

celui  d'un  franc,  rouge  vermillon  de  la  première 
émission  (1849);  il  est  presque  introuvable;  son 
prix  actuel  est  de  250  francs  neuf,  et  de  150  francs 
annulé.  Une  réimpression  des  premiers  timbres 
français  a  été  faite  vers  1862.  On  prétend  qu'elle 
a  eu  lieu  sur  l'ordre  de  l'Empereur  pour  être 
agréable  à  un  grand  collectionneur  qui  avait  offert 
un  album  au  Prince  impérial.  Cette  réimpression  a 
servi,  pour  l'Administration,  à  faire  des  envois  aux 
collections  des  offices  étrangers. 

Certains  timbres  de  différentes  catégories  et 
émissions  sont  imprimés  tète-bêche. 

Un  timbre  de  20  centimes  bleu  de  l'émission 
initiale  a  été  catalogué  100  francs,  neuf  ou  obli- 
téré; nous  en  possédons  deux  exemplaires,  l'un 
neuf,  l'autre  annulé.  La  question  de  l'existence 
officielle  de  cette  figurine  a  été  souvent  discutée, 
mais  elle  n'a  pas,  que  nous  sachions,  été  résolue 
d'une  manière  péremptoire.  Nous  sommes  en 
mesure  de  le  faire,  deux  documents  administratifs 
en  main  :  une  circulaire  du  20  juin  1850,  relative 
à  l'émission,  pour  le  i"  juillet  suivant,  du  timbre- 
poste  bleu  de  25  centimes,  par  suite  de  la  surélé- 
vation de  la  taxe,  spécifie  textuellement  que  «  les 


HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS  15/ 

timbres-poste  à  20  centimes,  de  couleur  noire, 
seront  provisoirement  conservés  dans  les  bureaux 
jusqu'à  nouvel  ordre  »;  une  seconde  instruction, 
du  lé  octobre  suivant,  porte  que  «  les  figurines  à 
20  centimes  de  couleur  noire,  provisoirement 
conservées,  seront  retirées  du  service  et  renvoyées 
à  l'Administration  ».  Plus  de  doute,  n'est-ce  pas? 
Ce  timbre-poste  n'a  jamais  existé  officiellement, 
dans  la  métropole  du  moins.  Mais  alors,  que  sont 
ceux  que  l'on  trouvait  assez  facilement,  d'impression 
authentique,  même  avant  1871  ?  ^ —  Des  essais,  en 
ce  qui  concerne  les  neufs  ;  pour  les  autres,  l'oblité- 
ration est  de  complaisance;  celui  que  nous  possé- 
dons dans  ces  dernières  conditions  porte  l'em- 
preinte d'un  timbre  oblitérant  à  pointes  coniques; 
ce  timbre  oblitérant  n'a  été  mis  en  service  qu'à 
dater  du  i"  janvier  1852,  dix-huit  mois  après  le 
retrait  des  timbres-poste  à  20  centimes. 

Une  autre  particularité  :  il  existe  un  timbre- 
poste  de  10  centimes  Empire  lauré,  surchargé 
«  10  »  en  chiffres  bleus  de  3  millimètres  de  haut 
sur  I  miUimètre  de  largeur  dans  les  pleins.  Comme 
le  précédent,  ce  timbre  n'a  jamais  été  émis. 


l58  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS 

Voir,  à  la  fin  du  volume,  le  tableau  synoptique 
des  timbres-poste  français. 

Chiffres -taxes. 

Les  plus  recherchées  de  ces  figurines  sont  les 
premiers  exemplaires  lithographies  du  chiffre- 
taxe  primordial  de  lo  centimes  1859  (offerts 
20  francs);  ceux  de  40  centimes  bleu  (10  francs); 
de  60  centimes  jaune  (12  francs)  de  l'émis- 
sion 1871;  ceux  à  I  franc,  2  francs  et  5  francs 
noir,  voire  même  ceux  de  couleur  brun  Van 
Dyck  actuellement  en  usage,  peu  communs  en 
raison  de  la  rareté  du  cas  d'emploi,  ont  aujour- 
d'hui une  valeur  marchande  correspondant  presque 
à  la  taxe  qu'ils  représentent. 

Timbres  mixtes. 

Antérieurement  au  mois  de  juillet  1871,  les 
journaux  politiques  étaient  assujettis  à  un  droit 
de  timbre  recouvrable  par  les  Domaines.  Par 
simplification,  et  à  partir  de  1868  (loi  de  finances 
du  31  juillet  1867),  des  timbres  mobiles,  vendus 
par  cette  administration,  représentaient  les  droits 


HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS  I  Sg 

de  timbre  et  de  poste  réunis,  et  une  opération 
de  comptabilité  faisait  rentrer  dans  la  caisse  des 
Postes  la  part  de  perception  lui  revenant.  Ces 
timbres,  de  format  beaucoup  plus  grand  que  celui 
des  timbres-poste,  figurent  un  aigle  dans  un  écu. 
Bien  qu'indiquant  uniformé- 
ment la  somme  de  2  centi- 
mes représentant  le  droit 
de  timbre  proprement  dit, 
ils  étaient  de  valeur  diverse 
distinguée  exclusivement  par 
leur  couleur  :  violet,  le  tim- 
bre était  limjté  au  droit  de 
timbre  de  2  centimes;  bleu, 
il  comprenait,  outre  le  droit 
de  timbre,  2  centimes  de  droit  de  poste,  port  d'un 
journal  de  40  grammes  et  au-dessous,  pour  le  dé- 
partement où  il  était  édité  et  les  départements  limi- 
trophes; rouge  rose,  le  droit  de  poste  ajouté 
au  droit  de  timbre,  était  celui  de  4  centimes, 
port  d'un  journal  de  même  poids  circulant  en 
dehors  des  limites  déterminées  pour  la  figurine 
bleue.  Ces  trois  timbres  mixtes  existent  en  deux 
séries  :  l'une,  non  pointillée,  l'autre,  pointillée. 


Fig.  47.  —  Timbre-journaux. 


l6o  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS 

Cartes  postales. 

La  collection  de  nos  cartes  postales  se  com- 
pose : 

D'une  douzaine  de  modèles  différents,  les  uns 

blancs,  les  autres  chamois,  employés  alors  que 
ces  objets  de  correspondance  étaient  livrés  au 
service,  au  titre  de  simples  imprimés,  sans 
signe  d'affranchissement,  et  à  partir  du  moment 
(août  1878)  où  la  carte  postale,  portant  imprimée 
la  vignette,  du  timbre-poste,  est  devenue  valeur 
fiduciaire  ; 

De  la  carte  postale  à  10  centimes,  d'abord  gri- 
sâtre, puis  rose  bleu  du  côté  de  la  suscription  et 
blanche  au  verso,  enfin  chamois  clair;  vignette 
«  Groupe  allégorique   »  imprimée  en  noir; 

De  la  carte  à  15  centimes  pour  la  deuxième 
zone  de  l'Union  postale;  vignette  imprimée  en 
bleu  sur  fond  bleu  pâle;  blanche  au  verso;  sup- 
primée le  i"'  octobre  1881  ; 

Des  cartes  postales  avec  réponse  payée,  créées 
par  arrêté  du  21  juin  1879  : 

1°  A  20  centimes  d'abord  restreinte  à  la  Frante, 
l'Algérie  et  la  première  zone  de  l'Union;  aujour- 


HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS  l6l 

d'hui  unique  pour  tous  les  pays  à  destination 
desquels  ce  mode  de  correspondance  est  admis. 
Vignette  imprimée  en  noir,  sur  fond  gris  vert 
pâle,  aussi  bien  au  verso  qu'au  recto; 

2°  A  30  centimes,  vignette  noire  sur  fond  vert, 
laquelle  a  été  employée  pour  la  deuxième  zone 
étrangère  du  i"""  juillet  1879  au  i"""  octobre  188 1, 
date  de  l'unification  du  tarif  pour  l'Union,  sans 
distinction  de  zones. 

Enveloppes  timbrées. 

Émission  du  i"  octobre  1882.  Trois  formats  à 
15  centimes;  vignette  imprimée  en  bleu  sur 
papier  légèrement  bleuté  :  145  millimètres  sur 
115  millimètres,  —  120  millimètres  sur  95  mil- 
limètres, —  et  115  millimètres  sur  75  millimè- 
tres. Un  format  à  5  centimes;  vignette  verte  sur 
papier  vert  :  115  millimètres  sur  75  millimètres. 

Juin  1887.  Enveloppe  à  5  centimes  blanche, 
légèrement  teintée;  même  format  que  la  précé- 
dente; vignette  verte. 

Août  1889.  Enveloppe  à  5  centimes  grand 
format,  150  millimètres  sur  115  millimètres; 
vignette  vert  d'eau  sur  papier  jaunâtre. 

11 


102  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    KRANÇAIS 

Bandes  timbrées. 

Papier  chamois  bulle;  320  millimètres  sur 
55  millimètres. 

Émission  du  i""'  octobre  1882  :  à  i  centime, 
estampille  du  timbre -poste  imprimée  en  noir; 
et  à  2  centimes  estampille  brune. 

Émission  du  19  mars  1883  :  à  3  centimes 
estampille  rouge. 

Cartes-lettres. 

A  partir  du  15  juin  1886,  mise  en  vente  de 
cartes-lettres  fabriquées  par  l'État,  au  prix  de 
I  5  centimes  pour  la  France,  et  de  25  centimes 
pour  l'étranger.  Pour  la  France,  carte  chamois 
d'abord,  puis  grise,  estampille  bleue;  pour  l'étran- 
ger, carte  rose,  estampille  noire. 

Colonies  françaises. 

i"  Timbres -poste.  De  1860  à  1872,  timbre-poste 
spécial  carré  petit  format,  aigle  aux  ailes  déployées, 
I,  5,  10,  20,  40  et  80  centimes;  couleurs  corres- 
pondantes à  celles  des  timbres  métropolitains  de 
même  valeur. 


HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS  l63 

En  1872,  on  écoule  des  timbres  à  i,  5,  30  et 
80  centimes  à  l'effigie  de  Napoléon  III  laurée; 
puis  viennent,  de  1872  à  1877,  les  timbres  Tête 
de  la  Liberté,  1,2,  4,  5,  10  centimes  (bistre  et 
bistre  sur  rose),  15  centimes  (petits  chiffres  et 
chiffres  plus  grands),  20,  25,  30,  40  et  80  cen- 
times. 1877  nous  donne  le  groupe  allégorique 
«  Le  Commerce  et  la  Paix  »  avec  les  couleurs 
primitives,  moins  le  5  francs;  de  1878  à  1880, 
mêmes  timbres  avec  les  modifications  apportées 
aux  couleurs  de  ceux  de  la  métropole  pour  les 
figurines  à  i,  2,  4,  10,  15,  20  et  25,  plus  celui 
de  35  centimes.  Tous  ces  timbres-poste,  de 
1872  à  1881,  les  mêmes  que  ceux  de  la  France, 
ne  se  distinguent  de  ces  derniers  qu'en  ce  qu'ils 
ne  sont  pas  pointillés. 

A  partir  de  1881,  type  spécial  :  femme  assise, 
série  et  couleurs  analogues  à  celles  de  la  métro- 
pole, à  l'exclusion  du  timbre  de  5  francs.  Pointillés. 

Nos  colonies  ont  dû  fréquemment  avoir  recours 
aux  surcharges. 

2°  Chiffres -taxes.  Emploi  de  la  série  actuelle  de 
la  métropole,  encore  avec  cette  différence  que 
les  figurines  ne  sont  pas  pointillées. 


164  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS 

3°  Cartes  postales  simples  à  10  centimes  et  doubles 
(réponse  payée)  à  20  centimes. 

4°  Cartes-lettres,  à  15  centimes  et  à  25  centimes. 
5°  Bandes  timbrées,  à  1,2,  3,  4  et  5  centimes. 


TÉLÉGRAPHE 

Timbres-télégraphe. 

Une  loi  du  13  juin  1866  créa,  pour  le  service  de 
la  télégraphie,  des  timbres  mobiles  à  l'aide  des- 
quels le  public  pouvait  affranchir  les  dépêches  à 
expédier,  ce  qui  permettait  de  déposer  ces  dépê- 


Fig.  48. —  Timbre-télégraphe,  Empira 


Fig.  49.  —  Timbre-télégraphe . 


ches  à  la  boîte  et  dispensait  d'une  opération  de 
guichet  pour  la  perception  du  droit.  L'emploi  de 
ces    timbres    fut    rendu   obligatoire    à    partir    du 


Histoire  du  timbre-poste  français  i65 
I*'''  janvier  1868,  dans  les  bureaux  desservis  par 
des  agents  de  l'État.  Quatre  sortes  de  timbres- 
télégraphe  furent  employés  :  à  25  centimes  rose; 
à  50  centimes  vert;  à  i  franc  jaune  et  à  2  francs 
violet;  ils  représentent  un  aigle  couronné;  le 
format  est  sensiblement  plus  grand  que  celui  des 
timbres-poste.  Deux  séries,  l'une  non  pointillée, 
l'autre  pointillée. 

L'affranchissement  des  dépêches  au  moyen  de 
ces  timbres  fut  suspendu  d'urgence  au  début 
de  la  guerre  de  1870  par  une  mesure  adminis- 
trative confirmée  par  un  arrêté  présidentiel  du 
4  avril  187J.  Depuis,  les  taxes  des  télégrammes 
sont,  de  même  qu'antérieurement  à  1868,  acquit- 
tées exclusivement  en  numéraire,  aux  guichets 
des  bureaux. 

Cartes  et  lettres  pneumatiques. 

Décret  du  25  janvier  1879  :  à  partir  du  i'^"  mai 
de  la  même  année,  la  taxe  des  dépêches  télégra- 
phiques circulant  dans  la  limite  de  l'ancien  octroi 
de  Paris  est  indépendante  du  nombre  de  mots.  Ces 
dépêches  sont  transportées  par  tubes  pneumati- 
ques.   Cette    innovation    a   abouti,    la    première 


l66  HISTOIRE    DU    TIMBRE- POSTE    FRANÇAIS 

année,  à  une  augmentation  de  trafic  de  80  0/0 
(nombre  élevé,  d'une  année  à  l'autre,  de  411  991 
à  743  565). 

Les  modifications  de  taxes  et  l'extension  de  ce 
service  se  résument  par  le  relevé  suivant  des 
diverses  formules  successivement  employées  : 


le""  mai  1879.  —  Groupe  allégorique.  5o  centimes, 
carte  ouverte;  timbre  rose  sur  papier-carte  chamois. 

icr  mai  1879.  —  Groupe  allégorique.  75  centimes, 
lettre  fermée;  timbre  noir  sur  papier  bleu. 

i"  mai  1879.  —  Déesse  assise.  5o  centimes,  carte 
ouverte;  timbre  rose  sur  papier-carte  chamois. 

i"  mai  1879.  —  Déesse  assise.  75  centimes,  lettre 
fermée;  timbre  noir  sur  papier  bleu. 

i^'  juin  1880.  —  Déesse  assise.  5o  centimes,  carte 
ouverte;  timbre  rose  sur  papier-carte  chamois  avec  la  sur- 
charge :  «  Taxe  réduite  à  3o  centimes  ». 

i"  juin  1880.  —  Déesse  assise,  yb  centimes,  lettre 
fermée;  timbre  noir  sur  papier  bleu  avec  la  surcharge  : 
«  Taxe  réduite  à  5o  centimes  ». 

i^'  juin  1880.  —  Déesse  assise.  3o  centimes,  carte 
ouverte;  timbre  rose  sur  papier-carte  chamois. 

!«''  juin  1880.  —  Déesse  assise.  5o  centimes,  lettre 
fermée;  timbre  noir  sur  papier  bleu. 

i'^''juin  1880.  — Déesse  assise.  3o  centimes  -f  3o  cen- 
times, carte  avec  réponse  payée;  timbre  rose  sur  papier- 
carte  chamois. 

i«f  février  1882.  —  Déesse  assise.  3o  centimes,  carte 
ouverte  ;  timbre  noir  sur  papier-carte  chamois  et  plan  de 
Paris  en  trois  couleurs,  la  partie  rose  foncé  indiquant  le 
réseau  ouvert  de  la  porte  de  Versailles  à  la  porte  des 
Ternes. 

jcr  février  1882.  —  Déesse  assise.  5o  centimes,  lettre 
fermée;  timbre  noir  sur  papier  bleu  et  plan  de  Paris  en 
trois  couleurs,  la  partie  rose  foncé  indiquant  le  réseau 
ouvert  de  la  porte  de  Versailles  à  la  porte  des  Ternes. 


HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS  167 

j*''  avril  i883.  —  Déesse  assise.  3o  centimes,  carte 
ouverte,  même  genre;  la  partie  teintée  en  rose  foncé  indi- 
quant le  réseau  ouvert  de  la  porte  de  Versailles  à  la  porte 
Chaumont.  Timbre  noir  sur  papier-carte  chamois. 

I®''  avril  i883.  —  Déesse  assise.  5o  centimes,  lettre 
fermée,  même  genre;  la  partie  teintée  en  rose  foncé  indi- 
quant le  réseau  ouvert  de  la  porte  de  Versailles  à  la  porte 
Chaumont.  Timbre  noir  sur  papier  bl-eu. 

i*^''  février  1884.  —  Déesse  assise.  3o  centimes,  carte 
ouverte,  même  genre;  la  partie  hachée  en  bleu  clair  sur  le 
pian  de  Paris,  indiquant  la  seule  partie  du  réseau  non 
encore  ouverte  au  service.  Timbre  noir  sur  papier-carte 
chamois. 

jer  février  1884.  —  Déesse  assise.  5o  centimes,  lettre 
fermée,  même  genre;  la  partie  tracée  en  bleu  clair  sur  le 
plan  de  Paris,  indiquant  la  seule  partie  du  réseau  non 
encore  ouverte  au  service.  Timbre  noir  sur  papier  bleu. 

i"  décembre  1884.  —  Déesse  assise.  3o  centimes;  mêmes 
carte  et  lettre  avec  plan  de  Paris  et  la  surcharge  rouge  : 
«  Valable  pour  tout  Paris  ». 

!«■■  décembre  1884.  —  Déesse  assise.  5o  centimes;  mêmes 
carte  et  lettre  avec  plan  de  Paris  et  la  surcharge  rouge  : 
«  Valable  pour  tout  Paris  ». 

i*""  décembre  1884.  ~  Déesse  assise.  3o  centimes  +  3o  cen- 
times, carte  ouverte  avec  réponse  payée;  timbre  rouge 
sur  papier-carte  chamois  avec  la  surcharge  en  noir  : 
«  Valable  pour  tout  Paris  ». 

i"  avril  i885.  —  Déesse  assise.  3o  centimes,  carte 
ouverte;  timbre  noir  sur  papier-carte  chamois. 

ler  avril  i885.  ~  Déesse  assise.  5o  centimes,  lettre 
fermée;  timbre  noir  sur  papier  bleu. 

icr  avril  i885.  —  Déesse  assise.  3o  centimes  -\-  3o  cen- 
times, carte  ouverte  avec  réponse  payée;  timbre  noir  sur 
papier-carte  chamois. 

[er  septembre  1887.  —  Déesse  assise.  3o  centimes-}-  3o  cen- 
times, carte  ouverte  avec  réponse  payée  spéciale  aux 
demandes,  par  tubes,  de  remboursements  de  la  caisse 
d'épargne.  Texte  imprimé  à  cet  effet.  Timbre  noir  sur 
papier-carte  chamois. 


l68  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS 

Enveloppes-dépêches  à  i  franc  comprenant 
un  bon  de  réponse  payée. 

i5  décembre  1884.  —  Déesse  assise.  Timbre  noir  sur 
papier  rose. 

Enveloppes  pour  tubes  pneumatiques. 

i5  janvier  i885.  —  Déesse  assise.  yS  centimes;  timbre 
noir  sur  papier  violet,  petit  format. 

i^r  janvier  1887.  —  Déesse  assise.  75  centimes;  même 
enveloppe  avec  la  surcharge  noire  :  «  Taxe  réduite  à  60  cen- 
times ». 

i^r  septembre  i88g.  —  Déesse  assise.  60  centimes; 
timbre  rose  sur  papier  violet. 


Tickets  téléphoniques. 

Le  public  a  été  admis  à  correspondre  par  le 
téléphone,  avec  les  abonnés,  au  moyen  de  cabines 
publiques. 

Les  taxes  sont  acquittées  au  moyen  de  tickets 
oblongs  spéciaux,  déesse  assise  et  texte  :  à 
25  centimes  imprimés  en  bleu  sur  fond  chamois, 
à  30  centimes  violet  foncé  sur  lilas  clair,  à  50  cen- 
times rouge  rose  sur  rose  pâle;  à  i  franc  rouge 
rose  sur  bleuté;  à  3  francs  noir  sur  vert.  Deux 
séries,  l'une  portant  en  tête  «  Postes  et  Télégra- 
phes »,  pour  les  tickets  de  30  centimes,  50  cen- 
times, I  franc  et  3  francs;  l'autre  «  Ministère  des 


HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS  I  69 

Postes  et  Télégraphes  »,  pour  les  tickets  à  25  cen- 
times, 50  centimes,  i  franc  et  3  francs. 


Pour  tous,  la  suite  de  nos  timbres-poste  résume 
succinctement  l'histoire  contemporaine  :  la  figu- 
rine Tête  de  la  Liberté  et  le  timbre  Présidence  rap- 
pellent la  deuxième  République;  l'effigie  de  Napo- 
léon III j  non  laurée,  les  premières  années  du  gou- 
vernement impérial;  puis  laurée,  les  campagnes 
heureuses  suivies,  hélas!  des  deuils  de  la  patrie, 
de  l'année  terrible,  figurés  par  les  timbres  de  la 
fabrication  de  Bordeaux;  les  lettres  par  ballons,  les 
cartes-correspondance,  marquent  les  épisodes  du 
siège  de  Paris;  le  retour  au  timbre-poste  primitif 
célèbre  le  rétablissement  de  la  RépubUque,  suivi 
de  l'adoption  du  type  actuel  le  Commerce  et  la 
Paix,  correspondant  à  l'ère  de  reconstitution 
nationale. 

Pour  l'agent  des  postes,  disons  le  mot  familier 
(il  vient  si  naturellement  sous  notre  plume),  pour 
le  vieux  postier,  que  de  réminiscences  intimes 
s'ajoutent   parallèlement  à  ces  souvenirs  histori- 


170  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS 

ques!  J'en  appelle  à  ce  vénérable  chef  de  service 
dont  le  timbre -poste  a  vu  blanchir  la  tête.  Dans 
ses  débuts  administratifs,  il  a  appHqué  la  taxe  pro- 
portionnelle à  la  distance,  non  sans  maugréer 
contre  la  lenteur  forcée  de  cette  besogne;  c''était 
le  surnumérariat,  presque  encore  l'enfance,  l'in- 
souciance, l'effervescence  de  la  jeunesse.  Peu 
après,  il  a  vu  la  naissance  du  timbre-poste  qu'il  a 
oblitéré  du  timbre  à  losanges,  empreinte  chère  aux 
collectionneurs,  et  successivement  les  figurines 
Tête  de  la  Liberté^  Présidence,  Empire  non  lauré;  il 
parcourt  les  classes  du  grade  de  commis;  il  se  pose 
et  se  marie.  Vient  l'effigie  laurée;  lui  aussi  prend 
des  lauriers,  il  arrive  aux  emplois  supérieurs.  Voici 
la  guerre  et  de  nouveaux  timbres;  l'employé  est 
devenu  chef  de  service  ;  il  s'est  vaillamment  con- 
duit devant  l'ennemi  et  la  croix  d'honneur  a 
récompensé  son  patriotisme.  Pour  nous,  qui  avons 
quinze  ans  de  moins,  les  timbres  de  Bordeaux,  ceux 
du  siège,  c'est  le  drapeau,  le  bataillon  spécial 
fourni  à  la  Défense  par  la  poste  de  Paris,  le  1 1 1"'% 
sous  les  ordres  d'un  sous-chef  de  bureau, 
M.  Loiseau,  improvisé  commandant;  ce  sont  les 
grand'gardes  tenues  aux  Moulineaux,  à  Arcueil- 


HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS  I7I 

Cachan;  c'est  Montretout...  Le  retour  au  type 
primitif  marque  de  nouveaux  pas  dans  la  carrière 
pour  notre  vieux  postier  qui  va  se  voir  «  fendre 
l'oreille  »  sous  la  longue  durée  —  longue  jus- 
qu'à la  monotonie  —  du  type  actuel  le  Commerce  et 
la  Paix  régnant  sur  le  Monde.  Ce  n'est  plus  l'homme 
enjoué  des  premières  années;  son  caractère  jadis 
exultant  est  devenu  grave  jusqu'à  la  sévérité, 
quelque  peu  grognon,...  disent  ses  sous-ordres. 
N'est-ce  pas  excusable,  après  quarante-deux  ans  de 
fonctions     administratives...     et    trente    ans    de 


mariage  ? 


Donnons  tous  nos  respects  à  ce  doyen  admi- 
nistratif dont  les  débuts  remontent  aux  temps  pit- 
toresques où  les  malles-postes  faisaient  à  grand 
fracas  leur  entrée  sur  le  pavé  de  la  rue  Jean-Jacques 
Rousseau,  tout  en  elles  chantant  bruyamment  la 
joie  de  l'arrivée  :  les  ferrures  des  voitures  enlevées 
dans  le  galop  effréné  du  dernier  coup  de  collier; 
les  hennissements  des  chevaux  à  l'approche  de 
l'écurie;  la  musique  argentine  de  leurs  grelots; 
la  fanfare  éclatante  du  postillon  en  livrée,  alternant 
avec  les  claquements  savants  et  sonores  de  son 
fouet.   Saluons,  en  terminant  ce   livre,  le    Vieux 


1/2  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS 

Postier  qui  a  inauguré  notre  figurine  d'affranchis- 
sement et  qui,  à  plus  de  quarante  années  d'inter- 
valle, est  encore  sur  la  brèche,  après  avoir  vécu  les 
sept  premières  générations  de  notre  timbre-poste 
français. 


APPENDICE 

Ce  livre  où  rérudition  et  l'humour  s'unissent 
pour  offrir  un  double  attrait  est,  malheureusement, 
une  œuvre  posthume. 

Avant  qu'ils  fussent  écrits,  nous  avions  connu 
tous  les  chapitres  de  «  l'Histoire  du  timbre-poste 
français  »,  nous  en  avions  lu  chaque  page  avant 
que  l'encre  en  fût  séchée;  ces  motifs  nous  ont 
déterminé  à  revoir  le  manuscrit  et  à  en  diriger  la 
publication. 

Nous  avons  pensé  répondre  ainsi  aux  désirs  de 
beaucoup  de  camarades  qui,  comme  nous,  vou- 
dront garder  ce  livre  en  mémoire  de  Louis  Leroy, 
dont  l'esprit  et  l'affabilité  ont  fait  naître  tant  de 
sympathies. 

Pour  que  l'ouvrage  soit  complet,  autant  que 
possible,  nous  avons  cru  devoir  ajouter  quelques 


174  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS 

notes  dont  la  plupart  se  rapportent  à  des  questions 
ayant  un  caractère  d'actualité. 

Remercions  ici  les  personnes  à  l'obligeance  des- 
quelles nous  devons  de  très  utiles  renseignements. 

Camille  Blondiot. 

Juillet  1891. 


Imitation  des  timbre  s -poste. 

Comme  on  l'a  remarqué,  nous  avons  reproduit, 
pour  la  démonstration,  des  timbres /mw^^/^  oblité- 
rés. Nous  avons  agi  de  la  sorte  par  un  scrupule 
que  beaucoup  trouveront  sans  doute  exagéré, 
mais  nous  avons  tenu  à  respecter,  même  au  delà 
de  sa  rigueur,  la  loi  du  ii  juillet  1885  dont  voici 
le  texte  : 

Article  premier.  —  Sont  interdits  la  fabrica- 
tion, la  vente,  le  colportage  et  la  distribution  de 
tous  imprimés  ou  formules  obtenues  par  un  pro- 
cédé quelconque  qui,  par  leur  forme  extérieure, 
présenteraient  avec  les  billets  de  banque,  les  titres 
de  rente,  vignettes  et  timbres  du  service  des  postes  et 
télégraphes  ou  des  régies  de  l'État,  une  ressem- 
blance de  nature  à  faciliter  l'acceptation  des  dits 


176  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS 

imprimés  ou  formules  aux  lieu  et  place  des  valeurs 
imitées. 

Article  2.  —  Toute  infraction  à  l'article  qui 
précède  sera  punie  d'un  emprisonnement  de  cinq 
jours  à  six  mois  et  d'une  amende  de  seize  francs  à 
deux  mille  francs. 

Article  3.  —  Les  imprimés  ou  formules,  ainsi 
que  les  planches  ou  matrices  ayant  servi  à  leur 
confection,  seront  confisqués. 

Comment  doit  être  interprétée  cette  loi  en  ce 
qui  concerne  le  timbre-poste?  Nous  l'ignorons 
et  nous  avons  tout  lieu  de  croire  que  la  jurispru- 
dence n'est  pas  encore  établie  sur  ce  point.  Nous 
avons  pour  nous  fixer,  quant  au  billet  de  banque, 
le  jugement  du  Tribunal  correctionnel  de  la  Seine 
(9^  chambre)  du  26  mars  1891,  confirmé  par  arrêt 
de  la  Cour  d'appel  du  13  mai  suivant,  qui  a  con- 
damné à  500  francs  d'amende  et  à  des  dommages 
et  intérêts  M.  S...,  chimiste  dont  la  compétence 
en  matière  de  timbres-poste  est  fort  connue. 

M.  S...  avait  représenté  le  cadre  et  certaines 
figures  bleues  et  roses  du  billet  de  banque  de  50 


HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS  l']'] 

francs.  Mais,  il  y  manquait  les  mots  :  «  Banque 
de  France  »,  les  numéros,  les  signatures  et  plu- 
sieurs figures.  Le  mot  liard  remplaçait  le  mot  franc, 
les  mentions  imprimées  se  rapportaient  au  prix 
d'abonnement  du  Moniteur  industriel,  enfin  le 
verso  était  entièrement  blanc. 

De  l'ensemble  du  jugement  et  de  l'arrêt  il  ré- 
sulte : 

Que  la  loi  du  ii  juillet  1885  a  voulu  empêcher 
que  des  imitations  même  grossières  pussent  don- 
ner lieu  soit  à  des  méprises  de  la  part  de  personnes 
ignorantes  ou  naïves,  soit  à  un  emploi  frauduleux 
de  la  part  des  détenteurs  malhonnêtes; 

Qii'elle  punit  la  simple  intention  d'imiter  les 
valeurs  fiduciaires,  alors  miême  que  l'on  n'aurait 
point  agi  dans  une  pensée  de  réclame  indus- 
trielle. 

Les  tribunaux  se  seraient-ils  prononcés  dans  le 
même  sens  s'il  se  fût  agi  de  timbres-poste?  Le 
doute  est  permis.  Les  avis  seraient  également  par- 
tagés sur  la  question  de  savoir  si  le  timbre-poste 
est  réellement  une  valeur  fiduciaire. 


12 


II 


Les  savants,  les  ingénieurs,  les  artistes  qui 
se  sont  occupés  du  timbre-poste. 

Ce  serait  faire  acte  d'ingratitude  de  ne  point  rap- 
peler ici  les  noms  des  savants,  des  ingénieurs,  des 
artistes  qui  se  sont  occupés  de  notre  timbre-poste. 
L'illustre  J.-B.  Dumas,  notre  grand  chimiste,  a  été 
consulté  plusieurs  fois  —  ainsi  que  MM.  Naquet 
et  Scheurer-Kestner  —  au  sujet  des  matières  à 
employer  pour  les  couleurs  et  l'oblitération. 

M.  Péligot  a  surveillé  l'émission  de  Bordeaux. 

M.  Hulot,qui,  pendant  vingt-six  ans,  a  été  direc- 
teur de  la  fabrication  de  la  monnaie,  a  eu  pour 
successeurs  MM.  Chazal  et  Ermel,  ingénieurs  de 
la  Banque  de  France. 

Depuis  que  l'Administration  prend  soin  elle- 
même  de  la  fabrication,  ce  service  a  été  confié  à 
MM.  les  ingénieurs  des  Postes  et  des  Télégraphes, 


HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS  1 79 

Seligman-Lui,  Tongas,  Clérac  et  de  la  Touanne; 
ces  deux  derniers  en  sont  encore  actuellement 
chargés  sous  les  ordres  de  M.  Trotin,  directeur- 
ingénieur. 

M.  Gaumel  est  chef  de  Fatelier  depuis  1875. 
On  lui  doit  plusieurs  améliorations,  notamment 
deux  machines  :  l'une,  au  moyen  de  laquelle  un 
enfant  peut  pUer,  en  10  heures,  15  000  cartes-let- 
tres ou  cartes-télégrammes,  l'autre,  permettant  à 
2  ouvriers  de  gommer,  par  jour,  144  000  de  ces 
objets,  travail  qui  nécessitait  autrefois  l'emploi  de 
24  ouvriers. 

En  dehors  de  leurs  travaux  ordinaires,  les  ingé- 
nieurs ont  à  examiner  de  nombreuses  propositions 
soumises  par  des  inventeurs  de  tous  les  pays  ; 
parmi  les  plus  originales,  citons  celle  qui  avait  pour 
but  de  faire  entrer  un  fulminate  dans  la  composi- 
tion du  timbre-poste,  dont  l'annulation  se  serait 
faite  au  moyen  d'un  léger  coup  de  marteau. 

Parlons  maintenant  des  artistes. 

Nous  devons  à  Barre  père,  graveur  général  des 
monnaies,  les  timbres  à  l'effigie  de  la  République 
et  de  Napoléon  III,  tête  non  laurée,  ainsi  que 
l'aigle  du  premier  type  des  Colonies,  et  à  son  fils 


l8o  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS 

Albert,  qui  fut  également  graveur  général,  les  tim- 
bres représentant  l'empereur  avec  la  tête  laurée. 

Oudiné  a  gravé  l'aigle  des  timbres-télégraphe  et 
le  timbre-mixte  des  journaux. 

En  1875,  440  artistes  prennent  part  au  concours 
organisé  pour  le  choix  d'un  nouveau  type  de 
timbre. 

Le  premier  prix  (i  500  francs)  est  attribué  à 
M.  Sage,  le  deuxième  (500  francs)  à  M.  Chaplain, 
le  troisième  (300  francs)  à  M.  Picault. 

Les  juges  du  concours,  en  dehors  des  fonction- 
naires, étaient  les  peintres  Meissonier  et  Baudry  et 
le  graveur  Henriquel  Dupont. 

Le  premier  prix,  qui  représente  «  le  Commerce 
et  la  Paix  s'unissant  et  régnant  sur  le  Monde  », 
est  admis  pour  le  S'^  type  de  nos  timbres-poste.  La 
gravure  en  est  confiée  à  M.  Mouchon  moyennant 
la  somme  de  quatre  mille  francs  *. 

La  composition  du  2^  prix,  déesse  assise  tenant 
une  corne  d'abondance,  est  choisie  pour  figurer 
sur  les  cartes  et  les  enveloppes-télégrammes  ainsi 
que  sur  les  tickets  téléphoniques. 

I.  Le  prototype  a  été  cassé  à  la  trempe  et  l'émission  re- 
tardée de  quelques  mois. 


HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE   FRANÇAIS  f8l 

M.  Georges  Duval,  architecte,  a  dessiné  le  se- 
cond type  des  chiffres- taxes. 

En  1880,  nouveau  concours,  limité  cette  fois 
à  quelques  artistes.   Le    comité    consultatif   des 

graveurs  choisit  l'œuvre  de  M.  Alphée  Dubois, 
2"  type  du  timbre  des  Colonies. 

Le  tirage  des  timbres  se  faisant  avec  des  cHchés 
obtenus  après  plusieurs  surmoulages,  il  importe 
que  le  poinçon,  ou  prototype,  possède  le  maxi- 
mum possible  de  finesse  et  de  délicatesse,  car  ces 
surmoulages  lui  en  font  perdre  sensiblement.  Pour 
ces  motifs,  la  gravure  est  exécutée  sur  acier  et  en 
relief.  Quant  à  la  composition,  elle  présente  des 
difficultés  particulières.  Il  faut,  en  effet,  que  les 
chiffres  se  rapportant  à  la  valeur  du  timbre  soient 
très  apparents,  que  les  autres  inscriptions  soient 
très  lisibles;  l'artiste  doit  ensuite,  dans  l'exiguïté 
des  espaces  restés  fibres,  traiter  un  sujet  intéres- 
sant et  compréhensible  à  première  vue. 


III 


Le  futur  timbre  des  Colonies. 


Les  difficultés  étaient  plus  grandes  pour  le  futur 
timbre  des  Colonies  puisqu'il  portera  des  inscrip- 
tions plus  nombreuses  que  celles  de  ses  frères 
aînés. 

M.  Mouchon  qui,  depuis  1875,  a  gravé  tous  les 
timbres  sortant  de  notre  atelier,  était  tout  désigné 
pour  ce  3""  type  des  Colonies  dont  la  mise  en  usage 
est  fixée  au  i"'  janvier  1892. 

La  composition  de  M.  Mou- 
chon, dans  le  style  de  la  Renais- 
sance, représente  la  Navigation  et 
le  Commerce  faisant  flotter  sur  les 
mers  les  couleurs  françaises.  Le 
coionies^française?.  sujct  ne  pouvait  être  plus  noble  ; 
l'exécution  est  fort  heureuse. 

On  voit  assis  sur  la  proue  d'une  barque  :  d'un 
côté,  la  Navigation  tenant,  de  la  main  droite,  un 


Fie:.  50. 


HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS  l83 

gouvernail  et,  de  la  main  gauche,  le  drapeau  trico- 
lore flottant  au  vent;  de  l'autre  côté,  le  Com- 
merce tenant  également  le  drapeau  de  la  main 
droite  et  portant,  de  la  main  gauche,  une  corne 
d'abondance  au  sommet  de  laquelle  figure  le  ca- 
ducée. 

En  haut  les  mots  :  République  française.  —  Colo- 
nies. —  Postes.  En  avant  de  la  barque,  deux  avi- 
rons; à  l'éperon,  un  cartouche,  accosté  de  deux 
dauphins,  sur  lequel  sera  gravé  le  prix  du  timbre; 
au-dessous,  un  second  cartouche  indiquera,  en 
couleur  différente  de  celle  de  la  figurine,  le  nom 
de  la  Colonie. 

Il  y  aura  quatorze  inscriptions  différentes  : 

Saint-Pierre  et  Miquelon. 

Martinique. 

Guadeloupe  et  dépendances. 

Guyane. 

Sénégal  et  dépendances. 

Mayotte. 

Obock. 

Congo  français. 

Réunion. 

Diego-Suarez  et  dépendances. 

Indo-Chine. 

Etablissements  de  l'Inde. 

Nouvelle-Calédonie  et  dépendances. 

Etablissements  de  l'Océanie. 


184  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS 

Étant  donné  que  chacune  de  nos  colonies  sera, 
selon  toute  probabilité,  dotée  de  13  timbres  diffé- 
rents (i,  2,4,5,10,15,20,25,30,40,50,75  centi- 
mes et  I  franc),  on  constate  la  création  prochaine 
de  182  timbres  français  représentant  une  somme 
de  52  fr.  78  cent. 

Quelle  aubaine  pour  les  marchands,  quelle  joie 
pour  les  timbrophiles  et  les  jeunes  collectionneurs! 

Gracieuses  vignettes,  soyez  les  bienvenues. 
Mieux  que  leurs  livres,  vous  apprendrez  à  nos 
bambins  les  noms  des  pays  où  flottent  les  couleurs 
françaises. 

Faites  aimer  le  drapeau  que  vous  portez.  Dites 
sa  noble  devise  :  les  libertés  par  lui  conquises,  les 
chaînes  d'esclavage  qu'il  a  brisées,  les  appuis  fra- 
ternels qu'il  a  prêtés.  Dites  l'éclat  de  sa  gloire,  sa 
dignité  dans  les  épreuves.  Dites  avec  le  poète  : 

Il  faut  le  baiser  à  genoux. 


IV 


Timbres  spéciaux  à  la  colonie  de  ]a  Réunion. 

Un  arrêté  du  gouverneur  de  la  Réunion,  du 
10  décembre  1851,  a  créé  des  timbres  à  15  et  à 
30  centimes,  imprimés  en  noir  sur  papier  azuré, 
pour  le  service  intérieur  de  cette  colonie. 

Les  premiers  représentaient  l'affranchissement 
d'une  lettre,  quel  qu'en  fût  le  poids,  de  la  Réunion 
pour  l'extérieur,  en  ce  qui  concernait  son  trans- 
port du  bureau  où  elle  avait  été  déposée  au  port 
d'embarquement.  Les  seconds  étaient  destinés 
aux  lettres  circulant  dans  la  colonie  (30  centimes 
par  7  grammes  1/2). 

7  500  timbres  de  chaque  type  ont  été  émis,  ils 
ne  sont  pas  gommés.  La  vente,  commencée  le 
i^'"  janvier  1852,  finit  le  31  décembre  1859. 

Comme  il  était  d'usage  de  ne  pas  affranchir  les 
lettres,  ces  timbres  ont  été  fort  rarement  employés. 
D'après  une  lettre  adressée  par  un  agent  des  finances 


l86  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS 

de  la  Réunion  à  M.  Rousset  (ancien  conseiller 
maître  à  la  Cour  des  comptes,  qui  fut  l'un  de  nos 
premiers  timbrophiles),  lorsqu'ils  furent  brûlés,  il 
s'en  était  vendu  seulement  pour  la  faible  somme 
de  6  francs. 

Leur  prix  actuel  est  de  i  200  francs  environ. 


Timljrroste.Soc. 


^  — *— ^ 

-    1 

lledelaRéanlonJ! 

w 

Tjimb-Poste 

15  c. 

Fig.  51.  Ile  (le  la  Réunion.  Fig-.  52. 

On  nous  assure  que  l'Administration  centrale  des 
Postes  possédait,  il  y  a  peu  de  temps,  à  titre  de 
spécimen,  un  certain  nombre  de  feuilles,  des 
deux  types,  qui  auraient  été  livrées  au  pilon.  Si 
le  fait  est  exact,  comme  tout  porte  à  le  croire,  ce 
serait,  avec  le  trafic  actuel,  presque  une  fortune 
détruite  en  un  instant. 

Les  timbres  de  la  Réunion  ont  été  réimprimés, 
en  1866,  par  M.  J.-B.  Moens,  qui,  dans  le  n°  41 
du  «Timbre-poste»,  leur  consacre  une  étude  inté- 
ressante. 


V 


Timbres  provisoires. 

Dans  les  Colonies,  lorsque  l'approvisionnement 
fait  défaut  et  que  le  système  des  surcharges  n'est 
plus  possible,  on  a  recours  à  des  timbres  provi- 
soires. 

Nous  connaissons  trois  émissions  de  ce  genre. 

La  première  eut  lieu,  vers  1862,  à  la  Nouvelle- 
Calédonie;  elle  concerne  seulement  des  timbres  à 
10  centimes,  imprimés  en  noir,  sur  papier  blanc, 
à  l'effigie,  non  laurée,  de  Napoléon  III. 

La  gravure,  très  grossièrement  exécutée  et  due 
au  sergent  Triquera,  représente  une  planche  de 
50  figurines  d'un  dessin  différent  pour  chacune. 
On  lit,  en  tête,  les  mots  :  «  Nouvelle-Calé- 
donie ». 

Ce  timbre  a  fait  l'objet  d'une  communication 
de  M.  Maury  au  Congrès  international  de  1878; 


l88  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS 

bien  qu'aucun  arrêté  relatif  à  sa  création  n'ait  été 
publié,  son  authenticité  n'est  pas  douteuse. 

La  deuxième  émission  date  de  mai  1889  et  se 
rapporte  au  Gabon. 

Nous  prions  le  lecteur  de  se  reporter  au  chapitre 
«  les  Collections  et  les  Collectionneurs  »  pour  ce 


Fig.  53.    -  Gabon. 


Fig.  5i.  —  Dieero-Suarez. 


qui  a  été  dit  de  ces  timbres  à  l'occasion  des  sur- 
charges. 

Enfin,  la  troisième  émission  est  du  27  sep- 
tembre 1890;  elle  intéresse  la  colonie  de  Diego- 
Suarez  et  comporte  quatre  types. 

Nous  reproduisons  ci-après  les  passages  essen- 
tiels de  l'arrêté  du  gouverneur  de  la  Colonie 
relatif  à  cet  émission  : 

«  Nous,  gouverneur  de  Diego-Suarez  et  dépen- 
dances, avons  arrêté  et  arrêtons  : 


HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS  I  89 

Article  premier.  —  Il  sera  immédiatement 
pourvu  au  tirage  de  figurines  de  diverses  valeurs 
strictement  indispensables  pour  assurer  le  service 
de  la  Poste  à  Diego-Suarez  ,  savoir  :  1 5  000  à 
25  centimes,  15000  à  15  centimes,  6000  à 
5  centimes,  4  000  à  i  centime. 


DIKO'SUAREZ 


Fi  g.  55. 


Fig,  57. 


Art.  2.  —  Ces  figurines,  d'un  dessin  spécial 
conforme  aux  types  ci-annexés,  seront  exclusive- 
ment affectées  à  la  colonie  de  Diego-Suarez. 

Art.  3.  —  Le  tirage  de  ces  diverses  coupures 
sera  exécuté  en  présence  d'une  commission  com- 
posée de  MM.  Le  Baigue,  sous-chef,  et  Terrentroy, 
écrivain  des  directions  de  llntéricur,  et  Poirier, 
agent  chargé  du  service  de  la  poste. 

Cette  commission  dressera  procès-verbal  de 
ces  opérations...  aussitôt  après  le  tirage  des  quan- 


igO  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS 

tirés  ci- dessus  fixées  en  l'article  i";  les  dessins 
seront  effacés  sur  la  pierre,  en  présence  de  la 
commission. 

Art.  4.  —  Il  demeure  entendu  que  ces  timbres, 
d'un  tirage  spécial,  ne  seront  employés  qu'à  titre 
tout  à  fait  provisoire  et  que  les  coupures  qui 
seront  trouvées  en  dépôt  au  Trésor  ou  à  la  poste, 
au  moment  de  l'arrivée,  dans  la  colonie,  des  tim- 
bres-poste demandés  en  France,  seront  détruites  et 
incinérées  en  présence  d'une  commission. 

Celles  qui  seront  trouvées  en  possession  des 
particuliers  seront  échangées  contre  des  timbres- 
poste  réguliers. 

Procès-verbal  sera  dressé  de  cette  opération... 

Froger. 

Ces  timbres  provisoires  ont  été  mis  en  vente  du 
27  septembre  au  5  octobre  1890. 

Chiffres-taxes  provisoires. 

Signalons  également  l'émission,  à  la  Guade-^ 
loupe,  en  1877,  1879  ^^  1884,  de  chiffres-taxes 
provisoires. 


HISTOIRE    DU    TIMBRE -POSTE    FRANÇAIS  I9I 

Ceux  des  émissions  de  1877  et  de  1879  sont 
d'un  format  qui  ne  dépasse  guère  un  centimètre 
carré,  ceux  de  1884  ont  une  dimension  qua- 
druple. 


§50  I 

W>      ^    ■  ^ 

^percevoir^ 

Fig.  58.     Guadeloupe,  chitfres-Laxes.     Fig.  59. 

1877,  25  centimes  blanc,  40  centimes  blanc. 
—  1879,  15  centimes  azuré,  30  centimes  blanc.  — 
1884,  5  centimes  blanc,  10  centimes  bleu,  15  cen- 
times violet,  20  centimes  rose,  30  centimes  jaune, 
35  centimes  gris,  50  centimes  vert. 


VI 

Timbres  coupés. 

Pendant  la  guerre  1 870-1 871,  certains  rece- 
veurs ou  receveuses  des  pays  envahis  ont  organisé 
un  service  postal  clandestin.  Dans  ces  bureaux 
campés  en  des  lieux  retirés  (maisons  isolées, 
granges,  caves),  les  timbres  de  certaines  caté- 
gories ont  fait  défaut. 

On  a  coupé  en  deux,  en  diagonale,  le  plus  sou- 
vent, les  timbres  que  Ton  possédait.  Ceux  de 
40  centimes  sont  ainsi  devenus  des  timbres  à 
20  centimes,  ceux  de  10  centimes  des  timbres  à 
5  centimes,  etc. 

Timbrophiles,  réservez  la  place  d'honneur  aux 
enveloppes  revêtues  de  ces  timbres.  Ceux  qui  les 
ont  tenues  et  dirigées  bravaient,  par  devoir  pro- 
fessionnel et  par  patriotisme,  les  colères  et  les 
balles  ennemies;  plusieurs  ont  payé  ce  dévoue- 
ment de  leur  Uberté  et  même  de  leur  vie. 


VII 

Timbres  préparés  mais  non  émis. 

Rappelons  que  le  timbre  à  20  centimes  bleu,  à 
l'effigie  de  la  République,  classé  par  certains  col- 
lectionneurs comme  émis  en  1850  et  dont  le  prix 
marchand  est  de  100  francs,  n'a  jamais  existé 
officiellement. 

Voici,  à  son  sujet,  les  renseignements  que  nous 
avons  recueillis  de  personnes  absolument  autori- 
sées (l'une  d'elles  a  participé  à  son  émission). 

Le  timbre  à  20  centimes  noir  avait  donné  des 
résultats  peu  satisfaisants;  à  la  lumière,  son  obli- 
tération était  à  peine  apparente. 

Dès  le  commencement  de  1850,  il  était  con- 
venu que  la  couleur  bleue  serait  substituée  à  la 
couleur  noire;  un  tirage  avait  même  été  fait 
lorsque  fut  décidée,  à  partir  du  i"""  juillet,  l'élé- 
vation de  20  à  25  centimes  de  la  taxe  des  lettres 

1^ 


194  HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS 

circulant  de  bureau  à  bureau.  Les  timbres  bleus 
ainsi  préparés  ne  furent  pas  livrés  au  public, 
mais  ils  furent  classés  dans  les  collections  offi- 
cielles et  réimprimés  vers  1862. 

M.  le  D""  Legrand,  dont  l'autorité  est  si  grande 
en  matière  de  timbrologie,  nous  assure  que,  dans 
une  vitrine  du  Ministère  des  Finanjces,  il  existait 
un  certain  nombre  de  ces  timbres  portant  une 
surcharge  rouge  de  25  centimes,  en  lettres  itali- 
ques, suivie  d'un  trait.  L'exemplaire  qu'il  pos- 
sède et  qu'il  tient  de  M.  Rousset  provient  de 
cette  collection  assurément  détruite  lors  de  l'in- 
cendie du  Ministère  sous  la  Commune. 

Cette  surcharge  n'a  pas  été  faite  à  l'atelier  de 
M.  Hulot. 

Quant  à  la  surcharge  10,  bleu  foncé,  existant, 
en  caractères  romains,  sur  des  timbres  jaune  bistre 
à  10  centimes,  effigie  laurée  de  Napoléon  III, 
elle  a  été  exécutée  par  l'Imprimerie  nationale,  au 
mois  d'août  1871,  époque  à  laquelle  furent  fabri- 
qués les  timbres  à  15  centimes  également  jaune 
bistre. 

On  tenait  à  conserver  cette  couleur  pour  la 
taxe  locale  qui  allait  être  élevée  de  10  à  15  cen- 


HISTOIRE    DU    TIMBRE- POSTE    FRANÇAIS  IqS 

times  et  Ton  voulait  aussi  épuiser  l'approvision- 
nement  assez  important  des  timbres  à  lo  cen- 
times à  l'effigie  impériale.  Pour  distinguer  ces 
figurines  de  valeurs  et  d'effigies  différentes,  mais 
de  même  couleur,  on  songea  à  la  surcharge;  on 
y  renonça  presque  aussitôt  et  les  vignettes  sur- 
chargées furent  détruites. 

Pourquoi  en  existe-t-il  tant  de  la  sorte?  Comme 
de  beaucoup  de  surcharges,  nous  doutons  de  leur 
authenticité. 


VIII 


Erreurs  d'impression. 


Bien  à  tort,  certains  catalogues  classent  des 
essais,  des  timbres  préparés  mais  non  émis,  comme 
erreurs  d'impression.  Celles-ci  sont  fort  rares; 
elles  ne  consistent  guère  que  dans  des  types  de 
timbres  d'une  valeur  autre  que  ceux  de  la  planche 
dans  laquelle  ils  ont  été  placés  par  mégarde.  C'est 
ainsi  que  des  timbres  à  15  centimes,  effigie  de  la 
République,  sont  imprimés  avec  la  couleur  (bistre 
sur  rose)  propre  aux  figurines  à  10  centimes 
(gros  chiffres). 

Le  croirait-on?  ces  vignettes  sont  recherchées 
au  prix  exorbitant  de  40  trancs  ! 


IX 


Etymologie  de  ((  Philatélie  ». 

Certains  amateurs  de  timbres-poste  donnent  à 
leurs  études  ou...  à  leur  passion,  le  nom  de 
«  Philatélie  »,  qui  a  pour  parrains  MM.  Herpin  et 
Maury  (voir  «  le  Collectionneur  de  Timbres- 
poste  »,  année  1864,  n°-^  5  et  6). 

Son  etymologie  vient  de  deux  mots  grecs  : 
«  philos  »,  ami  et  «  aieleia  »  franchise,  exemption 
de  charges,  d'impôts,  de  tributS;  etc. 

La  philatélie  serait  donc  l'amour  de  l'étude 
de  tout  ce  qui  se  rapporte  à  l'affranchissement. 

Nous  n'oserions  point  nous  prononcer  sur  la 
valeur  de  cette  appellation. 


X 


Prix  des  Timbres. 


Nous  indiquons,  au  tableau  synoptique  figurant 
à  la  fin  du  volume,  seulement  à  titre  de  curiosité, 
les  prix  de  nos  timbres  français  les  plus  rares. 
Ces  prix,  très  variables  selon  les  époques,  l'état 
de  conservation  du  timbre,  la  dentelure,  la  nuance 
et  l'oblitération,  sont  ceux  de  la  maison  Roussin, 
au  mois  de  juillet  1891. 

Cette  maison  a  vendu,  en  1 889, 
pour  la  somme  de  4  000  francs, 
un  timbre  de  l'île  Maurice,  émis- 
sion de  1847;  c'est  le  plus  rare 
et   celui  qui,  jusqu'à  présent,  a 
atteint  le  prix  le  plus  élevé. 
Un  timbrophile  nous  montrait 
récemment  deux  exemplaires  de  ces  timbres,  l'un 
neuf,  l'autre  oblitéré,  en  nous  déclarant  qu'il  ne 


Fjor.  60.  —  Maurice. 


HISTOIRE    DU    TIMBRE-POSTE    FRANÇAIS  I  QQ 

s'était  point  laissé  tenter  pour  cette  paire  raris- 
sime par  une  offre  de  lo  ooo  francs. 

Viennent  ensuite  les  timbres  de  la  Guyane 
anglaise  (1850)  et  d'Hawaï  (1852),  offerts  pour 
3  à  4  000  francs,  puis  ceux  de  notre  colonie  de  la 
Réunion  (1852),  valant  environ  i  200  francs. 


lNÇAIS, 


Reprise  d 

Fabrication  d© 

(Décision    mi 
du  19  octob: 

ai 

Q. 

r^ 

Typ?s  1 

7 

Vert 
(15  no\ 

Brun    V 

(15  nov 

Lilas 

(15  noV 

H 

Vert  clair  (1 

1 

Jaune 

TABLEAU   SYNOPTIQUE    DES   TIMBRES-POSTE    FRANÇAIS,  DE    1849   A    1891. 


Deuxième  République 

(1849-18521 

Empire  (1852-18701. 

Troisième  République  (18701.                                     || 

Type  primilif 
(Télé  de   la  Liberlél. 

l'nx 
marchand. 

ElflRie 
du   Président 

(  Louis-Napoléon 
BonaparleV 

Pr 

marc 

iimd. 

EfOgie 
de   Napoléon   111. 

EfQlçie  do  Napoléon  111 
(Tète  laurée). 

Reprise  du  type  pnm 

tif  ( 

Tète  de  la    Liberté). 

Type  actuel  : 
Groupe    allégorique 

Fabrication  de  Bordeaux. 

FabiicaLiou  de  Paris 

^5s 

"^^ 

^-^^ 

'       ^- 

-"^ 

h  la  cessation  de  la  guerre. 

(Le   Commerce  et  la  Paix 

êil 

é 

M 

■S 

ï. 

■li 

T* 

régnant  sur  le  Monde). 

S 

Type    1. 

2: 

O 

Type  2. 

£ 

0 

Type  3. 

S" 
4 

Types  4,  5  et  G. 

iD. 

Typos  1  et  7. 

!- 

Types  1  cl  7. 

Type   8. 

1  .-elll. 

Yen  olive  (1"  nov.  1800). 

Vert  olive  (mars  1881) 

Verl    olive 
(15  nov.  1S701. 

Verl  olive  (nov.  18721, 

Vert  émeraiide  (janvier  18771, 
Noir  sur  bleu  (juin  1877). 

■2    — 

4 

Brun  Van  Dyck  (déc.  1802) 

7 

Brun   Van   Dyck 
(15  nov.  1870). 

7 

Brun  Van  Dyck 
iniai   1872).              ) 

Vert  émeraude  (juillet   1876). 

Brun  Van  Dyck  sur  chamois  cluii 

(mai  1877). 

Jaune  foncé  sur  jaune  clair 

Lilas  pile 
(15  nov.  1870). 

i 

(juin  1878). 
Gris  foncé  sur  gris  perle  (juin  1880). 

Lilas   pile  (sepl.  1S61). 

7 

7 

Lilas  pAle  (mai  1872). 

Vert  émeraude  (septembre  1876). 

Marron  sur  gris  bleu  (sept.  1877). 

Verl   clair  (li  nov.  1854). 

1 

Vert  oluir(  15  nov.  18701. 

7 

Vert  clair(juin  1872). 

Emeraude  sur  vertd'eau  (juil.  1877) 

Jaune  bistre  (12  sept.  1850). 

6     . 

2    . 

Jaune  bistre 
(août  1852). 

10   .. 

5        n 

Jaune   bistre  (aoùl  1853). 

Jaune  bistre  (nov.  1867). 
Surcharîre  10  en  bleu  faite 

Jaune  bistre           1  7 

Jaune  bistre  (ocl.1870).  1 

Verl  émeraude  (juillet  1876). 

Jaune   bistre  (réimpr.). 

3     . 

.     . 

Jaune  bistre 
(réimpression). 

3  50 

août  1371,  1  émission  n'a 

' 

(15  nov.  1870).        ) 

(15  janvier  1873).        ) 

Noir  sur  violet  (décembre  1876). 

.-) 

Vert  (23  juillet  1850). 

(Suppression  l-'juin  1853). 

Vert  {réimpression) . 

75     . 
5     .. 

3     . 

<l  1 
V 

Jaunebislre(l"sept.1871)( 
Jaune  bistre  (16mai1874)^ 

Gris  dacier  (juin  1876). 
Bleu  sur  bleu  péde  (juin  1878). 

1 

Noir  (1"  jauTier  1819). 

2  511 

..  20 

1 

.0    J 

Kelrait  (30  octobre  1850). 

Bleu  (?). 

Noir  (réimpression). 

Bleu  (réimiiression). 

100    .. 

2  .. 

3  .. 

100    » 

Bleu  (1"  juillet  1854). 

■' 

Bleu  (1"  avril  1867). 

1 

Bleu  (15  nov.  1870). 

1 

Bleu  (11  oct.1870). 
Suppr.  (1"'3epl.1871). 

Marron  sur  chamois  (octobre  1876). 
Garance  sur  verl  olair(mars1879). 

Bleu  outre-mer  (juillet  1876). 
Bleu    sur  teinte  turquoise 

■»  - 

Bleu  (!•' juillet  1850). 
Bleu  (réimpression). 

8     il 
3     . 

.  15 

Bleu  (déc. 1852). 
Bleu  (réimpr.). 

8    » 
3  50 

i.  40 

Bleu  (novembre   1S53,. 
Suppr,   (1"  juillet   1851). 

1 

Bleu  (sept.  1871). 

Noir  sur  laque  rouge  (ocl.  1878). 

Jaune  foncé  sur  jaune  clflir 

(aoùl  1879). 

(iris  noir  sur  rose  (avril  1386). 

30     — 

•' 

Marron  11"  avril  1867). 

1 

Marron  (15  nov,  1870l. 

' 

Marron  (sept.  1872). 

Bisire  sur  bistre  clair(junietl878). 
Violet  sur  orange  (juin  1878). 

3ô    - 

\ 

(Supprimé  en  principe  on  févriei  - 
1887  et  déQnitivement    à    partir 
du  15  oclobre  1890.) 

10    — 

Oranee  (réimpression). 

4     . 

■' 

Oranje  (8  septembre  1853). 

5 

Orange  (juillet  1807). 

1 

Oranf!e(15  nov.  1870). 

1 

Orange  (Il  ocl.  1870). 

Garance  sur  paille  (février  1878). 

50    — 

„ 

Carmiu  sur  rose  clair  (1890). 

(Qirmin  surrose  clair(l'^ ocl.  1876).|| 

(Supprimé   par  décision 

du  7  mars  1890.) 
Violet  sur  orange  (I5oclobre  1890 

Sit     — 

Rouse  vermillon  (jauv.  1849) 
,      Retrait  (l"'déc.  1849). 

250    ., 

,5;  : 

Rouge  carmin(l"'dée.  1854) 

Kougs  rose  (octobre  1S60). 

Carmin  (août  1853). 

■' 

Rouae  rose  (déc.  1867). 

1 

Rose  foncé 
(15  nnv.    1870). 

' 

R03e(l"sepl.  18:21, 
Suppr,  (juillet  1S75).. 

1  fr«ni^ 

/Rouce  jaonWre  (août  1S49) 
)  Rouge  foncé  (déc.  1849|. 
,     K..1IS.-  foncé  (réimpr.). 

100    » 
15     . 

15     .. 
3  50 

1    ' 

Prix    :    noula,    15   fi., 
oblitérés.   8  fr. 

A   pîlrlir    d'OcloLre    1862. 
les  umbres-po.slG  soat  pointillés 

1) 

Violet  paln(l-' nov.  1869). 

Prix  :  neufs,  10  fr. 
(Retrait,  1"  juin  1877.) 

Umnze  sur  paille  (sc|.leuibie  1870), 

Lilas  foncé  sur  lilas  riaii- 
(l-juin  1877). 

i 


NOTA,    -     L<- 


I  Suppression  ^'applique 


nrk  (I  i^lu  épiiisô  dans  le  «erviiîe,  relui  .le  Retrait  est  omployë  pour  les  liiiihrp^  dnrit  TAdu 


a  ordonné  Ip  renvoi  el  la  destruction  npri 


TABLE  DES  MATIÈRES 


DÉDICACE ••  "li 

I 

HISTOIRE  DU  TIMBRE-POSTE  FRANÇAIS 

Chapitre  premier.  —  Mode  d'affranchissement  et 
tarifs  appliqués  en  France  antérieurement  au  Tim- 
bre-poste; Première  reforme  postale,  opérée  en 
Angleterre,  origine  du  timbre-poste;  Réforme  pos- 
tale en  F'rance;  Création  du  Timbre-poste  fran- 
çais            i 

Chapitre   II.   —   Développement    et  transformations   ■ 
du  Timbre-poste;  Lois,  règlements  et  circonstances 
qui  les  ont  mo  ivés 21 

Chapitre  III.  —  Dérivés  du  Timbre-poste  français.  — 
Chiffres-taxes;  Cartes  postales;  Enveloppes  et  ban- 
des timbrées;  Cartes-lettres;  Timbres-poste  colo- 
niaux         3 1 

Chapitre  IV.  —  Fabrication 73 

Chapitre   V.  —  Consommation  annuelle 84 

Chapitre  VI.  —  Contrefaçon  et  emploi  frauduleux  de 
Timbres-poste;  Législation   pénale 8G 

Chapitre  VII.  —  Variétés.  —  Le  Timbre-poste  à  la 
«  Correctionnelle  » (iq 


204  TABLE    DES    MATIERES 

Chapitre  VIII.  —  Préposés  à  la  vente;  Remises  aux 
intermédiaires 1 06 

Chapitre  IX.  —  Oblitération  des  Timbres-poste iio 

(Chapitre  X.  —  Le  Timbre-poste  pendant  la  guerre 
de  1870- 1871 ii5 

Chapitre  XI.  —  Usage  du  Timbre-poste  en  dehors 
de  l'affranchissement  des  correspondances ik) 

II 
LES  COLLECTIONS  ET  LES  COLLECTIONNEURS 

I.  —  Des  collectionneurs  en  général i2J> 

II.  —  Des    collections    de    Timbres-poste;  Bourse 

aux  Timbres 1 2q 

ni.  —  Les  Timbres  français  (Poste,  Télégraphe  et 
Téléphone)  au  point  de  vue  des  collec- 
tions     i55 

APPENDICE 

I.  —  Imitation  des  Timbres-poste 175 

II.  —  Savants,  ingénieurs,  artistes  qui  se  sont  occu- 
pés du  timbre 1 78 

III.  —  Le  futur  timbre  colonial 1 82 

IV.  —  Timbres  spéciaux  de  la  Réunion i85 

V.  —  Timbres  et  chiffres-taxes  provisoires 187 

VI.  —  Timbres  coupés 192 

VIL  — Timbres  préparés  mais  non  émis 193 

VIII.  —  Erreurs  d'impression 196 

IX.  —  Étymologie  de  «  Philatélie  » 197 

X.  —  Prix  des  timbres 198 

XI.  —  Tableau  synoptique  des  timbres-poste  fran- 
çais   201 

Coulommiers.  —  Imp.  Paul  Brodard. 


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